Lucidité et simplicité dans les mots de James Lee Burke lorsqu’il parle de ses compatriotes, en quelques mots seulement alors qu’il aura fallu plusieurs tomes d’écriture et de torture à William T. Vollmann dans son livre des violences.
Nous achetâmes un paquet de crevettes grillées et deux cartons de gros riz brun, que nous mangeâmes dans un petit jardin public ombragé aux abords de Napoleon Avenue. Un groupe de gamins, blancs, noirs et chicanos s’échauffaient au base-ball devant un vieux filet d’arrêt en grillage à poules. C’était des enfants d’ouvriers, de petits durs qui s’engageaient physiquement dans la partie, avec énergie et allant, sans retenue ni souci des conséquences. Le lanceur envoyait des balles mouillées de salive et des boulets de canon pleine tête, les coureurs cassaient toute tentative de virer deux joueurs des coudes et des genoux à chaque base, et ils se laissaient glisser, tête en avant, emportés par l’élan, s’éraflant la figure au passage ; le receveur volait la balle à main nue sous le nez du batteur en plein swing ; et le joueur de troisième base se plaçait tellement près qu’un retour en ligne droite risquait de lui arracher la tête des épaules. Je songeai qu’il n’était pas surprenant que les étrangers à notre pays soient impressionnés par l’innocence et la naïveté de l’agressivité américaine.
James Lee Burke, La pluie de néon
Payot et Rivages, 1996
Et moi de mon côté, je continue mon été avec Dave Robicheaux.
Photo d’en-tête © Neorelativista
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