L’ombre du monde
Il faut choiÂsir son camp : ĂŞtre du cĂ´tĂ© de ceux qui subissent ou du cĂ´tĂ© de ceux qui s’emparent du monde et si on est dans le camp des seconds, rien ne nous empĂŞche de parÂfois nous laisÂser porÂter par le chant du monde en imaÂgiÂnant qu’on puisse parÂfaiÂteÂment, pour une fois, baisÂser la garde et se laisÂser hapÂper. Dans mon cas, je me laisse totaÂleÂment lamiÂner, car c’est un bien, une nĂ©cesÂsiÂtĂ©. Il fauÂdra pour rĂ©paÂrer se laisÂser la posÂsiÂbiÂliÂtĂ© de repartir.
TopÂkapı Sarayı MĂĽzeÂsi, Harem
mai 2013
Autant dire tout de suite que si j’aÂvais pas mal prĂ©ÂpaÂrĂ© ce voyage, je me suis confronÂtĂ© Ă des imprĂ©Âvus, des mauÂvais mais surÂtout des bons et le proÂgramme auquel, avec une cerÂtaine disÂciÂpline, je m’éÂtais proÂmis de ne pas dĂ©roÂger n’a pas Ă©tĂ© du tout resÂpecÂtĂ©. Que ce soit en CapÂpaÂdoce ou Ă Ä°stÂanbÂul, je me suis laisÂsĂ© entourÂlouÂpĂ© par les gens, par la ville, les odeurs et les lieux, je n’ai presque rien fait de ce que j’aÂvais prĂ©Âvu et cette fois en parÂtiÂcuÂlier, j’ai pasÂsĂ© beauÂcoup plus de temps avec les gens qu’à voir des monuÂments ou des sites naturels.
ParÂdon Ă ceux Ă qui j’aÂvais dit que j’éÂcriÂrai, mais disons que toute la chaine qui perÂmet d’enÂvoyer des cartes posÂtales est un peu trop comÂpliÂquĂ©e Ă mon goĂ»t ; cartes posÂtales laides et rares, peu d’enÂdroits (Ă part la poste) pour acheÂter des timbres, pas de boĂ®tes Ă lettres dans la rue et nĂ©cesÂsiÂtĂ© de se contraindre Ă se dĂ©plaÂcer jusÂqu’à l’uÂnique poste penÂdant ses horaires d’ouÂverÂture. Trop de paraÂmètres, selon moi. DĂ©soÂlĂ©, mais j’aÂvais un monde Ă explorer…
A prĂ©Âsent, me voiÂci de retour, avec des mines d’or Ă l’inÂtĂ©Ârieur, la peau lĂ©gèÂreÂment bronÂzĂ©e par un soleil qui a vouÂlu se faire disÂcret Ă Ä°stÂanbÂul, les pieds fatiÂguĂ©s, une petite sciaÂtique accroÂchĂ©e Ă la fesse gauche, des valises pleines de cochonÂneÂries Ă manÂger et de bibeÂlots et plus que tout, une belle et saine fatigue qui va nĂ©cesÂsiÂter quelques jours de traÂvail pour que tout se remette dans l’ordre.
Peu importent les babioles qu’on ramène, peu importent les phoÂtos qu’on peut prendre par milÂliers, car ce qui est le plus imporÂtant Ă rameÂner, c’est le souÂrire des gens qu’on renÂcontre, quelques minutes de bonÂheur pasÂsĂ©es avec des inconÂnus dans la rue, les embrasÂsades et les larmes du dĂ©part, et surÂtout la senÂsaÂtion incomÂpaÂrable d’aÂvoir — enfin — pu trouÂver dans le monde sa deuxième maiÂson, un endroit oĂą laisÂser son cĹ“ur, un endroit oĂą comÂmence un deuxième monde connu.
AusÂsi, en temps vouÂlu, je vous parÂleÂrai d’Ümit, de Moris, d’Ömer, de Nihat, de BiĹźra, de FatoĹź et Bukem, un peu moins de SoliÂman et de SerÂkan qui sont des escrocs, mais surÂtout de MehÂmet, d’Emin, de SumÂru et de Sıtkı.
PS : j’apÂprends Ă l’insÂtant qu’un nouÂvel attenÂtat a frapÂpĂ© le sud de la TurÂquie, Ă ReyÂhanÂli, prĂ©ÂciÂsĂ©Âment dans la rĂ©gion d’oĂą est oriÂgiÂnaire Sıtkı.
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