Churchill, Roosevelt et Staline

Au cours du dîner, le 29 novembre (1943), Sta­line sug­gé­ra au pas­sage que si, à la fin de la guerre, on raflait et liqui­dait quelques cin­quante mille chefs des forces armées alle­mandes, c’en serait fini une fois pour toutes de la puis­sance mili­taire de l’Al­le­magne. Chur­chill fut inter­lo­qué par l’am­pleur des liqui­da­tions envi­sa­gées par Sta­line. Il répon­dit sim­ple­ment que le par­le­ment et l’o­pi­nion n’ac­cep­te­raient jamais de telles exé­cu­tions mas­sives. Mais Roo­se­velt répon­dit plus cha­leu­reu­se­ment à Sta­line et, voyant Chur­chill contra­rié (tel était du moins le sou­ve­nir de ce der­nier), le pré­sident amé­ri­cain ajou­ta que les Alliés devraient en exé­cu­ter non pas cin­quante mille, mais « juste qua­rante-neuf mille ». […] La dérive de cette conver­sa­tion inquié­ta si bien Chur­chill qu’il quit­ta la salle, mais un Sta­line jovial lui cou­rut après et pro­tes­ta que, bien enten­du, ce n’é­tait qu’une plaisanterie.

1943, Confé­rence de Téhé­ran, les trois lar­rons de Yal­ta se retrouvent pour par­ler de l’a­près-guerre, quand tout sera ter­mi­né. Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’am­biance est déten­due, mais der­rière la plai­san­te­rie, peut-on être cer­tain qu’il n’y avait pas un fond de véri­té, quand on sait que Sta­line avait déjà fait exé­cu­ter des sol­dats et des offi­ciers russes accu­sés de couar­dise face à l’en­ne­mi. Niki­ta Khroucht­chev lui-même, alors géné­ral de l’ar­mée, fit exé­cu­ter plus de 15.000 de ses propres sol­dats sur le front.

in Les entre­tiens de Nurem­berg, Leon Goldensohn
Intro­duc­tion et pré­sen­ta­tion de Robert Gellatelly
Champs Flam­ma­rion Histoire

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