Pendant toute la durée de cette période exceptionnelle, une petite chronique de trois jours en temps de guerre, bien au chaud chez moi.

Pendant toute la durée de cette période exceptionnelle, une petite chronique de trois jours en temps de guerre, bien au chaud chez moi.
Non, c’est décidé, je n’irai pas voter. Je pourrais mais je n’irai pas. La raison est tellement simple que je ne sais même pas comment j’ai envisagé un seul instant ne pas m’affranchir de me plier au plus élémentaire des devoirs.
Chaque nuit me fait peur. Je ne sais jamais ce que je vais trouver au petit matin, si je suis toujours en vie, je ne sais jamais si je vais trouver le monde tel qu’il était la veille, si un événement ne serait pas en train de changer radicalement l’ordre du monde établi.
Cris d’extase… Quelle campagne ! Avec ses plaines emblavées et ses chemins boueux où la pierre affleure. Voici la campagne la moins ennuyeuse qui soit. Celle qui ne bouge pas et qui ne promet pas grand chose, qui ne fait pas de bruit et ne sort jamais du bois. Une campagne telle qu’elle devrait toujours être.
Je n’ai jamais eu l’opportunité de la voir de mes propres yeux, mais il paraît que l’étrange lumière venue d’Islande a quelque chose de magique qu’on ne peut, bien évidemment, voir qu’à des latitudes où la nuit dure longtemps, bien que plus que la valeur d’une nuit humaine.
11 novembre, on commence à entrer dans le dur. L’automne ne se cache plus, la lumière rasante du soleil disparaît à 14h30 derrière le toit de la maison des voisins, laissant ainsi le jardin dans une semi-ombre terrifiante, qui dit aussi que les beaux jours sont derrière nous.
Retour des beaux jours lumineux de l’automne, des belles journées encore douces au soleil bas et aux senteurs nouvelles qui annoncent la mort prochaine de l’année. Il y a quelques semaines que je n’ai rien écrit. Non pas parce que je n’avais plus rien à dire, plus rien à partager, mais parce qu’il me manquait quelque chose.
Si un jour on me demande quel livre a plus vécu que moi, je répondrais sans hésitation, c’est celui-ci. On dira ce qu’on veut, il y a des livres qui vivent plus longtemps que ceux qui les lisent ; je veux dire par là, dans une vie d’homme…
Assis non loin des vestiges du Temple de Salomon, inquiet comme un chat sous l’orage, je pouvais entendre bruire la rumeur de ceux qui priaient au pied de l’immense muraille.
Nous étions seuls et nus face à l’immensité d’un désert de sable jaune, arasé par la lumière crue d’un mois de février pas tout à fait comme les autres. Il n’y avait rien autour, tout le monde s’était évanoui, et il ne restait plus que nos pauvres âmes esseulées mais remplies de bonheur.