Jan 8, 2016 | Livres et carnets |
Un des plus beaux livres que j’ai lu ces derniers temps, qui a obtenu le prix Nicolas Bouvier 2014, délivré lors du festival Étonnants Voyageurs de Saint-Malo. Entre nous, les Levantins, par Benny Ziffer.
La collection Khalil est restée en Égypte, et, à long terme, elle a vaincu l’Égypte. Il y a quelque chose de symbolique dans le fait que, quarante ans après la révolution nassérienne, avec la disparition du Chef de l’État, Mohamed Khalil a recouvré sa demeure et son honneur. Ses portraits accrochés à nouveau aux murs de son palais français offrent le témoignage que la volonté de ressembler à l’Occident, aspiration condamnable aux yeux d’aucuns, demeure vivace en Égypte, après des années d’étouffement chauvin.
De la fenêtre du deuxième étage du musée donnant sur le Nil, on aperçoit à travers les plis d’un rideau blanchâtre des bateaux recouverts de bâches bercés par les flots, dans la petite marina d’un club de plaisance. Est-ce un hasard si ce paysage ressemble à s’y méprendre au tableau de Claude Monet exposé dans une salle voisine, Argenteuil, bateaux au long de la berge ?
Benny Ziffer, Entre nous, les Levantins
Actes Sud 2014
Traduti de l’hébreu par Jean-Luc Allouche
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Mar 1, 2015 | Barattages |
Jean-Pierre Filiu a raison et personne ne doit perdre cela de vue : les destructions de Daech dans le musée de Mossoul ont deux vocations. La première est de générer un trafic d’œuvres d’art dont les recettes sont juteuses. La seconde est un outil de propagande. Voici ce qu’il dit dans une interview donnée à Libé :
Bien sûr, ces destructions font partie de leur propagande. Leur message est clair : «Regardez, quand des musulmans sont tués, personne ne bouge, il n’y a aucune réaction. Mais dès que l’on tue des otages occidentaux ou que l’on détruit des statues, tout le monde s’indigne.»
On s’indigne de la destruction de ces œuvres car les auteurs de ces crimes paraissent encore plus bestiaux que lorsqu’ils massacrent n’importe qui sans discernement. Dans cette niche se tapit notre impossibilité à réagir face à la plus sombre des tyrannies et c’est toute une chape de plomb qu’on fait couler sur les milliers de morts dont se rend coupable l’organisation islamique. Mais ce n’est pas pour autant qu’on doit fermer les yeux lorsque des êtres humains qui n’ont jamais mis les pieds dans un musée y pénètrent pour tout saccager. Personnellement, ce qui m’interroge, c’est cet élan qui rase tout sur son passage, qui n’a pour but que faire table rase du passé et extirper les populations de leurs repères, dans lequel on ne peut voir (en dehors de la plus crasse des imbécilités) que la volonté de domination des peuples. En rasant leur histoire, on rase leur passé et on modifie leur avenir. Les peuples n’ont plus vocation qu’à devenir les instruments de tarés congénitaux qui ne pensent qu’à dominer le monde par les armes, au nom d’un Dieu des écrits qu’ils n’ont peut-être fait qu’apprendre par cœur, sans discernement, sans critique. Mais une fois qu’on a dit ça, on n’a pas dit grand-chose.
Hier soir, je lisais un texte court de Simon Leys, paru dans le Magazine Littéraire (L’empire du laid, in Le bonheur des petits poissons) il y a une dizaine d’années et qui sous couvert d’être un tantinet humoristique m’a apporté un éclairage nouveau qui n’est peut-être pas loin de dire quelque chose de vrai, et de surprenant :
Les vrais philistins ne sont pas des gens incapables de reconnaître la beauté — ils ne la reconnaissent que trop bien, ils la détectent instantanément, et avec un flair aussi infaillible que celui de l’esthète le plus subtil, mais ce n’est pas pour pouvoir fondre immédiatement dessus de façon à l’étouffer avant qu’elle ait pu prendre pied dans leur universel empire de la laideur. Car l’ignorance, l’obscurantisme, le mauvais goût, ou la stupidité ne résultent pas de simples carences, ce sont autant de forces actives, qui s’affirment furieusement à chaque occasion, et ne tolèrent aucune dérogation à leur tyrannie. Le talent inspiré est toujours une insulte à la médiocrité. Et si cela est vrai dans l’ordre esthétique, ce l’est bien plus encore dans l’ordre moral. Plus que la beauté artistique, la beauté morale semble avoir le don d’exaspérer notre triste espèce. Le besoin de tout rabaisser à notre misérable niveau, de souiller, moquer, et dégrader tout ce qui nous domine de sa splendeur est probablement l’un des traits les plus désolants de la nature humaine.
Ce serait donc bien dans ce qui diffère des représentations de son propre obscurantisme que se cacherait cette navrante vague iconoclaste…
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Feb 28, 2015 | Arts |
Vingt siècles nous séparent de la dynastie de Han, dont l’empereur Qin Shi Huang (秦始皇) reste le personnage le plus emblématique de cette période par son esprit visionnaire et son esprit unificateur. Cette exposition qui se termine le 1er mars 2015 au Musée Guimet montre une grande variété d’objets rituels funéraires d’une grande finesse. La pièce maîtresse de l’exposition reste ce superbe linceul de jade de la tombe du roi de Chu dont j’avais déjà parlé ici et qui est venu jusqu’à Paris. Statuettes de terre ou de bronze, brûle parfum Boshanlu, vases Hu, statuettes gracieuses de danseuses… tout un monde hiératique et mystérieux qui dit combien la société traditionnelle des Han était élaborée au travers de ses traditions funéraires.
Se laisser simplement bercer par des images comme si elles venaient d’un autre monde et le voyage commence déjà.
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Feb 6, 2014 | Chambre acoustique |
Découverts un peu au hasard, les travaux de l’ethnologue Marceau Gast constituent une source importante de témoignages sonores recueillis dans le Sahara du sud algérien, au Yémen mais aussi en France ; ses quatre thèmes de travail sont l’artisanat, les pratiques agricoles, les techniques de conservation des aliments et les traditions orales. On peut trouver sur cette page (sur le site Encyclopédie Berbère) l’intégralité des références de ses travaux.
Ses archives sonores, dans le but d’être exploitées, de constituer un fonds patrimonial conséquent et pour aussi être protégées des méfaits du temps, ont été déposées sur le site de la phonothèque de la Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme (MMSH).
On trouvera également ici une notice de référence sur Marceau Gast.
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