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La nati­vi­té et l’an­nonce aux ber­gers de Gio­van­ni Pisano

Sur la célèbre chaire du non moins célèbre bap­tis­tère de Pise (Bat­tis­te­ro di San Gio­van­ni) se trouve un pan­neau en par­ti­cu­lier dont l’exis­tence est un véri­table palier dans l’his­toire de la sculp­ture et de l’art en géné­ral. A trois bons mètres du sol sur cet édi­fice hexa­go­nal posé sur sept colonnes cha­cune ter­mi­née par une des ver­tus théo­lo­gales (sauf la colonne cen­trale) se trouve une scène conden­sée où l’on peut voir regrou­pées sur le même pan­neau la nati­vi­té du Christ à Beth­léem et l’an­nonce faite aux ber­gers. La nati­vi­té est concen­trée sur le bas du pan­neau, où deux femmes sont en train de laver l’en­fant tan­dis que Joseph, l’homme sans des­cen­dance, regarde atten­ti­ve­ment l’en­fant avec dans les yeux la ten­dresse d’un père aimant. Remar­quez le mou­ve­ment dyna­mique des deux femmes entou­rant la vasque, elles sont comme figée dans un mou­ve­ment très réa­liste. Sur le haut du tableau, on voit la cohorte des anges allant de gauche à droite pour annon­cer aux ber­gers endor­mis la nou­velle de la nais­sance. Selon la légende, le Sau­veur de l’hu­ma­ni­té est né dans une grotte, ce qui est bien repré­sen­té par la forme convexe au-des­sus de Marie. Pen­dant ce temps, les ber­gers arrivent là où se trouvent l’en­fant avec sa mère, soit… dans une étable, rai­son pour laquelle on voit un âne et un bœuf émer­ger du fond de la scène. Marie, per­son­nage cen­tral est repré­sen­tée dans une posi­tion iden­tique à celle d’une déesse antique ; l’ins­pi­ra­tion en est clai­re­ment grecque ou romaine. Elle est d’ailleurs vêtue dans un robe à revers et d’un fou­lard bor­dé, des attri­buts qui ne sont pas les siens d’or­di­naire. La com­po­si­tion est d’une intel­li­gence exem­plaire, pre­nant une forme d’arbre dont le tronc pren­drait son essor entre le dos de la ser­vante et les mou­tons qui pour le coup sont dos à dos et dont la forme entière est sou­te­nue par l’arche de la grotte. Le dra­pé de Marie est d’une finesse et d’une déli­ca­tesse qui portent l’en­semble avec grâce et en font une œuvre magnifique.
La grande ori­gi­na­li­té de ce pan­neau, c’est qu’il est d’une nou­veau­té totale pour l’é­poque où il a été exé­cu­té, car il a été réa­li­sé entre 1302 et 1311, époque à laquelle le seule modèle uti­li­sé est le modèle byzan­tin. Ici, clai­re­ment, l’ins­pi­ra­tion n’est plus byzan­tine, mais fran­çaise, on est ici en pré­sence de l’art sta­tuaire et sculp­tu­ral des cathé­drales fran­çaises et de celui qu’on trouve éga­le­ment sur les parois des sar­co­phages romains. Voi­ci cer­tai­ne­ment le pre­mier ouvrage stric­te­ment renais­sant en matière de sculpture.

Note de bas de page : pour contre­car­rer toutes les bêtises que j’ai pu lire sur inter­net, ce pan­neau n’a pas été sculp­té par Nico­la Pisa­no, mais par Gio­van­ni, son fils. La père, lui, a sculp­té les autres panneaux.

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Por­trait de Bal­das­sare Cas­ti­glione par Raphaël

Por­trait de Bal­das­sare Cas­ti­glione par Raphaël

Le por­trait de Bal­das­sare Cas­ti­glione peint par Raphaël est consi­dé­ré, à juste titre, comme un des plus beaux tableaux de la Renais­sance. Pour­quoi ? Plu­sieurs rai­sons à cela que nous allons étu­dier : d’a­bord parce que c’est le tableau d’une époque, mais parce que c’est aus­si un tableau qui raconte une très belle his­toire d’a­mi­tié, entre autres choses… Sans ren­trer dans le détail et au pre­mier coup d’œil, il est évident qu’on est en pré­sence d’un tableau tout à fait excep­tion­nel, sim­ple­ment parce qu’il fait appel à notre sens de l’es­thé­tique. (more…)

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Auto­por­trait avec un ami, par Raphaël

Voi­ci un tableau qui a fait cou­ler beau­coup d’encre. J’ai lu beau­coup de choses à peu près toutes en oppo­si­tion sur ce tableau. Ce qui est cer­tain, c’est que c’est un auto­por­trait de Raphaël (Raf­fael­lo San­zio) qu’on trouve sur la gauche du tableau. L’i­den­ti­té de l’autre per­son­nage prête à cau­tion et sur ce sujet, entres autres, on trouve plu­sieurs hypo­thèses. Je ne vais pas m’a­mu­ser à tout lis­ter, mais il sem­ble­rait que les deux hypo­thèses les plus pro­bables soient d’un côté son ami Giu­lio Roma­no (Giu­lio Pip­pi de’ Jan­nuz­zi), peintre affi­lié à son ate­lier et ami proche, de l’autre son maître d’arme ou alors son exé­cu­teur testamentaire.
Peu importe à vrai dire qui est l’autre per­son­nage. A mon sens. J’en reparlerai.
Le tableau est exé­cu­té sur toile, contrai­re­ment à la plu­part de ses œuvres com­man­di­tées qui sont peintes sur des pan­neaux de bois, ce qui est une marque de noblesse étant don­né le coût occa­sion­né par un tel sup­port. Les spé­cia­listes de Raphaël disent que c’est le tableau le plus véni­tien du peintre, car peint à la fin de sa vie, il fait par­tie des œuvres les plus dyna­mique et les plus dan­santes. Ceux qui connaissent le peintre recon­naî­tront que le reste de son œuvre est pas­sa­ble­ment plus lourd. (more…)

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Le pre­mier sou­rire de la pein­ture : por­trait d’homme par Anto­nel­lo da Messina

Voi­ci un très beau tableau d’un peintre du XVème siècle ita­lien qui toute sa vie res­ta dans sa ville natale de Mes­sine. Anto­nel­lo da Mes­si­na est un peintre majeure, à l’o­ri­gine de cer­taines des plus belles pein­tures de la Renais­sance comme Le Condot­tière ou une Annon­cia­tion datant de 1475. Le por­trait d’homme, connu éga­le­ment sous le nom de l’homme qui rit, datant de 1470, a cette par­ti­cu­la­ri­té d’être le tout pre­mier por­trait depuis l’an­ti­qui­té sur lequel le sujet est clai­re­ment en train de sou­rire ; une audace folle dans une socié­té où la reli­gion condamne ce genre de pra­tiques dans les repré­sen­ta­tions com­man­di­tées. (more…)

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Miche­lan­ge­lo Meri­si da Cara­vag­gio, la voca­tion de Saint-Matthieu

Jésus vit en pas­sant, assis au bureau des taxes, un homme qui s’appelait Mathieu. Il lui dit “Suis-moi”.

La voca­tion de Saint-Mat­thieu est un des plus beaux tableaux, peint entre 1599 et 1600, du peintre Miche­lan­ge­lo Meri­si da Cara­vag­gio, plus connu sous le nom de Le Cara­vage. Pre­mière com­mande offi­cielle du peintre par le Car­di­nal Mat­thieu Conta­rel­li, le tableau est aujourd’­hui expo­sé à son empla­ce­ment d’o­ri­gine, dans la cha­pelle Conta­rel­li de l’église Saint-Louis-des-Fran­çais de Rome et fait par­tie des toiles monu­men­tales de l’ar­tiste par ses dimen­sions (322 x 340 cm). La toile est la pre­mière d’une série de trois illus­trant la vie de l’a­pôtre Mat­thieu, sui­vie de Saint-Mat­thieu et l’ange et du Mar­tyre de Saint-Mat­thieu et raconte en exten­sion l’ap­pel de Mat­thieu par le Christ, décrit dans l’é­van­gile épo­nyme(1), scène qu’on nomme voca­tion (latin vocare, appe­ler).

La toile décrit une situa­tion dans laquelle on voit le Christ dési­gnant le publi­cain (per­cep­teur d’im­pôts) Mat­thieu(2) Levi assis à la table de son bureau de per­cep­teur. Le Christ est accom­pa­gné de son com­pa­gnon de la pre­mière heure, Pierre. Mat­thieu, lui, est entou­ré de quatre per­son­nages ; deux sont tour­nés vers les pro­ta­go­nistes qui viennent d’en­trer et deux autres res­tent occu­pés à leurs affaires comp­tant des pièces de mon­naie. Celui qui se trouve le plus à gauche est direc­te­ment ins­pi­ré d’une scène que le peintre Hans Hol­bein a gra­vé à Bâle en 1522 au cœur de sa danse macabre et que l’on retrouve copiée par nombre d’autres peintres. Clin d’œil du peintre ita­lien ; sur l’o­ri­gi­nal de Hol­bein se trouve cité un pas­sage de l’é­van­gile de… Mat­thieu. (more…)

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