Une nou­velle plon­gée dans mon quo­ti­dien, un quo­ti­dien qui fait peur, plein de fan­tômes et de visions exta­tiques à l’in­té­rieur des églises, de pleurs et de sou­rires. Je suis un grand roman­tique soli­taire. La vie n’est pas si laide que ça, non ?

Same­di 01–02

La semaine pro­chaine pro­met d’être plus calme que la pré­cé­dente. Comme tous les same­dis, je me lève tôt, tout sim­ple­ment parce que j’en ai pris l’ha­bi­tude, pas de réveil ; je garde un rythme naturel.
Lors de mon pro­chain voyage, je vais me retrou­ver dans un pays qui vit avec le soleil, où la vie com­mence à six heures du matin, où le soleil se couche à six heures du soir et où l’on éteint les lumières à 22h00.
Je suis allé cher­cher mon per­mis de conduire inter­na­tio­nal à la pré­fec­ture hier, après deux heures de queue inter­mi­nable. C’est fou tous ces gens qui viennent cher­cher leur per­mis ici , ce sont autant de gens qui l’ont per­du à un moment don­né et qui l’ont donc repas­sé. Autre­fois, il n’y avait que ceux qui venaient de l’a­voir. Les temps sont vrai­ment bizarres…

Il y a quelques jours, je cher­chais une pho­to de classe sur laquelle je pou­vais appa­raître dans les innom­brables tas de pho­tos qu’on peut trou­ver sur inter­net, sur les sites d’an­ciens cama­rades et autres petites per­ver­si­tés dans ce genre et j’ai eu un choc, un vrai gros choc. J’ai retrou­vé une pho­to d’une classe de ter­mi­nale en 1993 sur laquelle j’ai recon­nu un visage. Pas n’im­porte quel visage, le visage d’un démon dégui­sé en ange. J’ai connu cette fille en man­teau vert qui pose d’un air très décon­trac­té, très natu­rel, parce qu’en réa­li­té cette fille était l’in­car­na­tion de quelque chose de hau­te­ment raf­fi­né, quelque chose que j’ai­mais dans son regard clair et son visage inno­cent, en appa­rence. Der­rière ces appa­rences brû­lait le feu de la passion.

Julie

Lycée Romain Rol­land — Argen­teuil — Ter­mi­nale A1 — 1993

Je suis impres­sion­né de voir à quel point cette pho­to est fidèle à la réa­li­té de l’é­poque. Qu’est-elle deve­nue ? Je n’en sais fran­che­ment rien et je crois que je n’ai pas tel­le­ment envie de savoir. Cette jeune fille est asso­ciée dans mon sou­ve­nir à la ville de Flo­rence, parce que nous nous sommes retrou­vés tous les deux au même endroit, la même année. Cette pho­to a été prise un an après. Aujourd’­hui, si mes cal­culs sont bons, elle devrait avoir 38 ans. Et elle devrait tou­jours s’ap­pe­ler Julie.
Je ne sais pas pour­quoi, mais pen­ser à elle me rend nostalgique.

[audio:ezan.xol]

Ezan (1′53″) — The music of islam (volume 10) 
Qur’ân reci­ta­tion, Istanbul

Aujourd’­hui je me trans­porte à İst­anb­ul, pour écou­ter l’ezan, tout en m’oc­cu­pant de mes pho­tos du 19 août 2012 prises entre Çavuşin et Ava­nos, jus­qu’en des lieux que je ne pen­sais pas pou­voir exis­ter sur terre. Ce soir là souf­flait le vent mys­tique qui m’a empor­té à tout jamais.

Hier soir, j’ai regar­dé à nou­veau The place beyond the pines que j’ai eu la chance de voir dans l’a­vion pour la Thaï­lande. C’est un des plus beaux films qu’il m’ait été don­né de voir ces der­nières années. Si je suis capable de par­ler avec pro­fu­sion d’un livre ou d’un tableau, je suis bien inca­pable de le faire avec un film, je ne sais pas bien pour­quoi. La semaine der­nière j’ai regar­dé La Taupe avec Gary Old­man ; je ne sais pas si c’est parce que je n’é­tais pas concen­tré ou quoi, mais je n’ai abso­lu­ment rien com­pris. Du début à la fin.

Défi­ni­ti­ve­ment, je pense que ma capa­ci­té à me révol­ter ne fonc­tionne qu’à retar­de­ment, avec de la maturation.

Fugue de Nénin - Pomerol 2009J’ai retou­ché plus de 200 pho­tos dans la jour­née, fait une sieste de deux heures, ache­té une bou­teille de Pome­rol 2009 (une fugue, Châ­teau Nénin, cépages Caber­net franc et Mer­lot), un vin com­plexe et intense, très boi­sé, que je vais boire avec un Pont-l’É­vêque, parce que je sais vivre, bordel !
Le Pont-l’É­vêque est le seul fro­mage qui mérite un aus­si bon vin !

Dimanche 02–02

Il va quand-même bien fal­loir qu’un jour je ter­mine ce car­net de voyage en Tur­quie qui remonte main­te­nant à l’é­té 2012. Voi­ci bien­tôt un an et demi que je suis reve­nu et je n’ai tou­jours pas clos ce cha­pitre. C’est dire tout de même à quel point ces choses-là vivent encore en moi. Le plus dur est de retrou­ver les noms, mais en me plon­geant dans les pho­tos, en regar­dant les indi­ca­tions que je prends en pho­to quand je ne note pas, je finis par remettre un nom sur un lieu. Mes noms de pho­tos sont pleins de mots turcs, je pré­fère les ori­gi­naux aux copies, parce qu’en plus c’est tout de suite plus facile pour deman­der son che­min quand on est sur place. Par­fois on se laisse sur­prendre par des lieux qui sur­gissent devant nous sans qu’on n’ait rien deman­dé à per­sonne et par­fois, ils n’existent dans aucun guide et c’est tout juste si on peut se repé­rer sur une carte. Je suis cer­tain que par­fois, les locaux doivent se dire « de toute façon, que veux-tu que les tou­ristes viennent faire dans ce coin per­du ? du coup pas besoin de refaire la route, on va lais­ser comme ça… »

Mustafapaşa - Vallée des églises de Sarıca - Turquie - août 2012

Mus­ta­fa­paşa — Val­lée des églises de Sarı­ca — Tur­quie — août 2012

Je revis par­fai­te­ment clai­re­ment ces ins­tants pas­sés un peu rapi­de­ment à Mus­ta­fa­paşa, notam­ment dans la Val­lée des églises de Sinas­sos (Sina­sos Vadi­si), décou­verte parce que j’a­vais envie de sor­tir du che­min bali­sé par les pan­neaux, là où per­sonne ne va, ou encore de la val­lée des églises de Sarı­ca (pro­non­cer sareud­ja) — je dis bien LES églises car si on se contente de regar­der du côté indi­qué par les pan­neaux, on ne rend même pas compte qu’il y a aus­si des églises dans la val­lée. Je pense aus­si au petit che­min impos­sible, sur une crête rocheuse, qui va jus­qu’à l’é­glise de Pan­carlık (pro­non­cer pand­jar­leuk). Il y a tant encore à racon­ter. Dans peu de temps d’ailleurs pour cette par­tie-là de mon voyage.

Tranches de pain grillées, beur­rées et confi­ture de poires, au soleil chaud, tan­dis que dehors fondent dou­ce­ment les petites couches de glace qui se sont dépo­sées sur les pare-brises.

Dix-huit heures de vol, je ne compte pas l’es­cale, plus six heures de déca­lage horaire, voi­là ce que je vais me prendre dans la figure. Il ne fau­dra pas comp­ter sur ces vacances pour se repo­ser, on ver­ra ça plus tard.

Après-midi abso­lu­ment pas pro­duc­tive. Un coup de barre après déjeu­ner et j’ai embras­sé mon oreiller pen­dant deux heures, entor­tillé dans un plaid doux comme l’en­fer ; ma coupe de che­veux tra­hit mon for­fait. N’im­porte qui pour­rait voir ce qui m’est arri­vé. Je me suis fait un thé par­fu­mé que j’ai bu brû­lant, j’ai pré­pa­ré de la pâte à crêpes (deux accents cir­con­flexes) et j’ai lar­vé. Est-ce que par hasard les week-end ne ser­vi­raient pas à ça ?

[audio:pulses.xol]

Voca­bu­laire du jour :

  • hiç : aucun
  • uzak : loin
  • ama : mais
  • ile : avec, post­po­si­tion, règle d’har­mo­nie vocalique
  • lazım : néces­saire, il faut
  • yor­gun : fati­gué, yor­gu­num : je suis fatigué
  • şu anda : en ce moment
  • şim­di : voilà
  • git­mek : aller
  • gel­mek : venir
  • kadar : jusqu’à
  • nazik : aimable
  • Bu et şu : le deuxième exprime quelque chose de plus loin­tain que le premier