J’ai­mais bien Mar­ce­line Lori­dan-Ivens jus­qu’à ce que…

Jean-Pierre Sergent et Marceline Loridan-Ivens dans le film documentaire français de Jean Rouch et Edgar Morin, "Chronique d'un été" (1961)

Jean-Pierre Ser­gent et Mar­ce­line Lori­dan-Ivens dans le film docu­men­taire fran­çais de Jean Rouch et Edgar Morin, “Chro­nique d’un été” (1961)

J’ai­mais bien Mar­ce­line Lori­dan-Ivens, jus­qu’à ce que je l’en­tende hier soir sur France-Inter, dans l’é­mis­sion d’Ar­thur Drey­fus, Encore heu­reux. L’en­tre­tien était plu­tôt inté­res­sant, parce qu’il était léger, par­lait de ciné­ma, de la vie en géné­ral, jus­qu’à ce qu’on tombe dans un ramas­sis de cli­chés — pour ne pas dire de conne­ries — du genre qu’on entend à lon­gueur de jour­née et qui ne servent qu’à ali­men­ter une haine engen­drée par la peur. La vieille dame de confes­sion juive n’hé­site pas à mettre tout le monde dans le même panier, ce qui met visi­ble­ment mal à l’aise le pré­sen­ta­teur. Celle qui a côtoyé nombre d’in­tel­lec­tuels de sa géné­ra­tion, dont Jean Rouch et Edgar Morin avec qui elle a fait un très beau film, celle qui fut l’é­pouse de Joris Ivens, a tout à coup fait une chute dans l’es­ca­lier de mon estime et de celle, cer­tai­ne­ment, des audi­teurs de la radio, pour ne plus deve­nir qu’une vieille dame un peu fan­tasque aux che­veux oranges.
Trans­crip­tion de l’en­tre­tien (en élu­dant les fautes de fran­çais orales) de cette émis­sion du 18 juin 2014, sur France Inter, dis­po­nible en réécoute sur ce lien.

AD — Vous dites, ce qui m’in­quiète, c’est l’antisémitisme.
MLI — Oui bien sûr, je trouve qu’il est en train de se déve­lop­per dans des pro­por­tions inima­gi­nables, on sait bien pour­quoi, on sait d’où ça vient aus­si […] Je me dis “ça va recom­men­cer”, ce que j’ai vécu quand j’a­vais 15 ans est en train de se remettre en place dans un futur proche ou plus ou moins loin­tain et ça com­mence tou­jours par les Juifs, vous savez, et ça conti­nue par les autres. Le Juif est un bouc émis­saire dont on se sert aisé­ment depuis l’his­toire de la Chré­tien­té et puis c’est pas­sé ensuite chez les Musul­mans et ça nous revient par les Musul­mans en France et aus­si par l’ex­trême-droite fran­çaise. […] L’an­ti­sé­mi­tisme se nour­rit de lui-même et tous les pré­textes sont bons pour le nour­rir. Voilà. […]
AD — Vous dites “pour moi le futur c’est le jihadisme”
MLI — Oui bien sûr, ce n’est pas mon futur sou­hai­té, mais je suis obli­gé de consta­ter que l’Eu­rope se laisse enva­hir par cette notion, croit à une pen­sée de cette modé­ra­tion isla­mique qui date du Moyen-Âge…
AD — Isla­miste vous vou­lez dire, mais euh, on par­lait tout à l’heure de l’an­ti­sé­mi­tisme, mais que dire de la peur de cer­tains Fran­çais envers les Musul­mans quels qu’ils soient, com­ment font, com­ment pour­raient faire les mil­lions de Musul­mans qui n’ont rien à voir avec tout ce qui se passe, eux aus­si sont dans une situa­tion difficile ?
MLI — C’est eux qui subissent leur propre oppres­sion, ils l’ac­ceptent, c’est à eux de se révol­ter, comme d’autres socié­tés se sont révoltées…
AD — Mais ils ne sont pas res­pon­sables de ce qu’ils n’ont pas fait ?
MLI — Ils ne sont pas res­pon­sables de ce qu’ils n’ont pas fait, mais ils acceptent très très bien l’op­pres­sion des femmes qui sont les leurs…
AD — Pas tous ?
MLI — Pas tous oui, mais jamais tous ! Mais jus­te­ment il faut combattre…
AD — C’est dur d’é­chap­per aux étiquettes…
MLI — Ben oui, mais il faut se battre, il ne faut pas accep­ter comme ça. Le ving­tième siècle est une suc­ces­sion de com­bats des Hommes pour gagner en liber­té et d’autres socié­tés doivent faire la même chose.

A ce moment-là, Arthur Drey­fus décide de mettre un terme à l’en­tre­tien en pas­sant à la pro­mo et l’é­mis­sion se ter­mine sur ces bonnes paroles.
Je l’ai­mais bien car étant don­né ce qu’elle a vécu, je la pen­sais suf­fi­sam­ment intel­li­gente pour ne pas avoir ce genre de dis­cours dis­cri­mi­nant et au contraire être por­teuse d’une parole éclai­rée. Quel jus­ti­fi­ca­tion trou­ver à ces mots ? J’en reste sans voix.
Déplorable…

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шпиона радио — Sta­tion de nombres

[audio:irdial.xol]

Je suis tom­bé dans un monde abso­lu­ment hal­lu­ci­nant, un monde qui, j’en suis cer­tain, n’est pas for­cé­ment étran­ger à tous les ama­teurs d’his­toire des guerres et d’es­pion­nage mais aus­si des radio-ama­teurs. C’est le monde très her­mé­tique des sta­tions de nombre. Ces sta­tions, dont l’u­ti­li­té est a prio­ri entiè­re­ment dédiée au contre-espion­nage (a prio­ri, ce n’est pas cer­tain, per­sonne ne vous le confir­me­ra) dif­fusent des séries de chiffres, de lettres, des bips, ou même rien du tout, avec une régu­la­ri­té incroyable et avec une constance qui aga­ce­rait un joueur d’é­chec. La plus connue de ces sta­tions de nombres, c’est UVB-76, connue éga­le­ment sous le nom “the Buz­zer”. Elle émet depuis 1982 à rai­son de 25 bour­don­ne­ments par minute sans dis­con­ti­nuer, sauf trois fois en tout et pour tout, pen­dant les­quelles ont été dérou­lés des séries de chiffres et de lettres.

De quoi se plon­ger dans une ambiance à la limite du réel qui conjugue tous les fan­tasmes tour­nant autour de l’es­pion­nage et des plus folles théo­ries du com­plot, car les sta­tions de nombres ont leur fans sur You­tube (d’é­tranges per­sonnes qui filment leur récep­teur radio sur une fré­quence fixe). Il faut écou­ter UVB-76, la fameuse cubaine Aten­ción, la chi­noise 8375kHz, 13.420kHz la pseu­do fran­çaise qui est en fait russe ou E10 Mos­sad. Bref, il y a de quoi faire sur You­tube, et si tou­te­fois vous étiez en manque, The Conet Pro­ject vous pro­pose un CD uni­que­ment fait d’en­re­gis­tre­ments de sta­tions de nombres. On en salive d’avance…

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