Par dessus l’épaule, assis dans un fauteuil, je sens une présence, plus que ça, une odeur qui me rappelle des souvenirs et tout à coup, le visage d’une personne apparaît dans un long cheminement de pensée. Je suis terrifié à l’idée que l’on puisse être ainsi saisi par ce que j’appelle un fantôme et qui prend cette apparence, parce que ça n’a pas d’autre nom. D’autres pourraient appeler cela un démon ou un fantasme, pour moi c’est un fantôme, ce qui ajoute une dimension mystérieuse et folklorique de château écossais…
Rick Bass, perdu dans une petite ville du Montana, tout près de la frontière avec le Canada, raconte cette histoire de fantôme pour le moins étonnante tandis qu’il passe l’hiver dans un petit chalet sans commodités :
[…] Presque toutes les nuits j’ai fait le même cauchemar ; quelqu’un gravissait l’escalier très lentement, quelqu’un qui était en colère — et moi, comme cela arrive dans ces rêves affreux, j’étais incapable de bouger, incapable d’émettre le moindre son, la moindre protestation. La personne, la force en question, était un vieillard qui venait s’asseoir au bord de mon lit. Il y a eu un nuit particulièrement mauvaise — et ça, je l’ai senti plus sûrement que j’aie jamais senti quoi que ce soit —, une nuit où la main de ce vieillard assis sur le lit m’a empoigné la cheville, et même s’il ne l’a pas tordue, il ne voulait pas non plus la lâcher. […] En plus de quoi, il y avait une autre chose, autre chose de pire encore que la puissante étreinte de cette main ; j’ai senti dans la pièce un courant glacé de pure méchanceté, à vous faire dresser les cheveux sur la tête et coaguler le sang — un courant dont l’électricité est restée suspendue dans les airs comme un écho sonore, mais qui en même temps grandissait, augmentait, comme un chien qui respire très fort, un courant qui empirait, qui devenait de plus en plus menaçant. […]
Je n’ai jamais vu son visage et je ne crois pas que je le verrai jamais. Je pense que nous avons fait notre paix. Je pense aussi que le fantôme, la force, l’énergie, les anciens restes d’émotion que le vieux Fix éprouvait pour notre vallée — tout cela est apaisé. […] Il y a eu des soirs, cependant, où je suis allé me promener dans les bois qui s’élèvent derrière la maison, sur un vieux sentier de bûcherons couvert d’un dais de grands cèdres et de mélèzes à aiguilles dentelées — où j’ai poussé plus haut, au delà de l’étang, trop loin à l’intérieur des bois — et où j’ai senti quelque chose, quelqu’un derrière moi. Je me retournais pour scruter la piste que je venais de suivre — le vieux sentier des bûcherons veiné de bleu par des traînées de clair de lune brillant entre les ombres dures et noires — et il était évident qu’il n’y avait personne. Et pourtant, j’entendais quelqu’un, je le sentais, je le devinais, debout en plein milieu de la route, qui m’observait, les yeux braqués droit sur moi, comme un animal — les mains sur les hanches peut-être, et une étrange impression de malveillance dans l’air. […]
Nous sommes ici, nous sommes vivants. Fix ne l’est plus. Évidemment qu’il est en colère.
Rick Bass, Winter (Notes from Montana) 1991
Hier encore, on me demande ce que j’aime et ce que je n’aime pas. J’aime, comme Dominique Pinon, ouvrir un livre plusieurs mois après les vacances et retrouver du sable entre les pages…
Je garde en moi le désir de me perdre dans le désert, dans une tempête de sable avec à la main le texte original de The sheltering sky dont les pages seraient pleines de grains d’un sable fin. Dans l’autre main, une boussole qui n’aura servi à rien puisque déjà je serais perdu.
Au beau milieu de rien, une maison simple sans toit, un puits de lumière venant du zénith, et au centre de la cour, un homme et une théière, un vase et quelques pots, et la simplicité d’un sol de terre battue.
et tu n’aimes pas les petits pois 🙂
Ce n’est pas que j’aime pas, c’est que je HAIS les petits pois 😉