Des tous les poètes qui composent la superbe anthologie de la Poésie Arabe, traduite et présentée par René R. Khawam, chez Phebus, il a fallu que je m’entiche du prince des poètes-truands, Abou’l Qasim Al-Tamimi. Il gagnait sa vie en écrivant de petites saillies parfaitement insultantes et drôles dont il faisait commerce auprès des notables qui s’offraient ses services dans les sociétés privées. Pourtant, ce sont ici deux poèmes de toute beauté que je reproduis ici, agrémentés d’un murraqa conservé à la BNF (manuscrit persan enluminé) et d’un chant soufi issu de l’album Hadra par Fadhel Jaziri. A noter qu’Evelyne Larguèche a déposé un texte sur l’« insulteur public » sur le site de la Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée (REMMM).
Entre deux vins
Rouge avant le mélange, et fauve après,
le vin apparaît entre deux tuniques
et nous offre son corps entre deux fleurs :
l’un de narcisse, l’autre d’anémone.Pur, il est à l’image de la joue
rosissante de la pucelle aimée ;
et livré au mélange, il a la couleur
de la joue d’or pâli du bel amant.
Reddition
Une fille blanche
comme de l’argent
mais le front orné
d’une frange noire…Vois-là s’avancer,
empruntant par ruse
le jais de ses yeux
à quelque antilope !Pareille beauté
ne sera vaincue
qu’à la reddition
de ses deux paupières !
Abou’l Qasim Al-Tamimi
Xème siècle