Mots d’un voca­bu­laire oublié X

Aver­tis­se­ment: billet à haute teneur en mots rares et pré­cieux, sau­vés de l’oubli.

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  2. 2nd volet
  3. 3ème volet
  4. 4ème volet
  5. 5ème volet
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  8. 8ème volet
  9. 9ème volet
  10. 10ème volet

Plectre

Un plectre est un dis­po­si­tif per­met­tant de pin­cer ou grat­ter les cordes d’un ins­tru­ment. Il est géné­ra­le­ment appe­lé média­tor (« onglet » en Bel­gique, « pic » ou « pick » au Qué­bec, « pick » en anglais) dans le domaine de la gui­tare, de la man­do­line et des ins­tru­ments sem­blables : il s’a­git alors d’un petit acces­soire que l’on tient entre le pouce et l’in­dex. On appelle onglet le type de plectre uti­li­sé aus­si pour les ins­tru­ments ou les styles requé­rant l’u­ti­li­sa­tion indi­vi­duelle de plu­sieurs doigts pour grat­ter les cordes (ex : « fin­ger­pi­cking coun­try », cithare, kânun, etc.). Celui-ci s’en­file sur le bout du doigt.

Pein­ture murale de la nécro­pole thé­baine, vers 1420 — 1411

Put­to

Put­to (put­ti au plu­riel) est un terme archi­tec­tu­ral ita­lien dési­gnant sur une façade la sta­tue d’un nour­ris­son jouf­flu et moqueur. Il s’a­git presque tou­jours d’un gar­çon et par­fois d’un ange. Les put­ti peuvent se trou­ver essen­tiel­le­ment sur les monu­ments de la Renais­sance ita­lienne, en par­ti­cu­lier sur tous les bâti­ments rele­vant du baroque sici­lien, dont ils consti­tuent l’une des carac­té­ris­tiques prin­ci­pales. Le per­son­nage du put­to est ins­pi­ré de l’art de la Grèce antique, mais fut redé­cou­vert et réuti­li­sé au début du Quat­tro­cen­to. Ce sont des anges sym­bo­li­sant l’amour.

Put­ti peints par Raphaël dans la Cha­pelle Six­tine (1513)

Ruden­ture

Orne­ment en forme de câble ou de bâton uni ou sculp­té dont on gar­nit les can­ne­lures d’une colonne ou d’un pilastre dans leur par­tie inférieure.

Sar­doine

La sar­doine (du grec ancien σάρδιον / sár­dion, pro­ba­ble­ment « de la ville de Sardes ») est une pierre de cou­leur rouge-brun, plus ou moins trans­lu­cide. Il s’a­git en fait d’une varié­té de calcédoine.
On en trouve un usage dans l’art isla­mique et dans l’art byzan­tin. En outre, les artistes du Moyen Âge ont beau­coup appré­cié la reprise d’ob­jets orien­taux en sar­doine, et leur ont ajou­té une mon­ture d’or­fè­vre­rie : le vase d’A­lié­nor du tré­sor de la basi­lique de Saint-Denis, actuel­le­ment conser­vé au musée du Louvre, en est un exemple.

Coupe des Pto­lé­mées, 1er siècle avant ou après J.C.
Cabi­net des Médailles

Eton­nant vase-camée. Cette somp­tueuse pièce du tré­sor de Saint-Denis aurait été offerte éga­le­ment à l’abbaye par le roi Charles le Chauve. Elle est taillée dans un seul bloc de sar­doine et frappe par sa vir­tuo­si­té tech­nique, l’équilibre de la forme dans l’espace, le jeu sur les dif­fé­rentes cou­leurs de la pierre. Sait-on encore de nos jours façon­ner la sar­doine ? La tra­di­tion rap­porte qu’elle ser­vait lors du sacre des reines de France. Elle fai­sait donc par­tie de ce qu’on appelle les rega­lia. Le décor en haut-relief évoque les pré­pa­ra­tifs d’une céré­mo­nie dio­ny­siaque. Sur cha­cune des faces, une table char­gée de vases et les branches d’un arbre aux­quelles sont étran­ge­ment sus­pen­dus des masques bachiques. Datant du 1er siècle avant ou après J.C., ce can­thare antique pour­rait être l’œuvre d’un ate­lier d’Alexandrie. Il fut trans­for­mé en calice par une riche mon­ture d’orfèvrerie, à l’époque de Charles le Chauve, fon­due lors d’un vol en 1804.
Cercle Her­na­ni

Sca­phé

Le sca­phé (ou skaphe, sca­phium ou sca­phion) est un objet de type cadran solaire dont on dit qu’il a été inven­té par Aris­tarque de Samos (IIIè siècle avant J.-C.). Il consiste en une boule hémi­sphé­rique por­tant une gno­mon à l’in­té­rieur, dont le som­met ne dépasse pas la forme de l’hé­mi­sphère. Douze ins­crip­tions gra­vées à la per­pen­di­cu­laire de l’hé­mi­sphère indiquent les heures du jour. C’est à l’aide de cet ins­tru­ment qu’Era­tos­thène de Cyrène mesu­ra la lon­gueur de l’arc méri­dien com­pris entre les deux tropiques.

Sca­phé réa­li­sé par Georg Hart­mann en 1539 à Nurem­berg, lai­ton doré
Musée d’his­toire des sciences, Oxford

Sty­lo­bate

Sty­lo­bate en archi­tec­ture désigne :

  • Un pié­des­tal sup­por­tant une colon­nade, com­por­tant mou­lure, base et cor­niche régnant sur le pour­tour d’un édifice.
  • Le degré supé­rieur consti­tuant l’emmarchement dans cer­tains cas d’ar­chi­tec­ture grecque avec péri­style ou faux-péri­style de pilastres.
  • Un sou­bas­se­ment déco­ré de mou­lure et for­mant un avant-corps sui­vant les res­sauts d’une façade. Cer­tains sou­bas­se­ments réunis et conti­nus sont dénom­més stéréobate.

sty­lo­bate incur­vé du Par­thé­non d’Athènes

Tran­si

Contrai­re­ment au gisant repré­sen­tant un per­son­nage cou­ché et endor­mi, dans une atti­tude béate ou sou­riante, le tran­si est une sculp­ture funé­raire qui figure un per­son­nage éga­le­ment cou­ché, mais ici dans le réa­lisme de la putré­fac­tion. De façon excep­tion­nelle, ce tran­si, comme celui du duc René dans l’église Saint-Étienne à Bar-le-Duc, sculp­té par Ligier Richier, est debout, son écu lis­sé, et ten­dant son cœur à pleine main vers le ciel.

Appa­ru dans ce XIVe siècle où guerre (celle de Cent Ans), peste et famine ont empor­té la moi­tié de la popu­la­tion, le tran­si marque une cas­sure dans l’art funé­raire du Moyen Âge. L’hor­reur et les vers, la putré­fac­tion et les cra­pauds rem­placent — bru­ta­le­ment — sou­rires, heaume ou hen­nin. Guillaume de Har­ci­gny ne joint pas les mains dévo­te­ment, mais tente, de ses pha­langes sèches, de cacher un sexe pour­ri depuis long­temps. Le car­di­nal Lagrange exhorte le pas­sant non à prier pour lui, mais à faire preuve d’hu­mi­li­té, car tu seras bien­tôt comme moi, un cadavre hideux, pâture des vers.
Le terme tran­si appa­raît au XIIe siècle dans l’ac­cep­tion de « tran­si de vie », c’est-à-dire « tré­pas­sé ». La reli­gion popu­laire, empreinte de magie, en fait un saint à invo­quer dans les cas déses­pé­rés. On trouve un bon exemple de ce culte à Gana­go­bie dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Seules cer­taines régions sont tou­chées par le rem­pla­ce­ment des gisants par des tran­sis. Ain­si en est-il de l’Est de la France et de l’Al­le­magne occi­den­tale. En revanche, le tran­si demeure excep­tion­nel en Ita­lie ou en Espagne.

Tran­sis de Louis XII et d’Anne de Bretagne,
à Saint-Denis, par Gio­van­ni di Gius­to Betti

Ortho­state

Un ortho­state ou ortho­stat (nom mas­cu­lin) désigne, dans l’ar­chi­tec­ture gré­co-romaine, cha­cun des blocs de pierre dres­sés de chant, en une ou plu­sieurs ran­gées, à la base des murs.
Dans le cadre de l’ar­chi­tec­ture antique, les ortho­states sont des blocs de pierre paral­lé­lé­pi­pé­diques beau­coup plus hauts que pro­fonds, habi­tuel­le­ment éta­blis au-des­sous de l’é­lé­va­tion d’as­sise de parpaings.
L’u­sage du terme a été géné­ra­li­sé dans la des­crip­tion archi­tec­tu­rale de beau­coup de cultures. Par­fois entou­ré d’un simple filet, l’or­tho­stat est géné­ra­le­ment dépour­vu de décor sculp­té, à part dans quelques palais assy­riens, comme à Khorsabad.
Le terme est éga­le­ment employé pour dési­gner des pierres dres­sées, plan­tées ver­ti­ca­le­ment, comme les men­hirs méga­li­thiques, ou plus géné­ra­le­ment, les pierres indi­vi­duelles qui font par­tie d’une struc­ture méga­li­thique plus grande, comme les murs des allées cou­vertes ou les com­po­sants ver­ti­caux des tri­lithes, comme à Stonehenge.

Scène de chasse au lion, ortho­state du palais de Ninive repré­sen­tant Assurbanipal,
conser­vée au Bri­tish Museum

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Les visages de San­xing­dui (三星堆)

Dans les années 20, un pay­san découvre un bel objet de jade en labou­rant son champ. Puis, plus rien. Ce n’est qu’en 1986 que deux fosses ont été décou­vertes dans la pro­vince de Sichuan à proxi­mi­té du champ, dans la ville de Guan­ghan, sur le site de San­xing­dui. Les objets qui y furent trou­vés ont per­mis de dater que cette culture remonte à une période allant de 2800 à 800 av. J.-C., soit une période de 2000 ans, mais sa pré­sence a posé énor­mé­ment de pro­blèmes aux archéo­logues dans le sens où, contem­po­raine de l’âge de bronze de la dynas­tie des Shang, elle pré­sen­tait une manière tout à fait dis­tan­ciée d’abs­trac­tion par rap­port à ce qui était connu alors. Ce fait est d’au­tant plus étrange que dans les textes, il n’est fait men­tion nulle part de cette culture qui en outre, a dis­pa­ru brus­que­ment en enfouis­sant tous ses bronzes et ses objets rituels en très peu de temps, et sur des lieux très concen­trés. Ce qui est d’au­tant plus trou­blant, c’est qu’ayant côtoyé pen­dant quelques siècles la culture de la dynas­tie Shang, dis­tante de quelques cen­taines de kilo­mètres, celle-ci ne soit pas nour­rie des tech­niques de la fonte du bronze, qu’ils maî­tri­saient par­fai­te­ment dans la finesse des détails, mais dans de moindres pro­por­tions que dans cette culture de San­xing­dui puisque les plus grosses pièces trou­vées font près de 180 kg, ce qui néces­site des quan­ti­tés consi­dé­rables de mine­rai. Les plus grands masques retrou­vés sont colos­saux et indiquent que la tech­nique de la fonte était hau­te­ment maî­tri­sée pour une époque aus­si loin­taine. En com­pa­rai­son avec l’oc­ci­dent, une telle tech­nique n’est maî­tri­sée que lors de l’âge clas­sique grec. Le site sur lequel furent décou­vert ces objets a fini par être déli­mi­té en 1996 lors­qu’on trou­va les restes d’une enceinte encer­clant une ville de 12km², ce qui en fait la plus grande ville de l’A­sie antique. (more…)

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Le masque tao­tie (tao tie wen)

Masque taotie sur la couverte d'un ding en bronze de la dynastie Shang

Le masque tao­tie a cette par­ti­cu­la­ri­té de se confondre avec la déco­ra­tion de cer­tains types de réci­pients, notam­ment les ding, des tri­podes mas­sifs ori­gi­nel­le­ment en céra­mique mais géné­ra­le­ment en bronze cen­sés recueillir les offrandes et pla­cés à l’en­trée des temples, équi­pés de deux poi­gnées oppo­sées. La dis­cré­tion de ces déco­ra­tions per­met d’ap­por­ter une symé­trie douce et de creu­ser des figures en bas-relief, plus facile à figu­rer sur des objets en bronze. On retrouve la plu­part du temps ces motifs enchâs­sés au creux de spi­rales car­rées et de cro­chets enrou­lés. (more…)

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La tigresse (vase You de la dynas­tie Shang)

De la dynas­tie des Shang 商朝 (ou Yin) s’é­ten­dant du XVIIIè au XIè siècle avant Jésus-Christ nous est par­ve­nue cette tigresse, carac­té­ris­tique de l’âge du bronze chi­nois ; elle mesure 32 cm de haut et repré­sente une féline pos­tée sur ses pattes arrière et sa queue, tenant dans son giron une sil­houette humaine, la gueule ouverte ren­fer­mant la tête. Le décor recou­vrant cet objet de déco­ra­tion riche des­ti­né à rece­voir des bois­sons fer­men­tées est par­ti­cu­liè­re­ment fin et recher­ché, se confon­dant en volutes car­rées et a pour par­ti­cu­la­ri­té d’être cou­vert de repré­sen­ta­tions animalières.
Cette tigresse, sous son aspect pro­tec­teur, serait en fait rela­tive à une légende selon laquelle Ziwen, petit-fils de Ruoao, aurait été recueilli bébé par une tigresse qui l’au­rait éle­vé. On retrouve trace de ce récit dans les Annales des Prin­temps et des Automnes (春秋 Chūn Qiū) com­men­té dans le com­men­taire de Zuo (左傳). L’in­ter­pré­ta­tion du sacri­fice rituel ou du rite cha­ma­nique n’est pas à exclure, même si l’at­ti­tude du per­son­nage laisse trans­pa­raitre une cer­taine sérénité.

Pho­to © Sté­phane Piera /
Musée Cer­nu­schi / Roger-Viollet

Le car­tel de la tigresse sur le site du Musée Cernuschi.

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Les Dieux qui entendent

Cette plaque tout à fait éton­nante en marbre blanc retrou­vée au Séra­peion de Thes­sa­lo­nique et datant du Ier siècle av. J.-C. est en réa­li­té une plaque votive ou ex-voto, don­née en remer­cie­ment d’un acte mira­cu­leux ou d’une béné­dic­tion. Une oreille gauche et deux oreilles droites, lar­ge­ment dif­fé­ren­ciées, sont sculp­tées en haut-relief et sym­bo­lisent l’ir­rup­tion du sacré dans la réa­li­té (épi­pha­nie) en la per­sonne des trois dieux véné­rés à Thes­sa­lo­nique et récu­pé­rés de la mytho­lo­gie égyp­tienne ; Isis, Séra­pis et Har­po­crate (forme tar­dive d’Ho­rus enfant). Ces oreilles sont l’ex­pres­sion des dieux qui « entendent » les prières des fidèles, Theoi epè­kooi (Θεοι επηκοοι) et exaucent leurs sou­haits. Un très bel objet qui n’est pas sans rap­pe­ler le sym­bo­lisme fort des piliers her­maïques, et qui a été expo­sé lors de l’ex­po­si­tion Alexandre le Grand et la Macé­doine antique au Louvre.

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