La mémoire ambu­lante des peuples évanouis

La mémoire ambu­lante des peuples évanouis

Plon­gée en pays ouï­ghour, pour majeure par­tie situé en Chine, dans la région auto­nome du Xin­jiang qui compte pour près d’un sixième du ter­ri­toire chi­nois, mais dont on retrouve de nom­breux res­sor­tis­sants au Kaza­khs­tan et en Ouz­bé­kis­tan. Cette par­tie du monde qu’on appe­lait autre­fois Tur­kes­tan orien­tal a été bal­lo­tée entre plu­sieurs pays, dont les fron­tières se perdent fina­le­ment dans une his­toire mou­ve­men­tée. C’est éga­le­ment le ber­ceau ori­gi­nel du peuple turc (le dra­peau du Tur­kes­tan orien­tal res­semble étran­ge­ment au dra­peau turc mais en bleu…) qui a par­cou­ru les steppes jus­qu’à Istan­bul et dont on peut voir encore aujourd’­hui, aux côtés des Ana­to­liens, les traits carac­té­ris­tiques comme ces beaux yeux en amande et ces pom­mettes saillantes, héri­tiers des guer­riers nomades qui ont fon­du sur l’Eu­rope en d’autres temps.

Old Uyghur man

Vieil homme Ouï­ghour — Pho­to © Gus­ta­vo Jeronimo

Je m’ins­tal­lai pour man­ger de bon appé­tit, récon­for­té par l’am­biance ani­mée. Dehors, devant la fenêtre, des ber­gers condui­saient leurs chèvres à tra­vers le bliz­zard de sable, coif­fés de hauts bon­nets de peau de mou­ton tor­dus par la tour­mente. Des femmes avan­çaient, enve­lop­pées de voiles blancs sous les toques aux allures de tasse de thé retour­née qui se portent loca­le­ment. La région était bien par­ti­cu­lière, je le savais. Les Ouï­gours sont à plus de cin­quante pour cent de type euro­péen, comme l’ont révé­lé les recherches géné­tiques, et c’est ici à Kenya, à la limite sud-est du désert, que sur­vit la popu­la­tion la plus hybride de toutes. Il ne s’é­cou­lait guère de minutes sans que les portes s’ouvrent vio­lem­ment et que le vent nous jette une nou­velle appa­ri­tion. Par­fois, les arri­vants arra­chaient leurs couvre-chefs four­rés pour révé­ler un fouillis de che­veux de feu et des figures longues aux pau­pières lourdes, col­lages issus d’une ascen­dance oubliée. D’autres fois, des yeux impro­bables éclai­raient des visages basa­nés par le soleil. Un mélange d’an­cien sang ira­nien, tocha­rien et même bac­trien, fai­sait d’eux la mémoire ambu­lante des peuples éva­nouis. Un homme au teint rosé me rap­pe­lait un ami anglais, sauf qu’il por­tait une calotte déco­lo­rée et qu’il boi­tait. Trois femmes enle­vèrent leurs écharpes et dénu­dèrent leur pâleur olive.

Curiosity

Jeune Ouï­ghoure curieuse — Pho­to © Gus­ta­vo Jeronimo

Ten­tant de com­prendre ce pot-pour­ri de voix et de phy­sio­no­mies qui m’en­tou­raient, je glis­sai peu à peu dans une rivière où les nations avaient per­du leur signi­fi­ca­tion. Après tout, c’é­tait cette route qui avait appor­té les soies chi­noises dans les tombes de la Ger­ma­nie de l’Âge de fer. Elle avait répan­du la varié­té et une riche impu­re­té. Le Tak­la­ma­kan en était à la fois la mémoire et le pro­tec­teur. Le désert avait livré des sceaux à l’ef­fi­gie de Zeus et de Pal­las Athé­na — loin­tain héri­tage d’A­lexandre le Grand. Un lin­ceul pro­ve­nant des pla­teaux salins s’orne d’un por­trait d’Her­mès, où figure même le cadu­cée ; et la dépouille d’un offi­ciel chi­nois, vieille de deux mille ans, gît dans un man­teau orné de motifs de ché­ru­bins gré­co-romains, tis­sés dans l’é­toffe. Tout semble en état de chan­ge­ment per­ma­nent. Les longues manches chères à l’o­pé­ra chi­nois sont, semble-t-il, venues de la Crête antique, au terme de nom­breuses muta­tions. Les tar­tans des momies tocha­riennes font échos aux Celtes des temps anciens ; les pièces d’or byzan­tines ferment les bouches des morts de la dynas­tie Tang ou se retrouvent trans­for­mées en bijoux par les nobles, tou­jours gra­vées des sym­boles de l’empire chrétien.

Barbier dans la rue

Bar­bier dans la rue — Pho­to © Gus­ta­vo Jeronimo

Colin Thu­bron, L’ombre de la route de la soie
Folio, 2006

Pho­to d’en-tête © Uyg­hur East Turkistan

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Dans les bagnes de Malte

Alleway; Mdina, Malta

Mdi­na, Malte — Pho­to © John Has­lam

Les esclaves sont comp­tés tous les soirs, avant d’être enfer­més. Et la crique des galères, au Bor­gu, est fer­mée par une chaîne. Si le nombre n’y est pas, des coups de canon annoncent à la ville le nombre de man­quants, pré­su­més en fuite. Il existe de nom­breuses pri­sons-dor­toirs : les caves-cathé­drales de Saint-Ange­lo, les bag­nos de La Valette, de Bor­gu et de San­glea. Le mot bagno (bagne) vient de Constan­ti­nople. Il fait réfé­rence aux bains publics qui ont été uti­li­sés pour enfer­mer les esclaves sous les Byzantins.

Daniel Ron­deau, Mal­ta Hanina
Gras­set & Fas­quelle, 2012

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Par­tir avec Rim­baud et ne pas reve­nir de Tadjourah

Par­tir avec Rim­baud et ne pas reve­nir de Tadjourah

Quelle idée de m’être lan­cé là-dedans. Sur le coin d’un étal de libraire m’at­ten­dait un jour un livre à la cou­ver­ture oran­gée, un livre por­tant sobre­ment son titre comme une allu­mette ten­due dans la nuit afri­caine, comme pour bali­ser le che­min vers la ville plon­gée dans l’obs­cu­ri­té. Un nom ; Sébas­tien de Cour­tois. Je me suis dit que c’é­tait encore un de ces voya­geurs tout droit sor­tis de Neuilly qui s’est enca­naillé dans les bas-fonds des cales du port de Manille ou dans les bor­dels de Ham­bourg. Mais non, enfin peut-être mais peu importe, ce qui importe c’est que le type est jour­na­liste et a déjà écrit quelques livres sur les Chré­tiens d’O­rient, et là, il parle à mon cœur. Un titre ; Éloge du voyage, sur les traces d’Ar­thur Rim­baud. Évi­dem­ment, ça touche encore son cœur de cible, ça parle direc­te­ment à l’a­ma­teur, celui qui aime le voyage autant que la poé­sie, alors la résis­tance n’o­père pas long­temps et on finit par pas­ser en caisse avec la bave aux lèvres. Comme tout bou­quin qui se res­pecte, j’aime les lais­ser mûrir dans un coin de la mai­son, à l’a­bri de la lumière et de l’hu­mi­di­té, à une tem­pé­ra­ture de 14°C maxi­mum ; on le sort ensuite au grand-jour pour le cham­brer, pour lui faire atteindre gen­ti­ment la tem­pé­ra­ture de 16°C et c’est alors qu’on l’ouvre déli­ca­te­ment et c’est rare qu’on y trouve des mor­ceaux de bou­chon tom­bés dans la robe.
L’é­cri­ture y est bar­bare, rude, une écri­ture sans com­plai­sance et qui parle avec la voix éraillé de ceux qui ont trop cau­che­mar­dé, tel­le­ment cau­che­mar­dé qu’ils ont crié dans leur som­meil, mais c’est une écri­ture pleine de pous­sière du désert, de cette pous­sière qu’on net­toie en se plon­geant dans les eaux dia­bo­liques du Golfe d’A­den, en face de Dji­bou­ti. Les boutres au repos attendent un coup de pein­ture sur leurs cales, une chèvre noire broute deux touffes d’herbes rai­dies par un soleil cui­sant, et pen­dant ce temps, tan­dis que le soleil plonge der­rière le conti­nent afri­cain, des hommes se saoulent en par­lant de la gran­deur pas­sée de la France, comme s’il ne fai­sait pas assez chaud comme ça…

Tadjourah

Rues de Tadjourah

Il y en a qui ne sont jamais ren­trés. Ceux que l’on a oublié, inca­pables de renouer avec leur vie anté­rieure. Les trans­fuges. Le livre d’or de Modi­no en compte une belle bro­chette, les voya­geurs de l’i­ma­gi­naire, les vacan­ciers et les autres, les auteurs que nous connais­sons, Deniau, Pratt, Guil­bert et Gary, venus assis­ter aux funé­railles de la France colo­niale : « Ils sont tous là, écrit Gary dans Les Tré­sors de la Mer Rouge, il ne manque pas un mou­choir blanc sur une nuque de légion­naire, pas un bur­nous rouge de spa­hi, pas un rire dur de ceux qu’on appe­lait jadis les “joyeux”… Vous les ver­rez tous, dans les rues de Dji­bou­ti, pour quelques secondes d’his­toire, ces fan­tômes bien vivants sur­gis d’un monde éva­noui. » Tous ont été ivres sur cette ter­rasse au soleil cou­chant lors­qu’il fait qua­rante-huit degrés en juillet.
« Je n’ai fer­mé que fin 1991, conti­nue Modi­no, lorsque l’in­sur­rec­tion afar a écla­té. L’ar­mée fran­çaise est venue nous éva­cuer en héli­co­ptère. Mon bar a été pillé… »
La révolte afar a été noyée dans le whis­ky de Modino.

Sébas­tien de Cour­tois, Éloge du voyage, sur les traces d’Ar­thur Rimbaud
Edi­tions Nil, 2013

Pho­tos © Visages de l’A­frique de l’est

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Pre­mier séjour à Tigilit

Pre­mier séjour à Tigilit

Texte sur­gi du pas­sé, qu’il faut se remémorer…

Smara

Pho­to © Ele­le­ku
Siro­co al cam­pa­ment sah­raui d’Smara

Rachat des jours invertébrés…
Entré dans l’action, dans le cercle… dans l’acte même où tout est pur.
Me voi­ci, l’ignorant, dans ces lentes années molles, bouillon­nant tour­men­té, me voi­ci entré là où tout (le mou­ve­ment, l’arrêt qui n’est pas inutile, la bête immo­bi­li­té sous un voile bleu, l’insipide vie entre quatre murs, les écor­chures des pieds, la nour­ri­ture prise où le cha­meau a bu – où les femmes ont rin­cé leurs mains, – la barbe la plus longue, le petit fait de se raser – de ne pas –, la sur­veillance méti­cu­leuse de la langue, de l’estomac, le soin aux orteils, les mous­tiques, les éner­ve­ments quand moqué des femmes), où tout comme dans un orga­nisme prêt la nour­ri­ture non choi­sie nour­rit, amé­liore ; où tout m’est une nour­ri­ture comme jamais absor­bée ; où chaque jour m’alourdit, nous alour­dit. Car la joie est double. Sou­dés par la même volon­té , la même éner­gie – ces mul­tiples forces d’or me trans­fi­gurent, mon frère. Cou­rant que, par­ti de notre mutuel acte de volon­té, je cherche, dans une course vers le but, à main­te­nir et à trans­for­mer de l’encore pré­caire jusqu’au définitif.
Car c’est toi qu’il faut atteindre, le lieu qui, fou­lé, donne aux pas qui ont été vers lui une durable valeur. Toi seul confères à l’effort parce que nous pou­vons impri­mer notre nom dans ton sol, son auto­ri­té, son galbe défi­ni­tif, le fais pas­ser de l’informe encore à la forme, belle pour cha­cun. Non plus masse riche de ceci et cela – Dra, El Akh­sas et mes notes – mais un nom seul qui résume, suf­fi­sant à lui-même, fait pour pas­ser dans la bouche et l’oreille des hommes, Sma­ra.

Michel Vieu­change,
Sma­ra, car­nets de route d’un fou du désert

Étrange texte de Michel Vieu­change, l’ange blond du désert dégui­sé en bédouine pour tra­ver­ser les immen­si­tés de sable avec les hommes dres­sés sur leurs cha­meaux, rem­plis­sant ses car­nets de notes de manière lapi­daires à chaque heure du jour et de la nuit, par­mi la ver­mine qui hante sa couche ou fié­vreux en plein soleil de midi dans les val­lées pier­reuses. Un texte frag­men­té comme autant de pierres sèches jalon­nant sa route, des petites phrases par­fois sans verbe, par­fois juste deux mots sans sujet, texte déper­son­na­li­sé à l’extrême mal­gré l’expérience per­son­nelle for­cé­ment pré­sente, ces quelques lignes cer­tai­ne­ment écrites dans un moment de fer­veur lyrique que la soli­tude du désert ne peut que for­te­ment inci­ter sont au beau milieu de son texte comme une borne en plein cœur de sa route. Tan­dis que je me sens secoué par une nou­velle envie de lire le fabu­leux livre de Paul Bowles, un thé au Saha­ra (The Shel­te­ring Sky), que j’ai pour­tant ache­vé de lire au début de cette année, la lec­ture de Sma­ra est faire pour durer sur la lon­gueur, j’y remets les pieds quelques fois, parce que l’intrigue est légère, on sait que Vieu­change est en route pour Sma­ra (سمارة), il n’est pas encore arri­vé, che­mine vers la cité mythique dont je ne sais encore rien – je fais durer, durer encore et je me réserve le droit à l’ignorance –, alors je prends mon temps pour faire durer le plai­sir, au même titre que l’Usage du Monde de Nico­las Bou­vier est un livre qui néces­site qu’on res­pecte d’autant plus le texte qu’on sait qu’il a été écrit de longues années après le voyage, dans la dou­leur extrême de l’accouchement, après que des pans entiers du manus­crit aient été jetés à la pou­belle par un domes­tique peu scru­pu­leux, per­dus à jamais dans les strates d’une décharge afghane.

Rachat des jours inver­té­brés… Quelle for­mule sur­gie du néant ! C’est le désert qui fait dire ça, et quelle idée de s’enfoncer ain­si dans le Maroc inter­dit, l’homme blond aux yeux bleus – vieille super­sti­tion – sous la djel­la­ba blanche cachant des atours fémi­nins qui n’existent pas et gar­dant près de lui appa­reil pho­to et car­nets de notes, une petite phar­ma­cie et quelques objets per­son­nels. Comme de longues jour­nées sans forme au milieu de nulle part, la pure étran­ge­té de l’homme dans l’écosystème le plus hos­tile qui soit, la plus pure incon­grui­té au beau milieu des rochers et des scor­pions. A mille lieues de Loti tra­ver­sant le désert ara­bique avec sa cohorte de gardes qu’il rince à grand coups de pièces d’argent. Texte somp­tueux et déchar­né, météo­rique comme l’ont appe­lé cer­tains comme Théo­dore Monod et Paul Clau­del qui en a écrit la pré­face – Paul Bowles, lui, a écrit la pré­face du texte tra­duit en anglais et dit de cette épo­pée que c’est un « pèle­ri­nage mons­trueux au pays de Nulle Part ». Texte âpre et violent à l’extrême, autant pour celui qui l’a écrit que pour la langue elle-même. Le lec­teur à son tour ne peut en sor­tir indemne.

Smara

Pho­to © Ele­le­ku
Siro­co al cam­pa­ment sah­raui d’Smara

Pho­to d’en-tête © Rémi Bri­dot

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Les temps sau­vages, par Joseph Kessel

Les temps sau­vages, par Joseph Kessel

Voi­ci un livre qui, lorsque je l’ai lu, il y a quelques étés main­te­nant, m’a pro­fon­dé­ment remué.  Le livre de Kes­sel, Les Temps Sau­vages, se déroule pen­dant la Pre­mière Guerre Mon­diale, à la fin exac­te­ment, lors­qu’il revient en France après être pas­sé par Vla­di­vos­tok. On y fait la ren­contre des offi­ciers de l’Ar­mée Blanche de la Rus­sie qui se dis­loque sous l’im­pul­sion des bol­che­viks, et l’ombre de Kolt­chak, mais aus­si celle, folle et fuyante de Roman Fio­do­ro­vitch von Ungern-Stern­berg, le baron fou.
Roman de jeu­nesse, indes­crip­tible, c’est un roman d’a­ven­ture comme on en fait plus, qui sent le vent des steppes et l’al­cool fre­la­té, la misère des oubliés de la guerre et la mort omni­pré­sente. Une grande œuvre, aus­si sau­vage que son titre…

Joseph Kessel chez lui en 1967. Photo Jerry BAUER/Opale

Joseph Kes­sel chez lui en 1967. Pho­to Jer­ry BAUER/Opale

Elle était vaste, mas­sive, plus nette et décente que les autres édi­fices publics. Elle n’a­vait pas eu le temps de se dégra­der : la ligne qui reliait Vla­di­vos­tok au Trans­si­bé­rien n’a­vait pas beau­coup d’an­nées. A l’ap­proche, elle fai­sait bon effet. Mais dès que notre trai­neau nous eut dépo­sés devant le haut per­ron, je n’ai plus été capable de pen­ser à quoi que ce fût. L’o­deur était déjà là. Insi­dieuse, sour­noise… détes­table. A chaque marche, elle deve­nait plus lourde.
Quand nous avons atteint le per­ron, elle impré­gnait l’air pour­tant libre.
— Venez, m’a dit Milan.
Il se tenait près de la grande porte à peine entre­bâillée qui don­nait accès à l’in­té­rieur de la gare. Je l’ai rejoint. D’un coup d’é­paule où il avait mis tout son poids, il a pous­sé le battant.
— Venez, m’a répé­té Milan.
Je ne pou­vais pas. Non, je ne pou­vais pas. Là, c’é­tait l’antre  de l’o­deur. Elle frap­pait en pleine face, de plein jet. Ignoble à faire vomir. Et ce n’é­tait rien encore.
De la porte jus­qu’aux der­niers recoins du hall, le sol était tapis­sé, mate­las­sé d’une épaisse et hor­rible sub­stance, molle, flasque, espère de tourbe, de maré­cage, dont on ne savait si elle était vivante ou morte car tan­tôt elle demeu­rait inerte et tan­tôt remuait fai­ble­ment. Les fenêtres enduites de suie, de vieille pous­sière et de givre sale ne lais­saient pas­ser qu’une lueur cou­leur de cendre. Il fal­lait un long ins­tant pour recon­naître dans la matière qui cou­vrait toute la sur­face du hall sans en lais­ser un pouce libre, col­lés, entre­la­cés, imbri­qués les uns aux autres, des corps humains.

Joseph Kes­sel, Les temps sauvages
in Repor­tages, Romans (Quar­to)
Gal­li­mard, 1975

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