Can­tates pro­fanes de Bach (BWV 202 & BWV 204)

Jean-Fran­cois de Troy
La décla­ra­tion d’a­mour (1724)

Tan­dis que Johann Sebas­tian Bach écri­vait et com­po­sait ses célèbres can­tates pen­dant cinq années com­plètes de litur­gie, il com­po­sa éga­le­ment des can­tates “pro­fanes”, qui n’a­vaient de pro­fanes que le nom. For­te­ment ins­pi­rée par le luthé­ra­nisme, elles sont remar­quables par leur extrême varié­té et leur finesse (comme enten­du notam­ment dans la can­tate dite « de la chasse »). Voi­ci deux autres extraits de can­tates profanes.

[audio:BWV202.xol]

BWV202Wei­chet nur, betrübte Schat­ten (can­tate dite « Du mariage », ca. 1718–1723) . Pièce écrite pour haut­bois, deux vio­lons, alto, basse conti­nue et une sopra­no soliste.
1er mou­ve­ment (aria). Wei­chet nur, betrubte Schat­ten.
Gie­bel, Concer­to Amster­dam, Jaap Schröder

[audio:BWV204.xol]

BWV204Ich bin in mir ver­gnügt (ca. 1726–1727). La pièce est orches­trée pour flûte tra­ver­sière, deux haut­bois, deux vio­lons, alto et basse conti­nue et une sopra­no soliste. Texte de Chris­tian Frie­drich Hunold.
6ème mou­ve­ment (aria). Meine Seele sei ver­gnugt.
The Amster­dam Baroque Orches­tra and Choir, Ton Koopman

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Nature morte à l’ai­guière d’argent, Willem Kalf

En guise de point de départ à une série de billet sur les natures mortes, voi­ci une de celles qui m’ont par­ti­cu­liè­re­ment tou­ché, réa­li­sée par le peintre hol­lan­dais Willem Kalf aux alen­tours de 1655–1657. La nature morte à l’ai­guière d’argent, expo­sée au Rijks­mu­seum d’Am­ster­dam est une huile de taille moyenne (73,8 x 65,2 cm) aux tons sombres, à la com­po­si­tion ser­rée, stricte. La nature morte est incluse dans une niche de pierre dont on ne voit pas l’ar­ron­di, mais dont on dis­tingue le rebord dépas­sant du mur.

La toile se com­pose d’une coupe en por­ce­laine blanche et bleue de fac­ture chi­noise conte­nant des agrumes ; oranges, cédrats et citron éplu­ché sym­bo­li­sant le temps qui passe. Ce citron éplu­ché est un lieu de tran­si­tion entre l’ap­pa­rente immua­bi­li­té des élé­ments en pré­sence et la nature en voie de cor­rup­tion. Le trai­te­ment pic­tu­ral de la peau des agrumes cap­tant la lumière est abso­lu­ment excep­tion­nel, chaque touche colo­rée accro­chant la lumière par la peau gra­nu­leuse d’une manière parfaite.

On peut même voir dans le citron éplu­ché le jus per­ler sous la peau blanche (méso­carpe).


Sur le côté droit de la coupe se trouve une petite boîte à pilule ouverte à cou­vercle vitré qui me pose ques­tion. J’ai déjà trou­vé ce genre de boîte sur d’autres natures mortes de Kalf, sans com­prendre réel­le­ment la rai­son de cette pré­sence. D’une part, je ne sais pas si c’est réel­le­ment une boîte à pilule, d’autre part, le fait qu’elle soit ouverte a néces­sai­re­ment une explication.
L’ai­guière en argent est d’une fac­ture excep­tion­nelle et révèle un objet d’art par­ti­cu­liè­re­ment riche, typique des œuvres d’orfè­vre­rie à motif auri­cu­laire exé­cu­tées aux XVIème et XVIIème siècle.

L’ob­jet qui attire l’œil dans cette œuvre c’est cette coupe de verre qui sur­plombe la com­po­si­tion, une coupe, ou plu­tôt un verre d’une forme toute par­ti­cu­lière qu’on ne trouve qu’en Hol­lande au XVIIème siècle et qu’on appelle un Roe­mer ou Römer. C’est un verre à vin sur lequel le type de vin qu’il sert à dégus­ter est gra­vé. Son nom vient de Rome, dont on dit que ces verres étaient ori­gi­naires et il est géné­ra­le­ment fait de deux cou­leurs, le blanc et le vert. Le vert est obte­nu à par­tir de potasse de bois, rai­son pour laquelle on appelle cette cou­leur Wald­glas. Ce verre repo­sant sur une tige creuse était par­fois rem­plie d’eau et l’on dépo­sait dans la vasque elle-même une de ces agrumes éplu­chés. L’al­lé­go­rie prend alors tout son sens : l’a­grume éplu­ché sym­bo­li­sant le temps qui passe plon­gé dans un verre par­ti­cu­liè­re­ment fin sym­bo­li­sant la fra­gi­li­té de cette exis­tence… On retrou­ve­ra ces verres en par­ti­cu­lier chez le peintre Pie­ter Claesz, conte­nant par­fois une orange éplu­chée comme dans cette très belle œuvre de Cor­ne­lis de Heem. Il est à noter que dans la sym­bo­lique de cette ico­no­gra­phie par­ti­cu­lière, un verre à moi­tié rem­pli sym­bo­lise éga­le­ment, comme l’a­grume éplu­ché, l’i­nexo­ra­bi­li­té du temps qui passe.

Roe­mer gra­vé (pho­to © Ancient­glass)

Toutes les natures mortes ont un mes­sage en par­ti­cu­lier à faire pas­ser, géné­ra­le­ment pour dire com­bien la vie est futile et ne tient pas à grand chose… D’où le nom de vani­té que dési­gne­ra cer­taines natures mortes, notam­ment en Hol­lande à l’é­poque baroque. A nous de déco­der le mes­sage, même s’il est sou­vent répé­té de manière méca­nique par les peintres hol­lan­dais du XVIIème siècle.

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Motet­to RV626 — In furore ius­tis­si­mae — Anto­nio Vivaldi

Voi­ci un motet plein d’ar­deur et de viva­ci­té, comme dit dans le titre, une pièce d’une exces­sive inten­si­té dont je ne livre ici que la pre­mière par­tie. Les trois mou­ve­ments sui­vants sont beau­coup plus calmes et d’une rare beau­té. On entend par­fai­te­ment l’exal­ta­tion reli­gieuse dont les pièces sui­vantes signent le calme et le retour à la fer­veur. Tout en légè­re­té, tout en finesse, du Vival­di au som­met de son art.
Un album savant et plein de fureur de la col­lec­tion teso­ri del pie­monte, vol. 31, ‘In furore’, ‘Lau­date pue­ri’ e concer­ti sacri. San­drine Piau, sopra­no, Otta­vio Dan­tone, diret­tore.

[audio:motetto.xol]

I.Aria — In furore ius­tis­si­mae — Allegro

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La rose et la tulipe, car­net de voyage à Istan­bul 19 : Visages des rues autre­ment qu’à pied…

La rose et la tulipe, car­net de voyage à Istan­bul 19 : Visages des rues autre­ment qu’à pied…

Épi­sode pré­cé­dent : La rose et la tulipe, car­net de voyage à Istan­bul 18 : Visages des rues banales d’Istanbul

Istan­bul est une grande ville. Même si l’on se contente de ne visi­ter que la vieille ville, il faut bien à un moment don­né, his­toire de ne pas tou­jours tour­ner autour des mêmes lieux, prendre les trans­ports en com­mun, ou même le taxi. Je n’ai pas essayé le métro parce que je n’a­vais besoin de le prendre, mais j’ai pris le tram­way plu­sieurs fois, une ligne qui trans­perce la vieille ville et ébranle les pavés de son trem­ble­ment mala­dif, à Eminönü, qui passe devant la gare de Sir­ke­ci, remonte une rue très com­mer­çante jus­qu’à Gül­hane, le jar­din de Top­ka­pi et pour­suit devant Sul­ta­nah­met, Çem­ber­li­taş, passe devant l’U­ni­ver­si­té, Lale­li, puis s’engouffre dans les pro­fon­deurs d’une ville incon­nue. De l’autre côté de la Mos­quée Nou­velle, le tram­way fait trem­bler le pont de Gala­ta, passe à Karaköy puis remonte jus­qu’à Kaba­taş au bord du Bos­phore en s’é­tant frayé un che­min entre quelques mos­quées d’un inté­rêt assez vague. Le tram­way est moderne, cli­ma­ti­sé et confor­table. Par tous, il est cou­ru et fonc­tionne jus­qu’aux envi­rons d’une heure du matin.

Istanbul - avril 2012 - jour 3 - 105 - Sultan Ahmet Parkı (more…)

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