La Ciste de Pré­neste (Pales­tri­na — au juge­ment de Pâris) — Etrusques au Musée Maillol

Objet phare des cultes à mys­tères, cette ciste des­ti­née à rece­voir des objets que les pro­fanes n’a­vaient pas à voir dans la civi­li­sa­tion grecque, pro­vient de la civi­li­sa­tion étrusque et avait cer­tai­ne­ment un usage plus fémi­nin. On estime que son usage était de conser­ver les ins­tru­ments de toi­lette des femmes de haut-rang. Décou­verte à Pré­neste (Pales­tri­na), c’est un objet tout à fait unique par sa taille (575 mm dans sa hau­teur totale) ain­si que par sa fac­ture. Conser­vée actuel­le­ment à Rome, au Museo Nazio­nale Etrus­co di Vil­la Giu­lia, ce bronze lami­né datant de la fin du IVè siècle av. J.-C. fait par­tie de l’ex­po­si­tion actuelle que l’on peut voir au Musée Maillol et ce, jus­qu’au 9 février 2014.
Posée sur trois pieds repo­sant eux-mêmes sur des gre­nouilles, c’est un objet assez mas­sif, dont les pieds sont sou­te­nues par trois génies fémi­nins ailés. La poi­gnée, impo­sante, repré­sente une ama­zone nue, décé­dée, por­tée par deux ama­zones en armes. Les trois scènes repré­sen­tées sur le corps de la ciste se décom­posent ain­si : l’en­lè­ve­ment de Cry­sippe, la consul­ta­tion de l’o­racle d’Apollon et le juge­ment de Pâris.

Ciste de Préneste (Palestrina - au jugement de Pâris) - fin IVè siècle av.J.-C. - Bronze laminé - Rome, Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia - Etrusques au Musée Maillol

De taille moins impo­sante que la Ciste Fico­ro­ni et moins connue, son ori­gi­na­li­té réside dans le des­sin du corps de cet objet tar­dif. En regar­dant de près, on voit que les scènes cen­trales ont été gra­vées dans le métal et la scène de l’en­lè­ve­ment qu’on peut voir en détail ci-des­sous est des­si­née de trois-quarts face, enrou­lée autour du corps de la ciste, avec un réa­lisme assez incroyable compte-tenu de l’é­poque où elle a été réa­li­sée, puisque la plu­part des scènes des­si­nées à l’é­poque l’é­taient géné­ra­le­ment de pro­fil. Une œuvre d’art hau­te­ment sym­bo­lique de l’é­tat d’a­van­ce­ment de la civi­li­sa­tion étrusque, que ce soit en matière de réa­li­sa­tion, ou en matière d’é­la­bo­ra­tion du dessin.

Ciste de Préneste - détail - (Palestrina - au jugement de Pâris) - fin IVè siècle av.J.-C. - Bronze laminé - Rome, Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia - Etrusques au Musée Maillol

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L’art cré­tois comme natu­ra­lisme triomphant

L’art cré­tois comme natu­ra­lisme triomphant

Ver­tige de la liste minoen par Fer­nand Brau­del.

A la grande époque de l’art cré­tois — celle des seconds palais —, avant la période mycé­nienne qui fige­ra toute cette liber­té, le natu­ra­lisme est triom­phant : bêtes et plantes sont par­tout sur les murs ou au flanc des vases de céra­mique ; un brin d’herbe, une touffe de cro­cus ou d’i­ris, un jet de lys blancs sur l’ocre d’un vase ou sur le rouge pom­péien d’un stuc mural, des roseaux qui se marient et un motif conti­nu, presque abs­trait, un rameau d’o­li­vier fleu­ri, les bras tor­dus d’un poulpe, des dau­phins, une étoile de mer, un pois­son bleu ailé, une ronde d’é­normes libel­lules, autant de thèmes en soi, mais jamais trai­tés avec la minu­tie bota­nique des herbes ou des vio­lettes de Dürer. Ils sont le décor irréel d’un monde irréel ou un singe bleu cueille des cro­cus, un oiseau bleu se perche sur des rochers rouges, jaunes, bleus, jas­pés de blanc, où fleu­rissent des églan­tiers ; un chat sau­vage guette à tra­vers des branches de lierre aériennes un oiseau inno­cent qui lui tourne le dos, un che­val traîne le char de deux jeunes déesses sou­riantes… La céra­mique se prête comme la fresque à cette fan­tai­sie inven­tive. Il est curieux de voir le même thème végé­tal ou marin trai­té de mille façons dif­fé­rentes, sur tant de vases mul­ti­pliés par le tour du potier et expor­tés par cen­taines. Comme si le peintre, chaque fois, exi­geait le plai­sir de la création.

Fer­nand Brau­del : Les Mémoires de la Médi­ter­ra­née (pré­his­toire et antiquité)
Livre de poche, col­lec­tion Réfé­rences
Édi­tions de Fal­lois, 1998

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Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 12 août) : Retour à Anta­lya, en pas­sant par le Mont Chi­mère (Yanar­taş) et l’arrivée à Nevşehir

Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 12 août) : Retour à Anta­lya, en pas­sant par le Mont Chi­mère (Yanar­taş) et l’arrivée à Nevşehir

Épi­sode pré­cé­dent : Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 11 août) : Pata­ra et Xan­thos, les grandes cités lyciennes

Bul­le­tin météo de la jour­née (dimanche) :

  • 10h00 : 41.1°C / humi­di­té : 61% / vent 9 km/h
  • 14h00 : 42.2°C / humi­di­té : 61% / vent 17 km/h
  • 22h00 : 38.3°C / humi­di­té : 72% / vent 9 km/h

C’est le jour du départ pour Anta­lya. der­nière expé­di­tion pour retour­ner sur la route, direc­tion la Cap­pa­doce. Cette fois-ci, je ne prends pas l’a­vion, mais le car et j’a­voue que je suis un peu angois­sé. De toute façon, dès lors que je ne connais pas, je suis angois­sé, il y a tou­jours quelque chose qui m’in­quiète et qui me tord le ventre au point que je com­prends mieux pour­quoi je me sens par­fois aus­si épui­sé lorsque je voyage. Bien loin de ne pas pro­fi­ter, je suis tou­jours à l’af­fût, de peur de man­quer quelque chose, de me dire que je ne pour­rai jamais vivre le choses qu’une seule fois et que si je rate, c’est fichu. Les sens en éveil, je m’é­puise vite.

Je fais ma valise et je vais prendre mon der­nier petit déjeu­ner en com­pa­gnie des Alle­mands. Avec du recul, je n’é­tais pas très heu­reux d’être dans cet hôtel, même si je n’y ai pas­sé que très peu de temps au final et je me rends compte que tout ceci n’a pas d’im­por­tance, mal­gré le fait que la nui­tée n’é­tait pas don­née. Je pars sans regret et je file vers Kal­kan et Kaş, direc­tion l’est pour retrou­ver Anta­lya. Je dois rendre la voi­ture au loueur et retour­ner ensuite à la gare rou­tière (Oto­gar) et pour cela, j’ai pas mal de temps, rien ne presse, le car part à 21:00 et je dois rendre la voi­ture à 19:30. Une heure et demie pour rejoindre la gare rou­tière, c’est plu­tôt confortable.

Turquie - jour 17 - Route de Patara à Antalya et Mont Chimère - 01

Je me perds avec la voi­ture dans Kal­kan, dans les petites rues pen­tues et pavées qui des­cendent vers la mer sans arri­ver à la moindre plage ; il n’y a que des impasses et je me finis par me retrou­ver dans une rue que je n’ar­rive pas à remon­ter tel­le­ment elle monte. La voi­ture patine et ne veut plus avan­cer… Je sors et je regarde les pneus ; ils sont lisses ! Je ful­mine contre le loueur, son tacot et ses pneus mer­diques. J’ouvre le coffre, sors ma valise et redes­cends la rue en marche arrière. Ensuite je prends mon élan en fai­sant chauf­fer le moteur et je réus­sis à remon­ter la por­tion la plus dan­ge­reuse. Le moment le plus sym­pa, c’est quand je dois remon­ter la valise sur les pavés, sur une pente que même à pied j’ai du mal à gra­vir et en plein soleil… Une bonne suée dès le matin et je repars de Kal­kan un peu en colère. Je m’ar­rête à Kaş pour le déjeu­ner, à l’heure du muez­zin, dont le chant s’in­ten­si­fie ou s’é­touffe avec les rafales de vent. La mer (Akde­niz) est déchaî­née, dans un mau­vais jour ; le vent n’est pas en reste. Je trouve quand-même Kaş plus vivante que Pata­ra, qui semble comme en léthar­gie, sur le point de s’é­teindre. Un hôtel sur les hau­teurs est com­plè­te­ment aban­don­né, c’est dire à quel point les beaux jours sont der­rière. (more…)

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Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie — 11 août) : Pata­ra et Xan­thos, les grandes cités lyciennes

Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie — 11 août) : Pata­ra et Xan­thos, les grandes cités lyciennes

Épi­sode pré­cé­dent : Dans la vapeur blanche des jours sans vent (Car­net de voyage en Tur­quie – 10 août) : Les göz­leme d’Esra, Fethiye, le tom­beau d’Amyntas

Bul­le­tin météo de la jour­née (same­di) :

  • 10h00 : 37.8°C / humi­di­té : 29% / vent 7 km/h
  • 14h00 : 43.1°C / humi­di­té : 55% / vent 17 km/h
  • 22h00 : 42.2°C / humi­di­té : 81% / vent 6 km/h

Encore une jour­née qui s’an­nonce calme sous un soleil écra­sant. Les tem­pé­ra­tures sont sim­ple­ment affo­lantes et dépassent lar­ge­ment les 40°C. La rai­son vou­drait que je reste enfer­mé dans ma chambre semi-cli­ma­ti­sée ou à l’ombre d’un para­sol au bord de la pis­cine, mais rien n’y fait, je n’ar­rive pas à res­ter en place, même si je lézarde un peu en som­no­lant après un petit déjeu­ner copieux, à base de fro­mage blanc et de tisane de sauge.
Je reste en admi­ra­tion devant ce petit appen­dice qui dépasse de la cuvette des toi­lettes, où que je sois pas­sé depuis mon arri­vée ici, sur la par­tie anté­rieure et qui pro­pulse un jet d’eau puis­sant des­ti­né à se net­toyer. Évi­dem­ment, le sujet est un peu déli­cat à trai­ter, mais je suis admi­ra­tif de ce pro­cé­dé utile et effi­cace qui ne me laisse plus aucun doute sur l’hy­giène de ce peuple qui a l’ha­bi­tude des bains publics et des ablu­tions liées à la prière. Je rêve qu’un jour en France, dans ce pays qu’on dit asep­ti­sé et hygié­niste, on puisse prendre autant soin de son hygiène cor­po­relle, ce qui est loin d’être le cas.

Patara ÖrenyeriLe midi, je retourne déjeu­ner chez Ezra avant de refaire un tour par l’hô­tel pour lire un peu Amin Maa­louf au bord de la pis­cine et piquer une tête dès que la tem­pé­ra­ture devient intolérable.
Cet après-midi, j’ai déci­dé de me rendre à Pata­ra. Après tout, c’est le site le plus proche d’i­ci et je ne suis même pas allé le voir. En fait, quand on suit la direc­tion du site (les sites archéo­lo­giques sont signa­lés par des pan­neaux écrits en blanc sur fond mar­ron qui font pen­ser à ceux qu’on trouve au bord des auto­routes fran­çaises) qui se trouve au bout de la route qui tra­verse le vil­lage, on arrive à ce qui res­semble à un poste fron­tière. Je crois que c’est la pre­mière fois que je vois un site aus­si bien gar­dé. Il se trouve que c’est éga­le­ment l’en­trée d’un site très connu car il passe pour être la plus belle plage de la côte turque. J’a­voue sans honte que je n’y suis pas allé de tout mon séjour, trou­vant cer­tai­ne­ment qu’il y avait bien d’autres choses à faire que d’al­ler se bai­gner dans la Médi­ter­ra­née. Cela dit, avec du recul, je regrette un peu, mais je m’en remet­trai. Après la bar­rière, on arrive donc sur le site qui s’é­tend tout au long de la route. Dès lors que je com­mence à vou­loir prendre des pho­tos, je me rends compte que quelque chose ne va pas, mon appa­reil reste obs­ti­né­ment éteint. Je com­mence à angois­ser en me disant que si mon appa­reil me lâche main­te­nant, je ne vais plus pou­voir gar­der d’i­mages de tout cela ; c’est sim­ple­ment incon­ce­vable pour moi. En ten­tant d’é­ta­blir un diag­nos­tic, je me rends compte que la bat­te­rie est absente de son com­par­ti­ment et en une frac­tion de seconde, je la revois dans son char­geur, bien au frais sur la table de la chambre d’hô­tel. Je n’ai plus qu’à prendre des pho­tos avec mon téléphone.

Turquie - jour 16 - Cités lyciennes - 006 - Patara et Xanthos

Turquie - jour 16 - Cités lyciennes - 012 - Patara et Xanthos

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Le pha­raon cannibale

Lorsque le pha­raon lui-même est plus grand que le plus grand des dieux, il les mange…

Le pha­raon devient dieu lui-même par le cou­ron­ne­ment, il s’ap­pro­prie la force des cou­ronnes au sens le plus réa­liste, en les man­geant. C’est de la même façon qu’il s’ap­pro­prie la sub­stance divine. Dans les Textes des Pyra­mides se trouve «le fameux hymne au pha­raon can­ni­bale qui se nour­rit des dieux, mange les grands au déjeu­ner, les moyens au dîner et les petits au sou­per, qui leur brise les ver­tèbres et leur arrache le cœur, qui dévore cru ceux qu’il ren­contre sur son che­min.» C’est lais­ser entendre que le pha­raon est le plus grand de tous les dieux, au moins leur égal, le maître des hommes et des choses, le maître des eaux du Nil, de la terre et même de la récolte en train de croître. «J’é­tais, fera-t-on dire plus tard à un pha­raon défunt, quel­qu’un qui fai­sait pous­ser l’orge.»

Fer­nand Brau­del, Les mémoires de la Méditerranée
Livre de Poche, Col­lec­tion Références
Édi­tions de Fal­lois 1998

Détail du Papyrus de Greenfield ou Livre des Morts de Nésitanebtashérou du British Museum

Détail du Papy­rus de Green­field ou Livre des Morts de Nésitanebtashérou
Bri­tish Museum, Londres

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