Jun 3, 2012 | Arts |
Cette pièce tout à fait étonnante conservée au Louvre (numéro d’inventaire E4850) représente le dieu Horus à cheval tuant de sa lance un crocodile nilotique, qui est en réalité le dieu Seth symbolisé. Élément de fenêtre taillé dans le grès, cet objet date du IVè siècle après J.-C., soit en pleine période de l’Égypte chrétienne, qu’on connait sous le nom de copte. Il est très intéressant car il fait la liaison entre trois civilisations au travers d’un seul et même mythe traduit différemment, en impliquant une thématique récurrente dans les religions, la lutte du bien contre le mal :
- Le passé avec la Grèce ancienne, avec le mythe de Persée tuant la bête marine pour délivrer Andromède grâce à son épée magique.
- L’époque contemporaine avec les dieux de la civilisation égyptienne, Horus et Seth. L’utilisation du cheval n’est pas franchement égyptienne et provient plutôt de la Perse voisine, qui à cette époque a déjà soumis l’Égypte par deux fois.
- L’époque chrétienne en pleine expansion s’appropriera cette thématique par un curieux détour, passant par l’Empire Romain. Par le biais de ses esclaves africains qu’on retrouvera sur le continent américain, elle générera la figure du dieu guerrier du vaudou haïtien Ogun, assimilé à Saint-Georges, terrassant à son tour le dragon.

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May 25, 2012 | Carnets de route (Osmanlı lale), La rose et la tulipe (carnet de voyage à Istanbul), Sur les portulans |
Épisode précédent : La rose et la tulipe, carnet de voyage à Istanbul 8 : Kedi ve köpek (Chats et chiens)

Voici un lieu que j’avais déjà visité dans mes rêves et dans lequel je me suis enfoui, trente six pieds sous terre. La citerne enfouie sous terre est une des innombrables réserves d’eau que les Romains ont laissé comme patrimoine à une Constantinople ottomane et la plus grande de toutes. Un peu plus loin se trouve Birbin direk ou citerne de Philoxenos, la citerne aux mille colonnes (224 en fait), aujourd’hui à sec et ouverte à la visite quand ils ont le temps, et plus bas, au pied de l’ancien hôtel de ville, celle de Théodose. On pense que la ville en comptait environ 80 dans ce genre et on se rend bien compte avec la géographie de la ville que leur emploi était essentiel notamment en cas de rupture des aqueducs lors des sièges.
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May 22, 2012 | Histoires de gens, Livres et carnets |

Constantin VI, Irène l’Athénienne, Léon III, Constantin V et Léon IV
Léon IV le Khazar, qui fut emporté par son amour immodéré des richesses dorées et des breloques et en particulier de sa couronne fétiche, était le père d’un des empereurs les plus malchanceux de l’histoire de Constantinople, Constantin VI, fils d’Irène l’Athénienne. A la mort de son père, n’ayant que 9 ans, sa mère prit la régence de l’Empire, rétablissant et permettant pour un temps le culte des icônes qui fut à cette époque un des enjeux majeurs de la politique religieuse (concile de Nicée II). Personnage des plus effacés, sans réel pouvoir, complètement étouffé par une mère qui de régente se fait nommer basilissa (βασίλισσα, reine) à la suite du succès de ce concile, Constantin, jaloux de son pouvoir, s’allie aux iconoclastes pour reprendre les rênes de l’Empire, sans réel succès. Ses défaites face aux Bulgares qui poussent aux portes de Constantinople et son image désastreuse liée au fait qu’il ait divorcé puis se soit remarié avec une inconnue, Théodora, que le peuple même appelait son auguste putain, en firent un empereur détesté du peuple autant que de sa cour, qu’il a réussi à se mettre à dos par une savante manœuvre particulièrement éclairante sur sa couardise : (more…)
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May 12, 2012 | Carnets de route (Osmanlı lale), La rose et la tulipe (carnet de voyage à Istanbul), Sur les portulans |
Épisode précédent : La rose et la tulipe, carnet de voyage à Istanbul 4 : Kadırga Meydanı et Emir Sinan Mahallesi

Où que l’on soit à Istanbul, d’où qu’on vienne et où qu’on aille, il est difficile de ne pas passer par Divan Yolu Caddesi. Cette artère qui traverse la ville d’est en ouest et qui sur une bonne partie est interdite à la circulation (sauf au tramway et à quelques taxis) est en réalité l’antique Mésè, une route commençant au Milion, autrefois matérialisé par un arc et qui marquait le point de référence à partir duquel toutes les distances étaient calculées (dont il ne reste aujourd’hui plus qu’un fragment discret non loin de la citerne basilique) et qui rejoignait aux limites de la muraille de Théodose la porte dorée donnant accès à la route vers Rome. Cette route traversait alors le forum de Constantin, dont il ne reste plus aujourd’hui qu’une colonne au sommet de laquelle l’Empereur était représenté sous la forme d’Apollon-Hélios, colonne qu’on appelle aujourd’hui en turc Çemberlitaş ou colonne cerclée. (more…)
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May 9, 2012 | Histoires de gens |
En ces temps troublés, il est bon de retourner aux fondamentaux, comme cet édit qui amorça la naissance de l’Empire Romain d’Orient. Un texte clair, simple, un édit de tolérance.

A partir de ce jour, que celui qui veut suivre la foi chrétienne la suive librement et sincèrement, sans être inquiété ou molesté d’aucune manière. Nous avons tenu à faire connaître cela à Ton Excellence [le préfet de Nicomédie] pour que tu n’ignores point que nous avons accordé aux chrétiens la liberté la plus complète, la plus absolue de pratiquer leur culte. Et puisque nous l’avons accordée aux chrétiens, il doit être clair à Ton Excellence qu’en même temps est accordée aussi aux adeptes des autres religions le droit plein et entier de suivre leur coutume et leur foi et d’user de leur liberté de vénérer les dieux de leur choix, cela pour la paix et tranquillité de notre temps.
Édit de Milan signé par Constantin Ier et Licinius,
empereurs romains en 313,
cité dans LACTANCE, De mortibus persecutorum, 48, 4–8.
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