Jan 19, 2013 | Arts |

Sur la lagune de Venise se trouve une petite île que personne ne va visiter parce que ce n’est qu’un endroit périphérique des grands parcours touristiques. Pourtant, on connait son nom, ou tout au moins on en a déjà entendu parler : Torcello. La particularité des îles qui composent l’archipel de Venise c’est de n’être pas tellement plus haut que le niveau de la mer qui vient lui lécher les pieds et c’est alors ce qu’on voit tous les ans (ou deux fois par an, puisque cela arrive au moment des équinoxes) aux journaux télévisés comme une ritournelle, l’acqua alta. Les Italiens ont un don pour nommer les choses de la manière la plus simple qui soit. Quand l’eau monte, l’eau devient haute… C’est tout.
De cette petite île, Torcello, dépasse un campanile carré surplombant une cathédrale dont on se demande finalement ce qu’elle fait là puisque l’île n’abrite plus que quelques habitants, tandis qu’au Xème siècle elle voyait sa population s’élever à plus de 10 000 habitants. La façade de ce bâtiment révèle qu’il date de la période romane, et même, puisque nous sommes en Italie, de la période byzantine si l’on en croit l’inscription qui fait remonter son origine à 639. A l’intérieur se trouve le cul-de-four de l’abside, une demi-couple décorée d’une mosaïque absolument somptueuse datant du XIIè-XIIè siècle, parée d’or, représentant dans un espace assez grand la Vierge à l’enfant (Theotokos, mère de Dieu, et Odigitria, qui montre la direction) entourée du monogramme qui est le sien (MP ΘY). La figure de la Vierge est surplombé par une Annonciation au-dessus du cul-de-four, l’Ange Gabriel à gauche, la Vierge à droite. Sous les pieds de la Vierge, les douze apôtres marchant sur un parterre de coquelicots. Comme toutes les fleurs rouges, celle-ci en particulier est symbole du sang du Christ versé pour les hommes.
Dans la cathédrale se trouvent d’autres mosaïques très belles, finement exécutées, notamment celle du Jugement Dernier, mais celle-ci a la charme de sa taille, impressionnante et tend à nous faire savoir si on l’avait oublié que l’histoire de Venise a de tout temps été tournée vers l’Orient et se place sur le même plan que de l’art de Byzance. Promenez-vous dans Venise et vous verrez que nous sommes aux portes de Constantinople…
Pour en savoir plus : Les peintres de Venise, Enrico Maria dal Pozzolo, Actes Sud.
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Jan 5, 2013 | Arts |

Pour quelques jours encore, Raphaël est au Louvre, le Raphaël des dernières années. Finalement, c’est un Raphaël d’atelier plus qu’un Raphaël intimiste, en partie parce que le peintre connaît un succès d’estime incomparable et qu’il doit honorer nombre de ses commandes, mais tout est là, la composition, le traitement de la lumière, l’audace des postures… Les plus grands représentants de son atelier sont en bonne place ; on verra ainsi Giulio Romano (Giulio di Pietro de’ Gianuzzi), l’ami cher et Giovan Francesco Penni, le disciple, avec des œuvres hautement significatives. (more…)
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Jan 3, 2013 | Arts |
Voici une exposition qui mérite le détour, Les Couleurs du Ciel, si toutefois vous êtes déjà allés voir Raphaël au Louvre (ce qui n’est pas encore mon cas), Canaletto et Guardi (Musée Jacquemart-André), et Canaletto (Musée Maillol) et que je ne serai pas allé voir si mon attaché de presse officiel ne m’avait pas fait de grands signes en me disant qu’il ne fallait pas manquer ça. Effectivement, cette exposition qui se niche au creux du petit musée Carnavalet (je tiens à dire que l’agent de sécurité est particulièrement aimable et souriant) montre une centaine de tableaux exposés d’ordinaire dans des églises et dessins préparatoires qui pour une fois se retrouvent regroupées sous les lumières (parfois un peu mal ajustées sur certaines toiles dont le vernis est un peu brillant, mais ça passe) d’un musée.

Claude Vignon — L’adoration des mages (1625)
Paris, église de Saint-Gervais-saint-Protais
Photo © Coarc
Si l’on peut se montrer parfois un peu circonspect quant à la réelle beauté de certaines églises parisiennes datant précisément de cette époque et dont l’architecture aussi bien intérieure qu’extérieure est parfois un peu massive, un peu lourde (je pense notamment à Saint-Nicolas du Chardonnet, ou Saint-Roch) on y trouve des petits trésors qu’on ne pense pas forcément à regarder, le regard était généralement plus attiré par les ors des autels, les colonnes effilées, un plafond peint à fresque ou des orgues majestueuses que par ce qui se cache dans les niches souvent obscures ou les chapelles absidiales.

Charles Poerson — Annonciation (1651–52)
Paris, Cathédrale Notre-Dame
Ce que vous avez ici vous réconciliera avec la peinture d’église et vous incitera certainement à plus regarder cette iconographie, forcément très religieuse, qui sont généralement des peintures prévues pour occuper l’espace qui leur est dédié. Les sujets racontent des histoires de catéchisme de l’Ancien Testament comme du Nouveau (j’ai rarement vu Abraham et Melchisédech autant de fois dans un seul endroit). Les peintres représentés ici sont ceux qui précisément ont marqué une époque de la peinture française, à une période précise où celle-ci progresse à vive allure, propulsée par la connaissance de certains d’entre eux de la peinture italienne. On retrouvera ainsi Charles Le Brun, Noël Coypel, Philippe et Jean-Baptiste de Champaigne, Claude Vignon et bien sûr Simon Vouet, mais bien d’autres aussi qu’on a un peu moins l’habitude de voir et dont les travaux sont tout à fait dignes d’intérêt, comme Charles Poerson et d’autres.
Parmi les œuvres qui ont le plus attiré mon attention :
- Claude Vignon, L’adoration des mages (1625). Paris, église de Saint-Gervais-saint-Protais.
- Simon Vouet, Quatre saints adorant le nom de Dieu: Saint Pierre, Saint Jérôme, Saint Merri et Saint Frodulphe (1645). Paris, église de Saint-Merri.
- Nicolas Poussin, Saint Denis l’Aréopagite couronné par un ange (1620–1621). Paris, église Saint-Germain-l’Auxerrois.
- Charles Le Brun, La flagellation. Paris, église Saint-Bernard-de-la-Chapelle. Un tableau terrible où l’on voit les yeux du Christ révulsés de douleur.
- Charles Poerson, L’annonciation (1651–52). Anciennement dans la cathédrale Notre-Dame, aujourd’hui au musée des Beaux-Arts d’Arras.
Une exposition rare et incontournable qui se poursuit jusqu’au 24 février 2013.
Pour en savoir plus, le catalogue de l’exposition : Sous la direction de Guillaume Kazerouni, Les couleurs du ciel. Peintures des églises de Paris au XVIIe siècle, 2012, Paris Musées, 375 p., 49 €.
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Jan 2, 2013 | Arts |
A l’heure où les gelées reviennent, où la lumière a du mal à percer la couche laiteuse des nuages voilant un soleil qui peine à monter dans le ciel,
voici un autre artiste de la lumière originaire de Saint-Pétersbourg.
Nikolay Nikanorovich Dubovskoy est un peintre paysagiste remarquable, exploitant la lumière naturelle des paysages qu’il peint pour en faire une peinture feutrée, haute en couleurs évocatrices, s’attachant à restituer ces ambiances extrêmes que la nature s’amuse à engendrer. Très peu de scènes de genre chez lui, et clairement dans sa carrière se dessinent deux périodes. La première, très lisse, très lumineuse et la seconde, avec un parti pris beaucoup plus pictural, plus granuleux, pour une peinture plus sensible, mais aussi peut-être un peu moins grandiose. La peinture qui le rendra célèbre s’appelle un havre de paix et date de 1890 ; c’est une très belle toile dont la belle lumière blanche d’un nuage se reflète dans une eau argentée.
Assurément un nom qui compte dans la peinture de paysage, un artiste à découvrir avec ces seize toiles très belles toiles. (more…)
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Dec 28, 2012 | Arts |

Portrait d’Arkhip Ivanovich Kuindzhi par Ivan Nikolaïevitch Kramskoï — 1870
Arkhip Ivanovich Kuindzhi est né pauvre en 1841 dans la campagne ukrainienne, à Marioupol, dans une famille d’origine grecque-pontine, c’est-à-dire originaire des bords de la Mer Noire. Il acquit une notoriété croissante dans les années 1880 et se refusa à exposer publiquement à partir de 1882. Il finit sa vie dans la bourgeoisie de Saint-Petersbourg où il professait à l’Académie Impériale des Beaux Arts.
Sa peinture paysagiste est colorée et riche, montrant une véritable maîtrise de la lumière exprimant les heures les plus belles du jour mais aussi de la nuit, les ambiances naturelles les plus incroyables, dans une sorte de jouissance picturale réellement exaltée. Ses études de l’Elbrouz ou de ses paysages enneigées sont des véritables tours de force de la peinture. Ses nuages, ses paysages marins et ses compositions parfois dépouillées à l’extrême sont à l’opposé de la peinture romantique et tourmentée d’un Caspar David Friedrich ; les paysages de clair de lune et nocturnes sont de toute beauté et respirent la quiétude. Tout dans sa peinture est un hymne au silence et à la tranquillité de la nature.
Ci-dessous, une galerie de 87 de ses plus belles peintures. (more…)
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