Stavkirke, l’église en bois debout
Zone norvégienne
Quel nom étrange… Église en bois debout… En bois debout… Le nom de ces églises qu’on ne trouve plus guère qu’en Norvège vient de la manière dont le bois est travaillé. En réalité, l’expression est “bois de bout”, par opposition à “bois de fil”. Le bois de bout est tout simplement le bois travaillé dans le sens vertical, dans le sens de la fibre, ce qui en fait un matériau très résistant à la compression. Érigées à partir de pieux fichés dans le sol, la structure toute entière est supportée par ces blocs de bois qui sont parfois tout simplement des troncs entiers, qu’on appelle stav en norvégien et qui en anglais, stave, signifie “portée”. Ce sont ces poteaux d’angle qui donnent leur nom à ces églises ; stavkirke, ou stavkyrkje. Entièrement en bois, ce sont des chefs‑d’œuvre d’ingénierie médiévale. Si on estime que l’Europe du Nord pouvait compter environ 1300 églises, peut-être plus, il n’en reste aujourd’hui que 28, toutes en Norvège.
Photos © Håkon Li
Gefðu Að Móðurmálið Mitt
Laissons-nous emporter dans les campagnes du sud de la Norvège, en dehors des grandes villes, avec la voix cristalline de la chanteuse islandaise Ragnheiður Gröndal et ce merveilleux titre parfaitement imprononçable, Gefðu Að Móðurmálið Mitt.
Je le disais plus haut, il ne reste que 28 églises conservées de ce type alors que les églises en bois debout étaient légion en Europe du Nord. La plupart ont fini brûlées, abandonnées ou tout simplement désossées pour finir en bois de chauffage.
L’édification de ces petites églises correspond à la période de christianisation des terres norvégiennes entre 1150 et 1350, tandis que la religion naturelle pré-chrétienne finit d’être chassée par le christianisme ; le quadrillage des terres habitées est un formidable outil de propagande qui fait son œuvre. Aux alentours de 1700, ces églises réputées rurales sont abandonnées au profit d’églises en pierre construites en cœur de ville.
Le défi technique de ce type de construction est de pouvoir résister aux vents forts, dans une région qui ne disposent que de feuillus peu hauts ; la technique du bois debout avec ses semelles d’angles permet de simplement poser la structure sur une semelle de pierre, ce qui réduit les risques d’enlisement et de pourrissement des piliers dans le sol. Ainsi, il existe deux sortes de stavkirke qui correspondent à leur point d’évolution. Les premières sont petites, carrées et peu élevées, comme celles de Haltdalen ou d’Uvdal. Les secondes sont plus élancées, ce sont les plus connues, car elles sortent de la terre norvégienne avec fierté, parfois biscornues et un peu tordues, on les croirait prêtes à s’écrouler parce qu’elles prennent de la hauteur et le transept est élevé (comme l’atteste la photo (© Micha L. Rieser) du plafond de celle de Hopperstad ci-dessous) ; elles sont la quintessence de l’art scandinave, ornées de volutes et de têtes sculptées.
Que ce soit les portails, les chapiteaux, les peintures, tout ce qui de loin peut paraître tristement sobre est en réalité incroyablement prolixe d’originalité.
Si la plus connue est celle de Borgund, nichée dans un écrin de verdure, la plus ancienne est celle d’Urnes, plantée au bord d’un petit fjord. La plus grande est celle de Heddal, avec ses bois dorés qui flamboient dans le soleil et son ornementation extérieure qui lui donne des airs de ruche… Celle de Gol est construite en bois sombre, celle de Ringebu porte fièrement une flèche peinte en rouge et celle de Øye semble perdue au-dessus des eaux sombres d’un fjord, celle de Fantoft est la plus intriguante, sombre et fantômatique, la nouvelle car l’ancienne a été détruite par un sombre crétin incendiaire en 1992…
Il existe une carte interactive des églises en bois debout de Norvège sur le site VisitNorway.com, qui peut donner des idées de voyage…
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