Il est sorti comme ça, tout discrètement, une semaine où les navets étaient à l’honneur, et c’est à peine si on en a entendu parler. Isao Takahata vient de sortir son dernier film en France, Le conte de la princesse Kaguya (Kaguya-hime). Contrairement à ses précédents films, celui-ci n’est pas une animation colorée dans le droit style du studio Ghibli comme on a pu le voir dans Pompoko par exemple, un de ses films les plus colorés, à la fois engagé et très traditionaliste, mais un chef‑d’œuvre épuré à l’extrême ; tout ici est dessiné au fusain, image par image et coloré au pastel, puis monté dans une volonté claire de faire au plus simple. Les habitués des animations Ghibli y perdront peut-être leur latin, mais ce qui en ressort est un film qui finalement s’affranchit vraiment du conte pour enfant et reste cruel comme savent l’être les contes traditionnels japonais.
Un coupeur de bambou trouve un jour dans la bambouseraie du village, une toute petite fille à l’intérieur d’une grosse pousse. Il la recueille et très vite elle grandit, beaucoup plus rapidement qu’une petite fille normale, et son père adoptif, convaincu que cette fillette lui a été envoyée pour qu’il en fasse une princesse, va l’extraire de sa pauvreté et du village dans lequel elle grandit pour qu’elle devienne la plus grande princesse de la cour. A l’aide d’or et de tissus qu’il trouve également dans la bambouseraie, il va la faire se parer des plus beaux atours du Japon afin qu’elle puisse trouver le plus beau parti de la région. Seulement, la jeune fille reste une petite fille de la campagne et elle ne songe qu’à s’amuser et à courir en tous sens. Devant la pression de son père, elle finira par abdiquer et à faire ce qu’on attend d’elle.
Dans ce film un peu long (ce qui me fait dire aussi que 2h17 c’est un peu long pour une animation pour des enfants), on est finalement assez troublé de voir à quel point cette jeune fille aux pouvoirs surnaturels résiste dans un premier temps, abdique ensuite, pour finalement se rendre compte que son attitude désinvolte n’a fait que semer le trouble et la mort autour d’elle. Pourtant, il est impossible de lui reprocher quoi que ce soit, tant elle est belle et mutine. Celle qui deviendra la princesse Kaguya finira par refuser la mission qui était la sienne et ne pourra faire autrement que de retourner de là où elle vient.
Loin de la farce burlesque de Pompoko ou du tragique allégorique du Tombeau des lucioles, ce film reste comme une perle fine, dont le dessin emporté est comme un pied-de-nez à la haute technologie utilisée en dépit du bon sens. Un très beau film qui nécessite une écoute silencieuse.
Une version du conte du Coupeur de bambou.
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Grâce à toi j’ai très envie de découvrir ce film qui semble poétique et tout en finesse , merci pour le post 🙂
Un vraiment bon moment et une belle histoire japonaise 🙂