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Sale gosse

Sale gosse

Je suis un petit con, du haut de mon âge avan­çant, de mes che­veux poivre et sel et de ma vue qui baisse, un petit con qui fait n’importe quoi, qui agit et réflé­chit après, mais ce n’est pas grave, ça se finit tou­jours bien. Même mal, tout se passe.

Une semaine sur terre. Jour­nal du confi­ne­ment III

Une semaine sur terre. Jour­nal du confi­ne­ment III

Nuit dif­fi­cile, des rêves qui n’en finissent pas, des rêves qui pour­rissent mes matins et qui jouent avec mes peurs. Je suis un grand trouillard, j’ai des pho­bies, et je me demande si la plus grande n’est pas celle des pro­fon­deurs océa­niques. Comme je le dis à ceux qui me disent que pour un fils de Bre­ton, c’est quand-même pas de bol, je réponds que dans ma famille, per­sonne n’est marin-pêcheur, ni même marin tout court, et nous nageons tous comme des enclumes.

Après la tempête

Après la tempête

Chaque nuit me fait peur. Je ne sais jamais ce que je vais trou­ver au petit matin, si je suis tou­jours en vie, je ne sais jamais si je vais trou­ver le monde tel qu’il était la veille, si un évé­ne­ment ne serait pas en train de chan­ger radi­ca­le­ment l’ordre du monde établi. 

Rase cam­pagne

Rase cam­pagne

Cris d’ex­tase… Quelle cam­pagne ! Avec ses plaines embla­vées et ses che­mins boueux où la pierre affleure. Voi­ci la cam­pagne la moins ennuyeuse qui soit. Celle qui ne bouge pas et qui ne pro­met pas grand chose, qui ne fait pas de bruit et ne sort jamais du bois. Une cam­pagne telle qu’elle devrait tou­jours être.

Íslenskt svæði (zone islandaise)

Íslenskt svæði (zone islandaise)

Je n’ai jamais eu l’opportunité de la voir de mes propres yeux, mais il paraît que l’étrange lumière venue d’Islande a quelque chose de magique qu’on ne peut, bien évi­dem­ment, voir qu’à des lati­tudes où la nuit dure long­temps, bien que plus que la valeur d’une nuit humaine. 

Moka au bar au café de la Résistance

Moka au bar au café de la Résistance

Retour des beaux jours lumi­neux de l’automne, des belles jour­nées encore douces au soleil bas et aux sen­teurs nou­velles qui annoncent la mort pro­chaine de l’année. Il y a quelques semaines que je n’ai rien écrit. Non pas parce que je n’avais plus rien à dire, plus rien à par­ta­ger, mais parce qu’il me man­quait quelque chose. 

Dans l’ombre de Jim Thomp­son (Les oubliés du pays doré #3)

On com­mence tou­jours par Jim Thomp­son. C’est son nom qu’on cherche dans les bases de don­nées, les archives des jour­naux, les registres d’é­tat civil. Jim Thomp­son, l’A­mé­ri­cain, indus­triel qui fit renaître l’industrie ances­trale de la soie thaï­lan­daise. Jim Thomp­son, dis­pa­ru en 1967 dans les Came­ron High­lands de Malaisie.

Les fan­tômes de l’O­rien­tal (Les oubliés du pays doré #2)

On arrive tou­jours à Bang­kok par le fleuve. Même aujourd’­hui, même en avion, c’est le Chao Phraya qui nous accueille, ser­pent brun et majes­tueux char­riant l’his­toire. En 1876, deux capi­taines danois, Han­sen et Ander­sen, com­prirent cela. Ils ache­tèrent une bâtisse au bord de l’eau. Un hôtel. Pour­quoi pas, après tout. Le Siam s’ou­vrait au monde comme on ouvre une fenêtre sur l’Orient. Avec un O majuscule.

Suvar­nabhu­mi (Les oubliés du pays doré #1)

L’aé­ro­port de Bang­kok porte ce nom : Suvar­nabhu­mi. Quinze mil­lions de pas­sa­gers par an pro­noncent ce mot sans le com­prendre. Ils tra­versent le hall cli­ma­ti­sé, traînent leurs valises à rou­lettes sur le marbre gris, achètent du whis­ky détaxé. Per­sonne ne sait qu’ils foulent la Terre de l’Or.

SG‑3, le puits qui vou­lait per­cer la Terre

Il y a dans le Grand Nord russe un endroit où l’on a ten­té de com­mettre un geste insen­sé : creu­ser la Terre non pas pour en extraire du pétrole ou des dia­mants, mais sim­ple­ment pour voir jusqu’où elle consen­ti­rait à se lais­ser trans­per­cer. L’endroit s’appelle la pénin­sule de Kola, une éten­due déso­lée balayée par des vents qui sentent l’océan et l’infini, avec ses forêts maigres et ses sols qui craquent sous le gel.

Wadi al-Salam, la cité des morts

Il est des lieux où la vie et la mort cessent de s’opposer et se prennent par la main pour mar­cher ensemble, presque pai­si­ble­ment. À Najaf, au sud de l’Irak, s’étend Wadi al-Salam, la « val­lée de la paix » — le plus vaste cime­tière du monde. Ses dimen­sions donnent le ver­tige : plu­sieurs kilo­mètres car­rés de tombes, de mau­so­lées et de gale­ries sou­ter­raines, comme une ville qui n’aurait jamais ces­sé de croître, mais dont les habi­tants ne parlent plus.

Komo­re­bi : juste le soleil au tra­vers du feuillage

Il existe des mots qui ne devraient jamais être tra­duits. Le japo­nais a ce talent d’enfiler des perles lin­guis­tiques pour dire l’indicible. Komo­re­bi en fait par­tie : la lumière du soleil qui filtre à tra­vers les feuilles. Trois syl­labes pour sai­sir ce moment fugace où le vent, en bou­geant les branches, joue au pro­jec­tion­niste avec le ciel.

Mille ans entre les murs : la Badia Fio­ren­ti­na en silence

Il faut par­fois pous­ser une porte entrou­verte pour entrer dans le cœur secret d’une ville. À Flo­rence, der­rière un porche dis­cret de la Via del Pro­con­so­lo, se tient depuis plus d’un mil­lé­naire la Badia Fio­ren­ti­na. Fon­dée en 978 par Willa, mar­quise de Tos­cane, cette abbaye est l’un de ces lieux où l’Histoire s’accumule comme des couches de pein­ture, chaque époque y ajou­tant sa touche sans jamais effa­cer com­plè­te­ment la précédente.

Vapeurs sur le Bosphore

On dit sou­vent qu’Istanbul est une ville de ponts. C’est vrai, mais réduc­teur. Avant que le béton ne se tende d’une rive à l’autre, il y avait déjà, sur l’eau, des sil­houettes blanches striées d’orange qui fai­saient le lien : les vapur. Ces fer­ries grin­çants, cra­cho­tant de la vapeur comme des loco­mo­tives à moi­tié marines, ont long­temps été l’unique manière de relier l’Europe à l’Asie sans se mouiller les pieds.

Eli­za­beth Sid­dal, le vam­pire de Highgate

Dans le Londres bru­meux du XIXe siècle, une étoile rousse allait enflam­mer l’i­ma­gi­na­tion des plus grands artistes de son époque. Eli­za­beth Sid­dal naquit le 25 juillet 1829, des­ti­née à deve­nir bien plus qu’un simple visage immor­ta­li­sé sur toile. Sa pas­sion pour la poé­sie s’é­veilla de la façon la plus roman­tique qui soit : en décou­vrant par hasard des vers de Ten­ny­son sur un vul­gaire bout de papier jour­nal enve­lop­pant une motte de beurre. Cette ren­contre for­tuite avec la beau­té cachée dans le banal devien­drait la par­faite méta­phore de sa propre existence.

Café du matin #13

Saint-Denis. Un air de revenez‑y. Je n’ai pas mis les pieds ici depuis une éter­ni­té, cer­tai­ne­ment depuis que je fai­sais mes études à l’u­ni­ver­si­té. J’a­vais oublié à quel point la sta­tion de métro Basi­lique était étri­quée et le quai peu large. L’embouteillage pour sor­tir, tout le monde se diri­geant vers l’es­ca­la­tor qui a du mal à absor­ber le flux. Un avant-goût de ce joyeux bor­del qui m’at­tend dehors. A peine sor­ti de la sta­tion du métro, je suis assailli par une dizaine de ven­deurs de ciga­rettes de contre­fa­çon qui tentent d’é­clu­ser leur car­gai­son en toute impunité…