Jan 29, 2017 | Arts |
Ce n’est pas le tableau le plus connu du Caravage, mais c’est certainement un des plus riches en émotions… D’abord il y a l’histoire, la situation, le moment. Pour cela, il faut relire l’évangile selon Saint Matthieu :
« Alors les soldats du gouverneur emmenèrent Jésus dans le prétoire et rassemblèrent autour de lui toute la garde. Ils lui enlevèrent ses vêtements et le couvrirent d’un manteau rouge. Puis, avec des épines, ils tressèrent une couronne, et la posèrent sur sa tête; ils lui mirent un roseau dans la main droite et, pour se moquer de lui, ils s’agenouillaient en leur disant: “Salut, roi des Juifs!” ». (Mt 27, 27–29)
Le couronnement d’épines fait partie de ce qu’on appelle les mystères du rosaire et en l’occurrence, voici le troisième mystère dans la comptabilité sordide des cinq mystères douloureux. Même dans la douleur, il existe une comptabilité. Ce qui est sous-tendu dans ce moment de l’histoire du Christ, c’est la mise en scène de l’humiliation publique. Le Christ est revêtu d’une robe de pourpre, symbole du pouvoir chez les Romains, couleur des empereurs que eux seuls peuvent porter ; ce n’est pas qu’un simple manteau rouge. On lui tresse ensuite une couronne d’épines qu’on ne fait pas que lui poser sur la tête, mais qu’on lui enfonce à l’aide des mêmes bâtons de roseau que celui qu’on lui place entre les mains ; celui qu’on lui attribue est également symbole de pouvoir, forme simplifiée du spectre des rois. Cette couronne d’épines est faite de la même espèce que celle avec laquelle on attache les fagots de bois, on lui enfonce les épines dans le cuir chevelu afin de le faire saigner abondamment. Cette couronne, il la gardera jusqu’à sa mort sur la croix. C’est en tout cas l’interprétation qu’en fait Caravage.
On sait du peintre que c’était pour le moins un mauvais garçon, colérique, bagarreur, insoumis, cherchant souvent de nouveaux protecteurs qui puissent le financer dans ses travaux et lui permettre de vivre, même si cette vie n’est faite que d’alcool, de fornication et de mauvais rêves. La première version du tableau, conservée au musée du Prato, date de 1603, mais celle-ci est plus belle, plus colorée, plus intense aussi. Cette version dont on parle daterait (les spécialistes ont du mal à se mettre d’accord) d’une période allant de 1602 à 1607, mais plus vraisemblablement de 1607 au regard de ses autres œuvres et de la maturité de sa peinture. On sait également que c’est le marquis banquier et collectionneur Vincenzo Giustiniani qui commande cette œuvre. On peut l’admirer au Kunsthistorisches Museum de Vienne en Autriche, mais comme nous ne sommes pas sur place, voyons ce qu’on peut en faire ici.
Tout d’abord, la composition. Une première ligne horizontale sur le tiers haut du tableau, reposant sur l’épaule du Christ et sa tête penchée, à gauche traversant la tête du garde en armure, à droite sur le torse du bourreau. Ensuite une grande diagonale partant de la limite entre l’ombre et la lumière (souvent chez Caravage, les lignes se créent à partir de cette frontière imaginaire entre ombre et lumière, contraste terrible), qui descend sur la poitrine du Christ, et rejoint sa cuisse gauche. Une autre diagonale qui coupe celle-ci quasiment à angle droit, suivant le roseau du Christ, et croisant la poitrine du premier bourreau. Enfin, deux autres lignes pointées par les roseaux des bourreaux, toutes deux s’écartant de chaque côté de la cuisse gauche du Christ. Voici la composition, quasiment entièrement faite de diagonales, ce qui induit un tableau très dynamique qui tranche avec la posture statique du garde en armure à gauche. C’est une scène d’une rare violence, prise sur l’instant, dans le mouvement des bourreaux qui forcent pour planter la couronne d’épines.
Ensuite, la scène. Le Christ porte sur le visage une expression figée ; la douleur sourde et résignée. Pas de crispation des traits, pas d’horreur, juste la sidération de la douleur. Rarement on a ressenti autant de douleur pesante dans un tableau du Caravage. Les personnages, eux, contrairement au Christ, portent des vêtements anachroniques. Le plus criant, c’est le garde armé. Chapeau mou à plumes d’autruche, armure métallique resplendissante, c’est un costume de garde italien du XVIIè siècle, tout ce qu’il y a de plus éloigné de l’époque de la scène, mais on est habitué à ça dans la peinture de la Renaissance. Les deux bourreaux, eux, sont plus neutres, ils portent des tuniques blanches ouvertes, des culottes nouées grossièrement autour de la ceinture, mais celui de droite porte un large chapeau mou caractéristique des campagnes italiennes. Retour à la case départ, le parti pris est de replacer la scène dans l’immanence du peintre. Les regards ; les trois hommes ont le regard tourné vers le visage du Christ, il fait l’objet de toutes les attentions. On est bien d’accord que le sujet n’est pas en dehors du cadre, c’est la tête du Christ qu’il faut regarder.
Avant de regarder les détails, passons aux trois points. Point de fuite, point de distance, point du vue. Le point de fuite, on ne le voit pas au premier abord, la scène est trop rapprochée, mais si l’on regarde bien, les deux diagonales partant des angles se croisent exactement sur la poitrine du Christ, touché en pleine poitrine, en plein cœur, siège de la douleur la plus sourde. On imagine assez aisément que c’est le point de fuite. Point de distance ; nous sommes placés en vue très rapprochée de la scène, je dirais même plus que nous sommes dans la même pièce, à deux ou trois mètres maximum, engagés dans la scène, placés à même distance que les bourreaux, ce qui nous implique terriblement, nous ne sommes pas en dehors de la scène. Quant au point de vue (le point de vue est l’endroit où le peintre place le spectateur par rapport à la scène), on sait aujourd’hui que le tableau est un dessus de porte, et le point de vue se trouve très exactement au niveau du nombril du Christ. C’est une contre-plongée qui, comme souvent dans ce genre de tableau, nous incite à nous placer en position humble par rapport au Christ, pas comme ses bourreaux qui le surplombent. Non, nous sommes plus bas que lui, lui qui souffre déjà tellement. Regardez bien…
Je ne parlerai pas du traitement pictural, la peinture du Caravage est assez homogène dans ce genre de scène, ni de la lumière qui pour le coup est un spot unique, provenant d’une fenêtre étroite et haute dans le coin supérieur gauche du tableau. En revanche, la somme des détails mérite qu’on s’y arrête quelques instants.
On peut voir le long de l’échine droite du bourreau de gauche une ligne de couleur verdâtre que l’on pourrait croire être une ombre portée, mais la provenance de la lumière nous l’interdit. C’est en fait une retouche de volume. Caravage a fait une première version de ce corps plus épaisse que la version finale.
On l’a vu tout à l’heure, le garde en armure est habillé à la mode italienne de l’époque, mais pourquoi précisément une armure ? C’est elle qui donne le ton, qui donne la lumière du tableau, qui indique la source et l’intensité lumineuse. Le métal est un des meilleurs réflecteurs qui soit pour la lumière, ce n’est pas un hasard.
Le sang, les coulures. En deux temps. Voici une indication un peu anachronique dans l’enchaînement de la scène. La poitrine du Christ est déjà maculée de sang alors que les bourreaux sont en train de lui infliger le supplice. Sur la droite de la scène, on voit l’instantanéité de la scène avec les gouttes de sang en train de tomber de la couronne d’épines, mais on assiste là à deux scènes en une. La première, instantanée, la seconde, qui préfigure en réalité ce qui va se passer après, c’est-à-dire, le sang qui coule sur son corps. Les traces de sang sur son front participent du même mouvement. Sa tête penchée indique que le sang n’a pas pu couler droit comme s’il avait la tête relevée. C’est là le mystère intrinsèque du tableau.
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Apr 11, 2015 | Livres et carnets |
On arrive au cœur de cette grande bibliothèque après avoir franchi les portes de l’église austère de San Lorenzo à Florence, là où est enterré le grand Côme de Médicis. Un fois arrivé dans le cloître de la basilique à la façade inachevée, on accède au lieu par un escalier à trois volées dessiné par un certain Michel-Ange. En fait d’une bibliothèque publique, telle que l’a souhaité celui qui en fut l’inventeur et le principal pourvoyeur, Niccolò Niccoli, ce n’est plus aujourd’hui qu’un musée austère, une immense salle de lecture vide à l’accès payant où sont rangés les 3000 manuscrits qui constituent le fonds d’origine. 7000 autres manuscrits sont conservés dans des collections pas franchement publiques. On y trouve plus de 125 000 livres imprimés, des manuscrits de Virgile datant du Vème siècle, quelques codex célèbres comme le Codex Amiatinus, le Codex de Florence et le Codex Squarcialupi et surtout les Codex 0171 à 0176 qui ne sont ni plus ni moins que des textes du Nouveau Testament écrits en onciales grecques datant du IVème siècle.
Les manuscrits de textes antiques étaient onéreux, mais pour le collectionneur avide, aucun prix ne semblait trop élevé. La bibliothèque de Niccoli était célèbre parmi les humanistes d’Italie et d’ailleurs, et bien que Niccoli fût solitaire, ombrageux et obtus, il ouvrait volontiers ses portes aux érudits qui voulaient consulter ses collections. A sa mort, en 1437, à l’âge de soixante-treize ans, il laissera ainsi huit cents manuscrits, constituant de loin la plus grande et la plus belle collection de Florence.
Prenant modèle sur Salutari, Niccoli avait précisé ce qu’il voulait voir advenir de ces textes. Pétrarque et Boccace espéraient préserver, après leur mort, l’intégralité de la collection de manuscrits qu’ils avaient acquis ; malheureusement, ceux-ci avaient été vendus, dispersés ou simplement négligés. (Nombre de précieux codex que Pétrarque avait mis tant de peine à rassembler et qu’il avait apportés à Venise pour former le cœur de ce qui devait être une nouvelle bibliothèque d’Alexandrie furent entreposés, puis oubliés dans un palais humide où ils tombèrent en poussière.) Niccoli ne voulait pas voir l’œuvre de sa vie subir le même sort. Il rédigea un testament dans lequel il exigea que les manuscrits soient conservés ensemble, interdit leur vente ou leur dispersion, fixa des règles strictes pour leur emprunt et leur retour, nomma un comité de conservateurs et laissa une somme d’argent pour la construction d’une bibliothèque. Celle-ci devait être aménagée dans un monastère, mais sans être, selon la volonté expresse de Niccoli, une bibliothèque monastique fermée au monde et réservée aux moines. Les livres devaient être accessibles non seulement aux religieux, mais « à tous les citoyens cultivés », omnes cives studiosi[note]. Plusieurs siècles après la fermeture et l’abandon de la dernière bibliothèque romaine, Niccoli ressuscitait ainsi le concept de bibliothèque publique.
[Note] En vérité, Niccoli n’avait pas les moyens de ses ambitions : à sa mort, il était couvert de dettes. Mais cette dette fut annulée par son ami, Côme de Médicis, en échange du droit de disposer de la collection. La moitié des manuscrits allèrent à la nouvelle bibliothèque de San Marco, où ils furent conservés dans le merveilleux bâtiment conçu par Michelozzo ; l’autre moitié constitua le principal fonds de la grande bibliothèque Laurentienne de la ville. Même si on lui doit sa création, l’idée d’une bibliothèque publique n’était pas propre à Niccoli. Salutati l’avait aussi appelé de ses vœux.
Stephen Greenblatt, Quattrocento
Flammarion, 2013
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Apr 11, 2015 | Arts, Livres et carnets |
Les petites histoires font parfois les grandes et lorsqu’elles arrivent jusqu’à nos oreilles chastes et crédules, elles prennent parfois la couleur des légendes. Niccolò Niccoli, un érudit florentin qu’on peut dire humaniste, est connu pour avoir fondé une des plus grandes collections de livres sous forme de bibliothèque publique qui a alimenté la très célèbre Bibliothèque Laurentienne de Florence mais également pour être à l’origine de l’écriture cursive réputée sous le nom d’« italique de la Cancellaresca » ou « italique de la Chancellerie ». On trouve dans un livre édité en 1859 à Florence (Vite de uomini illustri del secolo XV, Fiorentino Vespasiano da Bisticci) un épisode qui revêt une coloration toute particulière, illustrant la transmission du patrimoine à travers les âges.
Replaçons tout ceci dans le contexte. Rome, au début de la Renaissance, n’est encore qu’une petite ville provinciale mal famée. Comptant 1 200 000 habitants en 260 après J.-C., on ne trouve plus que 30 000 habitants au VIIIè siècle. Sa grandeur passée n’est plus qu’un songe, qui ne se reflète plus que dans les ruines à demi-enterrées d’une ville fantôme. Les rares habitations sont faites à partir de pierres de remploi, de celles qui jadis faisaient la majesté de ses rues pavées et de ses maisons cossues. Des bustes antiques affleurent sous quelques centimètres de terre, des chapiteaux de colonnes et des rinceaux gisent au milieu des métopes et des tympans brisés ; toute une ville attend qu’on la découvre et les gamins jouent dans un vaste terrain vague, autrefois capitale d’un empire s’étendant de l’Écosse aux cataractes du Nil et des contreforts du Portugal au Golfe Persique…
Ami du grand humaniste Le Pogge qui fut à l’origine de la redécouverte du long poème de Lucrèce, de rerum natura, Niccolò Niccoli est décrit en pleine chasse au trésor bien involontaire :
« Un jour, alors que Niccolò sortait de chez lui, il vit un garçon qui portait autour du cou une calcédoine dans laquelle était gravé un portrait de la main de Polyclète. Une œuvre remarquable. Il s’enquit du nom du père du garçon et, l’ayant appris, envoya quelqu’un lui demander s’il accepterait de lui vendre la pierre : le père y consentit volontiers, comme s’il ne savait pas ce que c’était et n’y était pas attaché. Niccolò lui fit porter cinq florins en échange, et le bonhomme estima qu’il en avait retiré le double de sa valeur. » Dans ce cas, au moins, la dépense se révéla un très bon investissement. « Du temps du pape Eugène vivait à Florence un certain Maestro Luigi le Patriarche, qui s’intéressait beaucoup à ce genre d’objet, et il demanda à Niccolò la permission de voir la calcédoine. Ce dernier la lui fit parvenir, et elle lui plut tant qu’il la garda, et envoya à Niccolò deux cents ducats d’or. Il insista tellement que Niccolò, n’étant pas un homme riche, la lui céda. Après la mort de ce patriarche, la pierre passa au pape Paul, puis à Laurent de Médicis. »
Stephen Greenblatt, Quattrocento
Flammarion, 2013
Note pp.345–346
Et voilà comme une petite pièce réussit à traverser les âges, grâce au bon goût d’un petit garçon et de son père, qui, un peu ignorant, ne se doutait pas qu’il était assis sur un bon tas d’or…
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Mar 20, 2015 | Arts, Livres et carnets |
C’est un autre univers, en marge de l’écriture de l’auteur, une case à part, une malle un peu fourre-tout parfois décevante lorsque l’on y trouve que des références techniques qui ne font que nous barber ou nous endormir au mieux, qui ne sont bonnes que pour celui qui, plus avant, souhaite faire des recherches approfondies et qui sont autant d’obstacles à la lecture « plaisir ». Pourtant, parfois, je me lance dans la lecture des notes avant de commencer le livre et je dois avouer que c’est un monde d’une richesse incroyable. Rien n’y est ordonné et on navigue souvent entre des notions qu’on ne maîtrise absolument pas tant qu’on n’a pas lu le texte à proprement parler. Ce que j’aime surtout dans ces notes, c’est l’absence totale de formalisme, la possibilité que se laisse l’auteur de ne plus rien construire et de livrer un texte brut, rempli d’abréviations et de sigles. En revanche, force est de constater que si les notes constituent un univers condensé, le texte, lui, est souvent beaucoup plus délayé.
Edgar Allan Poe écrivait dans les marges de ses livres, recueillant ainsi la substance de ses lectures ; ces Marginalia ont été publiées il y a quelques années aux éditions Allia. Des fragments qui sont comme la pensée brute de l’auteur, sa face cachée et plus sombre encore. Enrique Vila-Matas quant à lui, a écrit un livre il y a quelques années, Bartleby & cie, un livre uniquement composé de notes de bas de pages, une encyclopédie dont il ne resterait que la moelle, dépouillée de son texte, de l’inutile et de l’incertain, pari pascalien et littéraire. Livre des agraphiques et des écrivains du non, cette petite pépite fait office d’objet littéraire non identifié.
Quant à moi, je continue à lire certains livres par la fin, en épluchant les notes avant de lire le texte, et je m’en satisfais très bien.
Dans ce livre que je viens de commencer, Quattrocento de Stephen Greenblatt, dans lequel il est question d’un certain Poggio Bracciolini, un humaniste florentin dont le nom francisé est Le Pogge surtout connu pour avoir déterré des étagères poussiéreuses d’un monastère perdu un des plus beaux textes de l’Antiquité romaine : De rerum natura, le très beau poème de Lucrèce. Voici ce qu’on trouve dès la quatrième note du premier chapitre :
De la nature, V, v. 737–740, op. cit., p. 355. Le « messager ailé » de Vénus est Cupidon, que Botticelli représente les yeux bandés, et pointant sa flèche ailée ; Flore, la déesse romaine des fleurs, sème des pétales rassemblés dans les plis de sa robe exquise ; et Zéphyr, le dieu du vent d’ouest fertile, étreint la nymphe Chloris. Concernant l’influence de Lucrèce sur Botticelli, par l’intermédiaire de l’humaniste Poliziano, voir Charles Dempsey… etc.
Alors on peut toujours faire l’économie des notes de bas de page ou des notes de fin d’ouvrage ; le texte n’en demeure pas moins compréhensible. Simplement, on évite le détail, la spécification. Pire, on pourrait passer à côté d’une information importante.
Je me dis qu’en lisant ces notes j’ai appris qu’un homme du XVè siècle, secrétaire d’un antipape, un réprouvé à qui les Médicis ont fait l’honneur de commander un superbe mausolée qu’on peut voir aujourd’hui dans le baptistère Saint-Jean de Florence, l’antipape Jean XXIII (je ne savais même pas ce qu’était un antipape…), j’ai appris donc que cet homme battait la campagne, bravant le mauvais temps et les détrousseurs de grands chemin pour retrouver les objets de l’Antiquité qui pourrissaient sur les étagères des monastères les plus reculés et que sans la découverte du poème de Lucrèce, Botticelli n’aurait peut-être jamais peint Le printemps, un des plus beaux tableaux et des plus connus de la Renaissance.
Finalement, la curiosité ne tient pas à grand-chose…
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Nov 20, 2014 | Arts |
Il est bien dans le caractère de Léonard de Vinci d’avoir examiné avec minutie l’action du cœur et des artères sans être jamais venu à formuler une théorie de la circulation du sang. Ce manuscrit est écrit avec une plume épointée sur un papier gris-bleu à gros grain, et les dessins qui l’illustrent ont un laisser-aller voulu, comme si Léonard eût renié la beauté de ses premiers dessins. Ce sera le style de presque tous ses derniers dessins. Cela n’est pas le fait d’une décadence physique, puisque Léonard nous donne des exemples d’écriture soignée à des dates ultérieures, mais exprimerait plutôt le pessimisme et le désenchantement de la vieillesse, qui dédaigne toute beauté purement matérielle, fût-elle la dextérité d’un trait ou le tour gracieux d’un vers.
Kenneth Clark, Léonard de Vinci, 1939
Leonardo da Vinci — dessins anatomiques du cœur — Windsor Castle, Royal Library — RL. 19073
Leonardo da Vinci — dessins anatomiques du cou — Windsor Castle, Royal Library — RL. 19075
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