Pierre Patel — Ver­sailles — 1668

Pierre Patel, dont les œuvres ont orné jadis le Cabi­net d’A­mour du Châ­teau de Ver­sailles, est un peintre clas­sique, for­te­ment influen­cé par les com­po­si­tions pay­sa­gistes de Le Lor­rain. Il donne en 1668 une com­po­si­tion par­faite et sur­tout impos­sible du châ­teau royal tel qu’il était à l’é­poque, dans une pers­pec­tive haute recréé à par­tir des élé­ments du ter­rain et de ses obser­va­tions. Un tra­vail de recom­po­si­tion tita­nesque, qui est une témoi­gnage unique de la val­lée dans laquelle il est encas­tré. A l’é­poque, ni les bâti­ments laté­raux, ni la cha­pelle ne sont encore pré­sents et les arbres ne sont encore que des jeunes pousses. Les détails valent vrai­ment la peine d’y regar­der de plus près.

Chateau de Versailles - 1668 - Pierre Patel

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Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 9 août) : Dans les gorges de Saklıkent (Kanyo­nu)

Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 9 août) : Dans les gorges de Saklıkent (Kanyo­nu)

Épi­sode pré­cé­dent : Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 8 août) : Arri­vée à Pata­ra, Gele­miş, Kum­luo­va, le Lêtốon

Bul­le­tin météo de la jour­née (jeu­di) :

  • 10h00 : 36.8°C / humi­di­té : 26% / vent 20 km/h
  • 14h00 : 40.5°C / humi­di­té : 19% / vent 7 km/h
  • 22h00 : 36.3°C / humi­di­té : 44% / vent 6 km/h

Il reste encore dix jours de Tur­quie, j’en suis au jour 14. J’ai l’im­pres­sion d’être ici depuis une éter­ni­té et l’an­goisse qui m’é­trei­gnant avant d’ar­ri­ver de me retrou­ver dans des lieux qui ne me convien­draient pas est loin der­rière moi. Je suis ici dans mon élé­ment, mal­gré cette cha­leur, mal­gré cette impres­sion de ne pas pou­voir res­pi­rer… Mais tout va bien.
Je prends mon petit déjeu­ner sur une ter­rasse recou­verte d’une ton­nelle très années 70, qui donne sur un pay­sage de col­lines et la mer au loin ; le vent rafraî­chis­sant du matin souffle tan­dis que je me repais de fro­mage blanc et d’une infu­sion de sauge très déli­cate avant de plon­ger dans la pis­cine. Pen­dant tout ce séjour, je fais exprès de me gaver au petit déjeu­ner pour n’a­voir pas à poser les pieds sous la table le midi et ain­si perdre le moins de temps pos­sible. Fina­le­ment, je me demande si l’ob­jec­tif ini­tial des vacances qui est de se repo­ser n’a pas été oublié en cours de route. Mais est-ce si grave que ça ?

Turquie - jour 14 - Saklikent Kanyonu - 004

Aujourd’­hui, direc­tion Saklıkent pour aller se fondre dans les gorges (kanyo­nu). Il paraî­trait que le site est très fré­quen­té en cette sai­son et les guides conseillent de par­tir tôt. De plus, ce que j’en ai vu à mon retour de Pamuk­kale, de nuit, ne m’a pas beau­coup plu. Une enfi­lade de bou­tiques attrape-couillon-de-tou­riste s’é­tire sur près de 500 mètres avant d’ar­ri­ver au par­king. Mais il en faut plus pour me désar­mer et sans le savoir, je prends une route le long d’une rivière large et caillou­teuse qui me fait arri­ver de l’autre côté de ce lieu de per­di­tion. J’ar­rive sur un par­king où je me gare tran­quille­ment et je me fais alpa­guer par un rabat­teur qui me demande de venir man­ger dans son res­tau­rant ; il est à peine 11h00… Je lui dis peut-être après la visite, mais je me rends compte une fois que je me suis éloi­gné que je suis en fait garé sur le par­king de son res­tau­rant… (more…)

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La plante-tur­ban

La plante-tur­ban

Dau­zat : « Tulipe; emprun­té au turc tül­bend, pro­pre­ment “(plante)-turban”. » […]
En 1562, Soli­man fait les hon­neurs de son jar­din à Ogier Ghis­lain de Bus­beck, ambas­sa­deur du Saint Empire ger­ma­nique, qui s’ex­ta­sie devant une fleur incon­nue, la tulipe et rentre chez lui avec quelques bulbes. L’an­née d’a­près, le baron de Bus­beck fait admi­rer les pre­mières tulipes de son jar­din à ses visi­teurs. Dans les années qui sui­virent, la répu­ta­tion de la tulipe gagne l’Eu­rope, les bulbes voyagent dans les malles de diplo­mates et des mar­chands, la fleur s’é­pa­nouit en Hol­lande, la demande aug­mente, le com­merce s’or­ga­nise, les prix montent (en 1637, mille pièce d’or pour un seul oignon), les spé­cu­la­teurs s’en mêlent, la pro­duc­tion se diver­si­fie, des gros­sistes engagent des for­tunes pour atta­quer le mar­ché anglais, qui boude les bulbes. Le flegme bri­tan­nique pro­voque un repli panique à la bourse de Haar­lem, c’est le krach.
En dehors de la bulle finan­cière, la folie-tulipe conti­nue ; sur les bords du Bos­phore, toute la popu­la­tion est tou­chée. Au début du XVIIIè siècle, un « registre des jar­dins de tulipes d’İst­anb­ul » réper­to­rie onze cent huit varié­tés. Quand com­mence une grande époque de fête et d’in­sou­ciance, qui coïn­cide avec la fin du règne d’Ah­med III, on l’ap­pelle l’ère des tulipes. Un vent de plai­sir souffle sur la ville, le sul­tan nomme un ministre des jar­dins et la tuli­po­ma­nie connaît son apo­théose. En 1720, des réjouis­sances sans pré­cé­dent sont orga­ni­sées dans toute la ville en l’hon­neur de la cir­con­ci­sion de quatre fils du sul­tan qui reçoit dans son palais de Beşik­taş, sur les bords du Bos­phore, avec des tor­tues-lam­pions dans les jar­dins de tulipes.

Daniel Ron­deau, İst­anb­ul
Folio Gal­li­mard pour NiL Edi­tions, 2002

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Car­thage d’Han­ni­bal et de Saint-Louis par Daniel Rondeau

Car­thage d’Han­ni­bal et de Saint-Louis par Daniel Rondeau

Daniel Ron­deau, dont je par­le­rai plu­sieurs fois ici puis­qu’il a pro­duit une série de livres sur les grandes cités de la Médi­ter­ra­née (Tan­ger, Alexan­drie, Istan­bul, Malte), s’est per­du sur les rives de l’an­tique cité punique détruite par les Romains. L’his­toire de Car­thage (Qart Hada­sht) est d’une com­plexi­té rare, depuis sa fon­da­tion par la mythique Elis­sa, plus connue sous le nom de Didon, la Phé­ni­cienne jus­qu’à son effa­ce­ment de la carte par les armées du césar Sci­pion Emi­lien le Second Afri­cain. Entre ces deux évé­ne­ments fon­da­teurs, un homme se ren­dit célèbre entre autre pour avoir tra­ver­sé les Alpes avec ses élé­phants afri­cains et avoir eu l’ou­tre­cui­dance de mar­cher sur Rome dans l’es­poir de la prendre ; Han­ni­bal Bar­ca. C’est de cette grande figure dont Ron­deau fait un des points cen­traux de son livre :

Hannibal traverse le Rhône - Henri Motte -1878

Quelques ins­tants plus tard, quand l’his­to­rien me quitte pour rejoindre Tunis, je reste seul devant ce pay­sage, qui baigne dans une brume de bleu et d’or, et j’en pro­fite pour ras­sem­bler mes notes de la jour­née. Mes deux voi­sins conti­nuent à se par­ler, les yeux dans les yeux. Dans leurs phrases revient à plu­sieurs reprises le nom d’Han­ni­bal. Han­ni­bal fut l’homme le plus glo­rieux d’une cité dis­pa­rue. Nous ne connais­sons pas son visage, les his­to­riens l’ont négli­gé (Plu­tarque ne l’a pas consi­dé­ré comme un homme illustre) ou cari­ca­tu­ré (Tite-Live et ses épi­gones se sont foca­li­sés sur sa cruau­té, sur le soi-disant can­ni­ba­lisme des troupes catha­gi­noises, sur la mau­vaise fois punique). Les aven­tu­riers de l’ar­chéo­lo­gie n’ont jamais retrou­vé ses cendres. Au pre­mier siècle de notre ère, Pline l’An­cien évoque sim­ple­ment l’exis­tence d’un tumu­lus cen­sé abri­ter son tom­beau. Il suf­fit pour­tant de le nom­mer pour son ombre se lève.

Autre figure mythique pas­sée sur les terres tuni­siennes de l’his­toire alors que celle-ci était deve­nue terre d’is­lam, Saint Louis, dont la pré­sence à Car­thage est entou­rée d’un voile de mys­tères et de contes dont on ne sait plus où la fic­tion déborde sur la réa­li­té his­to­rique, mais après tout, peu importe, il n’en reste pas moins de belles histoires.

Rue principale de Sidi Bou Said avant la foule !

Pho­to © Romain Cloff

— Ça tombe bien, je suis une des­cen­dante de Sidi Bou Saïd. Tu connais la véri­té sur Saint Louis ? Tu sais ce qu’il s’est réel­le­ment pas­sé ? Ton roi était à Car­thage, à deux kilo­mètres d’i­ci, et Sidi Bou Saïd était dans sa mai­son, là où tu es. Saint Louis vou­lait tous nous tuer, comme musul­mans, et il vou­lait tuer notre mara­bout dans le dos. Sidi Bou Saïd lui a fait prendre conscience de ses péchés et, fina­le­ment, San­lu­wis a rejoint l’is­lam. Si tu veux en savoir plus, reviens demain, ce soir j’ai des invi­tés, il faut que je pré­pare le repas.
— Je vou­drais sim­ple­ment jeter un œil sur le tombeau.
Elle ouvre les portes du sanc­tuaire sans m’au­to­ri­ser à y péné­trer, puis rejoint sa cui­sine en cou­rant. Le len­de­main, je repasse, mais elle s’est absen­tée. Plu­sieurs per­sonnes m’ont signa­lé l’exis­tence d’une fleur de lys sur la porte du tom­beau du saint. D’a­près eux, cet emblème royal incrus­té dans la pierre du sanc­tuaire musul­man prouve que la légende ne ment pas. Je la cherche tout autour de la mos­quée, en vain.

Un livre par­cou­ru de légendes, d’am­biances, bai­gné de lumières médi­ter­ra­néennes dans le bleu clair des pein­tures des villes per­chées et le blanc des murs chau­lés, et tra­ver­sé de ques­tions sans cesse en suspens…

Daniel Ron­deau, Car­thage
Folio Gal­li­mard pour NiL Edi­tions, 2008

Ceci était mon six-cen­tième billet sur ce blog.

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Sabîl — Ahmad Al Kha­tib et Yous­sef Hbeisch

Ahmad Al Khatib et Youssef Hbeisch - SabîlSabîl est un album solaire, une pure mer­veille. Enchan­té par Ahmad Al Kha­tib au oud, d’une per­fec­tion et d’un raf­fi­ne­ment qui font mouche et Yous­sef Hbeisch aux per­cus­sions, qui de ses envo­lées lyriques et de ses doigts trans­fi­gure le son cha­leu­reux du oud avec une sub­ti­li­té de joaillier, l’al­bum ne sait trop où aller, entre Anda­lou­sie et Pales­tine, la route est celle des joyeux sal­tim­banques médi­ter­ra­néens qui se sont per­du en route (Sabîl). Un album envoû­tant, à écou­ter entre deux thés. Ven­dre­di soir, ils se pro­dui­saient tous les deux avec Hubert Dupont à la contre­basse dans l’au­di­to­rium Rafiq Hari­ri de l’Ins­ti­tut du Monde Arabe ; un concert fié­vreux de toute beauté.

[audio:sabil.xol]

Maqam li Gaza

[audio:sabil2.xol]

Ors

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