Le chant d’Ul­li­kum­mi, la pierre de Rome et Armil­lus, l’Antéchrist

Le chant d’Ul­li­kum­mi, la pierre de Rome et Armil­lus, l’Antéchrist

Le clergé catholique au service de l’Antéchrist (« Unterscheid zwischen der waren Religion Christi und falschen Abgöttischenlehr des Antichrists in den fürnemsten Stücken ») Gravure sur bois en deux parties de Lucas Cranach l’Ancien (1472 – 1553), 1ère moitié du XVIe siècle (reproduit dans : The German Single-Leaf Woodcut : 1550 – 1600, ed. Max Geisberg, New-York, 1974, vol. 2, p. 619)

Le cler­gé catho­lique au ser­vice de l’Antéchrist (« Unter­scheid zwi­schen der waren Reli­gion Chris­ti und fal­schen Abgöt­ti­schen­lehr des Anti­christs in den für­nem­sten Stü­cken »)
Gra­vure sur bois en deux par­ties de Lucas Cra­nach l’Ancien (1472 – 1553), 1ère moi­tié du XVIe siècle (repro­duit dans : The Ger­man Single-Leaf Wood­cut : 1550 – 1600, ed. Max Geis­berg, New-York, 1974, vol. 2, p. 619)

J’ai trou­vé dans le livre de Fatih Cimok (Ana­to­lie Biblique, de la Genèse aux Conciles) une légende fai­sant appel à la fois au Déluge, aux peuples Hour­rites et à un des mythes de la Bible les plus inquié­tant ; celui de l’Antéchrist.
Dans la légende du Déluge, que ce soit celui des Chré­tiens ou celui dont j’ai déjà par­lé lors­qu’il était ques­tion du Mont Ara­rat, il est ques­tion au tra­vers de cette épi­pha­nie d’un moment de puri­fi­ca­tion du mal sur Terre par l’eau, ce que l’on peut tra­duire dans une cer­taine mesure comme une méta­phore à une dif­fé­rente échelle du bap­tême. Mais après le déluge ? Non, il n’est pas ques­tion ici de l’a­pho­risme de Madame de Pom­pa­dour, « Après moi, le déluge… » mais bel et bien de ce qui s’est pas­sé après que la Terre fut enva­hie par l’eau, que Noé se retrou­va per­ché sur Ara­rat et qu’il repeu­pla la terre par sa pro­gé­ni­ture (Table des Nations) en la per­sonne de ses fils, Sem, Cham et Japhet et de leurs enfants.

Monstres nés du Déluge, Chroniques de Nuremberg, 1493

Dans les croyances popu­laires, des monstres sont nés du déluge, comme en témoignent les Chro­niques de Nurem­berg écrites en 1493 par l’hu­ma­niste Hart­mann Sche­del. Il est d’autre part ques­tion dans l’An­cien Tes­ta­ment, d’un pas­sage peu connu (l’An­cien Tes­ta­ment est de toute façon trop peu connu, les Chré­tiens pré­fé­rant s’ex­ta­sier sur la vie par­faite et tra­gique du Christ) du Livre des Nombres. Dans ce livre, il est ques­tion d’une race de géants appe­lés les Nephi­lim (הנּפלים: géant) :

27 Voi­ci ce qu’ils [les chefs des douze tri­bus envoyés par Moïse en mis­sion de repé­rage] racon­tèrent à Moïse : « Nous sommes allés dans le pays où tu nous as envoyés. À la véri­té, c’est un pays où coulent le lait et le miel, et en voi­ci les fruits.
28 Mais le peuple qui habite ce pays est puis­sant, les villes sont for­ti­fiées, très grandes ; nous y avons vu des enfants d’Anak.
29 Les Ama­lé­cites habitent la contrée du midi ; les Héthiens, les Jébu­séens et les Amo­réens habitent la mon­tagne ; et les Cana­néens habitent près de la mer et le long du Jourdain. »
30 Caleb fit taire le peuple, qui mur­mu­rait contre Moïse. Il dit : « Mon­tons, empa­rons-nous du pays, nous y serons vainqueurs ! »
31 Mais les hommes qui y étaient allés avec lui dirent : « Nous ne pou­vons pas mon­ter contre ce peuple, car il est plus fort que nous. »
32 Et ils décrièrent devant les enfants d’Is­raël le pays qu’ils avaient explo­ré. Ils dirent : « Le pays que nous avons par­cou­ru, pour l’ex­plo­rer, est un pays qui dévore ses habi­tants ; tous ceux que nous y avons vus sont des hommes d’une haute taille ;
33 et nous y avons vu les nephi­lim, enfants d’A­nak, de la race des nephi­lim : nous étions à nos yeux et aux leurs comme des sauterelles.

Nombres, 13, 27–33

Albrecht Dürer - Révélation de Saint-Jean (12) Le monstre des mers et la Bête à cornes d'agneau

Albrecht Dürer — Révé­la­tion de Saint-Jean (12) Le monstre des mers et la Bête à cornes d’agneau

Les Nephi­lim, per­son­nages pour le moins mys­té­rieux ont été assi­mi­lés, dans cer­taines inter­pré­ta­tions, à des anges déchus, que le pas­sage du Déluge aurait eu pour mis­sion d’ex­ter­mi­ner en tant que tel. L’hé­breu nephel désigne qui celui qui tombe (ליפול). Dans cette ambiance inquié­tante appa­rait un per­son­nage qu’on retrouve dans nombres de récits éso­té­riques et escha­to­lo­giques, sou­vent inté­gré aux théo­ries com­plo­tistes ; l’Anté­christ. Ce per­son­nage est consi­dé­ré comme un double néfaste du Christ, ayant pour fonc­tion de détour­ner l’œuvre chris­tique et par son impos­ture d’in­flé­chir la marche de l’his­toire pour que celle-ci prenne un mau­vais tour­nant. Je me gar­de­rai bien ici de com­men­ter quoi que ce soit sur cette his­toire que les Chré­tiens connaissent à la lec­ture des Épîtres de Jean et qu’on retrouve aus­si dans la mytho­lo­gie juive sous le nom d’an­ti-mes­sie et dans les hadîth musul­mans sous le nom de Masih ad-Daj­jâl (le faux mes­sie). L’o­ri­gine de ce type de figure peut tou­jours paraître un peu obs­cure, mais il faut regar­der dans la longue his­toire de la reli­gion juive pour en retrou­ver des traces et c’est ici qu’in­ter­vient un autre per­son­nage ; Armi­lus ou Armil­lus, ארמילוס‎ (Armi­los) en hébreu. L’o­ri­gine de ce nom est incon­nue, bien qu’on en retrouve des traces dans le Sefer Zerub­ba­bel, dans l’Apo­ca­lypse du pseu­do-Méthode ain­si que dans le Midrash Vayo­sha où il appa­raît sous la forme d’un roi qui ver­ra son avè­ne­ment à la fin des temps. La plu­part des sources qui citent Armil­lus prennent leurs sources dans des textes méso­po­ta­miens ou syriaques, et pour cause, puis­qu’on sup­pose qu’il est un double d’une autre his­toire, plus ancienne encore et c’est dans cette niche qu’in­ter­vient le mythe de Teshup (Teshub) au sein du Chant d’Ul­li­ku­mi, un chant pro­ve­nant de la civi­li­sa­tion hit­tite (cen­trée sur l’A­na­to­lie), qui s’est elle-même réap­pro­prié une vieille légende hourrite. 

Le peuple des Hour­rites trouve son ori­gine deux mil­lé­naires av. J.-C. dans le bas­sin méso­po­ta­mien et par­lait une langue répu­tée être la plus ancienne langue indo-euro­péenne connue. C’est dans ce recoin de l’his­toire que prend forme la légende d’Ar­mil­lus auprès d’un per­son­nage nom­mé Teshup, roi des dieux du pan­théon hour­rite qui com­plote pour prendre la place de son père, le dieu Kumar­bi, dont le chant épo­nyme a été repris en par­tie par Hésiode dans sa Théo­go­nie. C’est dans cet acte de vou­loir prendre la place de entre le père et le fils bila­té­ra­le­ment que le paral­lèle se fait entre les deux légendes et se forge dans le temps jus­qu’à nos mythes fon­da­teurs au tra­vers d’un phé­no­mène étrange ; la sub­stan­tia­tion dans la pierre et la véné­ra­tion des pierres, comme on peut le voir dans les reli­gions anté-isla­miques. Voi­ci ce qu’en dit Fatih Cimok :

La légende escha­to­lo­gique juive de Armil­lus, l’An­té­christ semble avoir été ins­pi­rée par l’é­po­pée hour­rite du « Chant d’Ul­li­kum­mi ». Le sujet de ce mythe hour­rite est la ten­ta­tive du dieu de l’o­rage, Kumar­bi, de détrô­ner son fils Teshup, qui l’a­vait lui-même évin­cé. Kumar­bi fécon­da « le som­met d’une grande mon­tagne » qui enfan­ta Ulli­kum­mi, un monstre aveugle et sourd fait de dio­rite. Teshup grim­pa au som­met du mont Haz­zi, à l’embouchure de l’O­ronte pour obser­ver ce monstre de pierre pous­sé hors de la mer, aujourd’­hui le golfe d’İsk­end­er­un. A la fin de l’his­toire, les dieux entrèrent en guerre contre le monstre et sem­blèrent l’a­voir vain­cu. Le thème de la nais­sance à par­tir de la roche semble avoir été rap­por­té par les Hour­rites du Nord-Est de la Méso­po­ta­mie. Cette idée était fami­lière aux Sémites occi­den­taux qui révé­raient des rochers ani­més, pou­vant êtres consi­dé­ré comme les mères sym­bo­liques des êtres humains. Ain­si Jéré­mie (2:27) reproche à ses com­pa­triotes de suivre des étran­gers qui disent au bois : « Tu es mon père ! » et à la pierre : « Toi, tu m’as enfan­té ! ». On ren­contre ce concept plu­sieurs fois dans la Bible, par exemple dans Isaïe (51:1–2), Abra­ham et Sarah sont com­pa­rés à des rochers qui ont don­né nais­sance au peuple d’Is­raël : « Regar­dez le rocher d’où l’on vous a tirés… Regar­dez Abra­ham votre père et Sarah qui vous a enfan­tés ». De même on retrouve cette image dans l’é­van­gile selon Saint Mat­thieu (3:9) lorsque Jean le Bap­tiste dit « Dieu peut, des pierres [de l’hé­breu aba­nim] que voi­ci, faire sur­gir des enfants [de l’hé­breu banim] à Abra­ham », et répé­tée dans l’é­van­gile selon Saint Luc (3:8). Selon la légende de Armillus :

Il existe à Rome une pierre de marbre, et elle a la forme d’une jolie fille. Elle fut créée durant les six jours de la Créa­tion. Des gens sans valeur venus des nations viennent et l’a­busent et elle devint enceinte et à la fin des neuf mois elle éclate et un enfant mâle en sort de la forme d’un homme dont la hau­teur est de douze cubes et dont la lar­geur est de deux cubes. Ses yeux sont rouges et tors, les che­veux de sa tête sont rouges comme de l’or, et les empreintes de ses pieds sont vertes et il a deux crânes. Ils l’ap­pellent Armillus.

Fatih Cimok, Ana­to­lie biblique, de la Genèse aux Conciles
A Turizm Yayın­ları, İst­anb­ul, 2010

Une his­toire tout à fait sur­pre­nante qui fait appel aux mys­tères ori­gi­nels de la Créa­tion et aux mythes de la Des­truc­tion. L’Α et l’Ω en somme.

Je suis l’al­pha et l’o­mé­ga, dit le Sei­gneur Dieu, celui qui est, qui était, et qui vient, le Tout Puissant.
Εγώ ειμι το Αλφα και το Ωμεγα, λέγει κύριος ο θεός, ο ων και ο ην και ο ερχόμενος, ο παντοκράτωρ.

Apo­ca­lypse 1:8

Chrisme

Sources :

Image d’en-tête : Ren­contre de la pro­ces­sion des dieux menés par le Dieu de l’O­rage du Hatti/Teshub (à gauche) et la pro­ces­sion des déesses menées par la Déesse-Soleil d’Arinna/Hebat (à droite). Des­sin d’un bas-relief de la Chambre A de Yazılı­kaya par Charles Texier.

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J’ai­mais bien Mar­ce­line Lori­dan-Ivens jus­qu’à ce que…

Jean-Pierre Sergent et Marceline Loridan-Ivens dans le film documentaire français de Jean Rouch et Edgar Morin, "Chronique d'un été" (1961)

Jean-Pierre Ser­gent et Mar­ce­line Lori­dan-Ivens dans le film docu­men­taire fran­çais de Jean Rouch et Edgar Morin, “Chro­nique d’un été” (1961)

J’ai­mais bien Mar­ce­line Lori­dan-Ivens, jus­qu’à ce que je l’en­tende hier soir sur France-Inter, dans l’é­mis­sion d’Ar­thur Drey­fus, Encore heu­reux. L’en­tre­tien était plu­tôt inté­res­sant, parce qu’il était léger, par­lait de ciné­ma, de la vie en géné­ral, jus­qu’à ce qu’on tombe dans un ramas­sis de cli­chés — pour ne pas dire de conne­ries — du genre qu’on entend à lon­gueur de jour­née et qui ne servent qu’à ali­men­ter une haine engen­drée par la peur. La vieille dame de confes­sion juive n’hé­site pas à mettre tout le monde dans le même panier, ce qui met visi­ble­ment mal à l’aise le pré­sen­ta­teur. Celle qui a côtoyé nombre d’in­tel­lec­tuels de sa géné­ra­tion, dont Jean Rouch et Edgar Morin avec qui elle a fait un très beau film, celle qui fut l’é­pouse de Joris Ivens, a tout à coup fait une chute dans l’es­ca­lier de mon estime et de celle, cer­tai­ne­ment, des audi­teurs de la radio, pour ne plus deve­nir qu’une vieille dame un peu fan­tasque aux che­veux oranges.
Trans­crip­tion de l’en­tre­tien (en élu­dant les fautes de fran­çais orales) de cette émis­sion du 18 juin 2014, sur France Inter, dis­po­nible en réécoute sur ce lien.

AD — Vous dites, ce qui m’in­quiète, c’est l’antisémitisme.
MLI — Oui bien sûr, je trouve qu’il est en train de se déve­lop­per dans des pro­por­tions inima­gi­nables, on sait bien pour­quoi, on sait d’où ça vient aus­si […] Je me dis “ça va recom­men­cer”, ce que j’ai vécu quand j’a­vais 15 ans est en train de se remettre en place dans un futur proche ou plus ou moins loin­tain et ça com­mence tou­jours par les Juifs, vous savez, et ça conti­nue par les autres. Le Juif est un bouc émis­saire dont on se sert aisé­ment depuis l’his­toire de la Chré­tien­té et puis c’est pas­sé ensuite chez les Musul­mans et ça nous revient par les Musul­mans en France et aus­si par l’ex­trême-droite fran­çaise. […] L’an­ti­sé­mi­tisme se nour­rit de lui-même et tous les pré­textes sont bons pour le nour­rir. Voilà. […]
AD — Vous dites “pour moi le futur c’est le jihadisme”
MLI — Oui bien sûr, ce n’est pas mon futur sou­hai­té, mais je suis obli­gé de consta­ter que l’Eu­rope se laisse enva­hir par cette notion, croit à une pen­sée de cette modé­ra­tion isla­mique qui date du Moyen-Âge…
AD — Isla­miste vous vou­lez dire, mais euh, on par­lait tout à l’heure de l’an­ti­sé­mi­tisme, mais que dire de la peur de cer­tains Fran­çais envers les Musul­mans quels qu’ils soient, com­ment font, com­ment pour­raient faire les mil­lions de Musul­mans qui n’ont rien à voir avec tout ce qui se passe, eux aus­si sont dans une situa­tion difficile ?
MLI — C’est eux qui subissent leur propre oppres­sion, ils l’ac­ceptent, c’est à eux de se révol­ter, comme d’autres socié­tés se sont révoltées…
AD — Mais ils ne sont pas res­pon­sables de ce qu’ils n’ont pas fait ?
MLI — Ils ne sont pas res­pon­sables de ce qu’ils n’ont pas fait, mais ils acceptent très très bien l’op­pres­sion des femmes qui sont les leurs…
AD — Pas tous ?
MLI — Pas tous oui, mais jamais tous ! Mais jus­te­ment il faut combattre…
AD — C’est dur d’é­chap­per aux étiquettes…
MLI — Ben oui, mais il faut se battre, il ne faut pas accep­ter comme ça. Le ving­tième siècle est une suc­ces­sion de com­bats des Hommes pour gagner en liber­té et d’autres socié­tés doivent faire la même chose.

A ce moment-là, Arthur Drey­fus décide de mettre un terme à l’en­tre­tien en pas­sant à la pro­mo et l’é­mis­sion se ter­mine sur ces bonnes paroles.
Je l’ai­mais bien car étant don­né ce qu’elle a vécu, je la pen­sais suf­fi­sam­ment intel­li­gente pour ne pas avoir ce genre de dis­cours dis­cri­mi­nant et au contraire être por­teuse d’une parole éclai­rée. Quel jus­ti­fi­ca­tion trou­ver à ces mots ? J’en reste sans voix.
Déplorable…

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Ara­rat, le Mont Djou­di, le Déluge et autres déluges

Ara­rat, le Mont Djou­di, le Déluge et autres déluges

Le mythe du Déluge tel qu’on le connait tra­di­tion­nel­le­ment dans les écrits prend très cer­tai­ne­ment racine dans l’épo­pée de Gil­ga­mesh, tan­dis que tar­di­ve­ment dans notre his­toire rela­ti­ve­ment récente une brèche s’est ouverte dans le détroit du Bos­phore qui fut à l’o­ri­gine de la créa­tion de la Mer Noire. Si pour les Juifs et les Chré­tiens il ne fait aucun doute que l’Arche de Noé s’est échouée sur les hau­teurs du Mont Ara­rat (Ağrı Dağı), un vol­can éteint en réa­li­té for­mé de deux som­mets (le grand Ara­rat — Büyük Ağrı — et le petit Ara­rat — Küçük Ağrı) dont la situa­tion iso­lée au milieu d’une vaste plaine ne pou­vait que faire de cette mon­tagne un lieu pré­des­ti­né à de grands des­seins, il n’est fait men­tion nulle part dans le Coran du nom de la mon­tagne qui se limite à Al judi (جبل جودي Jebel Ǧūdī — les hau­teurs) qu’on situe dans le sud de la Tur­quie (Jazi­rat ibn Oumar, l’ac­tuelle Cizre).

Arche de Noé - Manuscrit peint - fin XVIè - Zübdetü't Tevarih - Musée des arts turcs et islamiques d'Istanbul

Arche de Noé — Manus­crit peint — fin XVIè — Züb­detü’t Teva­rih — Musée des arts turcs et isla­miques d’Istanbul

La par­ti­cu­la­ri­té de la forme de cette mon­tagne pour­rait lais­ser ima­gi­ner quelque chose comme une forme de bateau, en ayant beau­coup d’i­ma­gi­na­tion et de soi disant fouilles archéo­lo­giques auraient mis à jour la pré­sence d’un immense bateau enchâs­sé au creux de cette mon­tagne, dont la pré­sence se mani­feste par des élé­ments comme des « planches », des « rivets », une « ancre »…, de la même manière, des décou­vertes récentes sur le Mont Ara­rat « auraient mis à jour » les restes de l’embarcation du patriarche. Des inter­pré­ta­tions un peu far­fe­lues qui ne remettent bien évi­dem­ment pas en cause cette belle his­toire à peine exagérée.

Untitled

Pho­to ©

Cer­tains font appel à des fouilles et à des sources un peu plus sérieuses…

La loca­li­sa­tion, la forme et la taille de l’Arche semblent avoir pré­oc­cu­pé les hommes depuis la nuit des temps. Le « bois rési­neux » (GN 6:14) à par­tir duquel est fabri­qué l’Arche n’est pas men­tion­né ailleurs dans la Bible, et nous ne savons pas exac­te­ment à quoi il cor­res­pond. Les spé­cia­listes l’ont sou­vent inter­pré­té comme étant du roseau qui, enduit de « bitume en dedans et en dehors » deve­nait étanche. Cette matière aurait été retrou­vée sous forme fos­sile sur le Mont Ara­rat. […] Cer­tains auteurs de l’An­ti­qui­té, tel l’his­to­rien juif du Ier siècle de notre ère Fla­vius Joseph, pré­tendent que ceux qui esca­la­daient la mon­tagne en rap­por­taient des restes de bitume de l’Arche qu’ils uti­li­saient comme amulettes.

Fatih Cimok, Ana­to­lie biblique, de la Genèse aux Conciles
A Turizm Yayın­ları, İst­anb­ul, 2010

La légende du Déluge est recen­sée sous plus de 500 formes dif­fé­rentes, dont une connue sous le nom de déluge de Deu­ca­lion, popu­la­ri­sé par Ovide dans les Méta­mor­phoses. Un peu moins connu, le déluge d’A­pa­mée (Dinar) trouve une ori­gine un peu plus locale et adap­tée. Quelques uns de ces mythes donnent une ver­sion dans laquelle l’eau ne vient pas du ciel mais de la terre, par des inon­da­tions sou­ter­raines remon­tant à la sur­face. Ce phé­no­mène géo­lo­gique est endé­mique des régions vol­ca­niques qui font émer­ger des lacs sou­ter­rains lors de séismes, nom­breux dans cette région d’A­na­to­lie. A noter que le mythe de Deu­ca­lion don­na son nom à la ville ana­to­lienne de Konya (où se trouve enter­ré le Mev­lâ­na Dja­lâl ad-Dîn Rûmî) ; il y est ques­tion d’images de boue avec les­quelles Pro­me­thée et Athé­na repeuplent la terre. Image en grec, c’est eikon (εικόν), qui donne son nom à l’i­cône. Iko­nion n’est ni plus ni moins que l’an­cien nom grec de Konya.

Pho­to d’en-tête © Bri­gitte Djajasasmita

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Dans la vapeur blanche des jours sans vent (car­net de voyage en Tur­quie — 14 août) : Çavuşin, Ava­nos, Mus­ta­fa­paşa et en dehors des routes tracées

Dans la vapeur blanche des jours sans vent (car­net de voyage en Tur­quie — 14 août) : Çavuşin, Ava­nos, Mus­ta­fa­paşa et en dehors des routes tracées

Épi­sode pré­cé­dent : Dans la vapeur blanche des jours sans vent (car­net de voyage en Tur­quie — 13 août) : Üçhi­sar, Göreme et les églises rupestres

Bul­le­tin météo de la jour­née (mar­di) :

10h00 : 24°C / humi­di­té : 56% / vent 6 km/h
14h00 : 30°C / humi­di­té : 21% / vent 9 km/h
22h00 : 23°C / humi­di­té : 35% / vent 7 km/h

Au lever, je n’es­père qu’une seule chose, me remettre les pieds sous la table pour pro­fi­ter de ce petit déjeu­ner de prince, où l’on me pro­pose du mene­men et de l’omlet (comme ça se pro­nonce). Tan­dis que je suis en train de bâfrer, je fais la connais­sance d’Abdul­lah, le patron de l’hô­tel. Il se pré­sente ; Abdul­lah Şen ; c’est un grand bon­homme por­tant bésicles rondes, barbe de trois jours et che­veux poivre et sel. Son port et sa façon de s’ha­biller tra­hissent le bon vivant, une bonne culture et un cer­tain niveau de vie. J’ap­pren­drai par la suite qu’Ab­dul­lah est phar­ma­cien et qu’il dirige une liste élec­to­rale conser­va­trice laïque dans la ville d’Üçhi­sar. Au début, ses manières sont volu­biles, il parle fort et fait de grands gestes, ne manie que quelques mots d’an­glais et a l’in­tel­li­gence de m’ap­prendre quelques mots turcs puis­qu’il voit que je sai­sis bien. Dès le soir, lorsque je retourne à l’hô­tel, il me demande Nasılsın ? A quoi je réponds Iyiyim et à quoi je fini­rai par répondre à la fin du voyage Çok iyiyim. Je vois qu’il appré­cie et je compte sur lui pour apprendre quelques mots. Je dois avouer qu’au début, je pen­sais qu’Ab­dul­lah était un patron, un com­mer­cial, mais je me suis vite aper­çu qu’il avait sim­ple­ment le goût du ser­vice ren­du et que sa gen­tillesse avait un goût nature. Plu­sieurs fois je l’ai vu dans la jour­née assis avec ses employés devant la mai­son, sous la ton­nelle de vigne, en train de prendre du bon temps avec eux, de devi­ser sim­ple­ment comme on le fait dans ces pays où le temps n’a pas la même saveur. C’est ain­si que je me retrou­ve­rai aus­si assis avec lui en train de man­ger des fruits dont il m’ap­prend le nom en turc, abri­cots du jar­din (kayısı), noi­settes (fındık), rai­sin (üzüm). Jamais je n’ai quit­té l’hô­tel sans qu’il me donne une ou deux petites bou­teilles d’eau. Je me rends compte que je n’ai même pas pen­sé à prendre en pho­to les gens l’hô­tel, ni Abdul­lah, ni Bukem, ni Fatoş…

Le matin, je retourne à Göreme pour ter­mi­ner la visite du musée en plein-air. Il se trouve qu’à la sor­tie du musée se trouve une der­nière église, pour laquelle mon billet fonc­tionne encore et qui, paraît-il, vaut le coup d’œil. C’est la Tokalı Kilise, l’é­glise à la boucle, la plus grande de Göreme. Mal­heu­reu­se­ment (ou heu­reu­se­ment), elle est en pleine res­tau­ra­tion et des quatre pièces et de la crypte, je ne pour­rais voir que les par­ties les moins inté­res­santes. La voûte cou­leur lapis-lazu­li est presque entiè­re­ment invi­sible, mais ce que je vois est réel­le­ment impres­sion­nant. La hau­teur de cette voûte déjà, pas­sa­ble­ment plus haute que les autres, en font une église dont les dimen­sions se rap­prochent plus de bâti­ments exté­rieurs, et les cou­leurs, écla­tantes, des bleus puis­sants, des verts pro­fonds, des rouges san­guins. Il y aus­si ces colonnes puis­santes et hautes qu’on ne voit nulle part ailleurs. C’est un endroit à mi-che­min entre la beau­té d’une église tra­di­tion­nelle et le mys­tère d’une tombe égyptienne…

Tokalı Kilise - Photo Ker & Downey http://kerdowney.com

Tokalı Kilise — Pho­to © Ker & Downey

Je file ensuite vers le nord, vers la petite ville de Çavuşin, que je ne fais que frô­ler puisque je m’ar­rête sur le par­king de l’église de Nicé­phore Pho­cas, à deux pas de la route entre Göreme et Ava­nos. Nicé­phore II Pho­cas (Νικηφόρος Β΄ Φωκᾶς) est un géné­ral byzan­tin, né en 912 et mort en 969, qui fini­ra empe­reur de Byzance. Homme valeu­reux, on l’a­du­le­ra sur­tout pour avoir repous­sé à maintes reprises les Arabes dont les coups de bou­toir pour conqué­rir cette par­tie de l’A­na­to­lie furent mis à mal par sa téna­ci­té. C’est en par­tie dans cette atmo­sphère que les Chré­tiens se sont ter­rés dans les val­lées et les habi­ta­tions tro­glo­dy­tiques de la Cappadoce.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 004 - Çavuşin - Eglise de Nicéphore Phocas

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 011 - Çavuşin - Eglise de Nicéphore Phocas

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 017 - Çavuşin - Eglise de Nicéphore Phocas - Lézard

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 028 - Çavuşin - Eglise de Nicéphore Phocas

L’é­glise de Nicé­phore Pho­cas est construite à flanc de falaise et fait par­tie d’un ensemble plus grand com­pre­nant un monas­tère et un réfec­toire qu’on peut encore visi­ter aujourd’­hui. Dans cette superbe église qu’on ne peut pho­to­gra­phier (j’ai tou­jours un peu de mal à com­prendre com­ment on arrive à retrou­ver sur inter­net des pho­tos de lieu qu’il est inter­dit de pho­to­gra­phier, sur­tout quand trois gardes-chiourmes mous­ta­chus vous regardent d’un air méfiant), les dimen­sions et le pro­gramme ico­no­gra­phique sont com­pa­rables à ce qu’on trouve dans la Tokalı Kilise, même si l’ar­chi­tec­ture en est moins impres­sion­nante. Les cou­leurs à domi­nantes vertes sont un peu endom­ma­gées, mais on peut lire encore ses fresques, où l’on peut voir le por­trait de l’empereur Pho­cas mais aus­si les por­traits de l’empereur Constan­tin et d’Hé­lène tenant la Vraie Croix.

Pho­to © Antoine Sipos

Ce qu’on peut voir à l’en­trée de l’é­glise, c’est le reste d’une par­tie de cette même église qui s’est effon­drée avec la falaise. C’est mal­heu­reu­se­ment le sort qui attend l’en­semble des églises de cette région si rien n’est fait à grande échelle. Si les cou­leurs sont encore si vives, c’est parce que l’ef­fon­dre­ment n’est pas si ancien que ça. Il reste tou­te­fois une grande par­tie du monas­tère, dans lequel on peut mon­ter et avoir une belle vue d’en­semble de la val­lée. De l’ex­té­rieur, on peut admi­rer les motifs d’ocre rouge ou terre de sienne des ouver­tures. A mi-che­min entre l’é­poque chré­tienne et la période musul­mane, on ne sait plus vrai­ment où se situent les motifs, car cer­tains ont été des­si­nés par ceux qui trans­for­mèrent ces églises en pigeon­niers, ou par­fois en ruches.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 034 - Çavuşin - Eglise de Nicéphore Phocas

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 036 - Çavuşin - Cheminées de fées

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 038 - Çavuşin - Eglise de Nicéphore Phocas

Je fais le tour de ce piton rocher pour aller voir les che­mi­nées de fée qu’on aper­çoit depuis la route. Le pay­sage est envoû­tant, soli­taire, pous­sié­reux. J’aime la cha­leur douce qui se dégage de ces pay­sages qui passent une par­tie de l’an­née ense­ve­lis sous la neige.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 042 - Avanos - Mosquée

Je reprends la route sans pas­ser dans le vil­lage de Çavuşin (qui ne pro­nonce tcha­vou­chine) et je file vers Ava­nos. La ville d’A­va­nos a l’air assez grande sur la carte, mais ce n’est en réa­li­té qu’un gros vil­lage, une ville moderne construite au pied d’un ancien vil­lage à flanc de col­line, sur­plom­bant le cours majes­tueux du fleuve nour­ri­cier, le Kızılır­mak (keu­zeu­leur­mak, lit­té­ra­le­ment : rivière rouge) dont le nom tra­hit le fait qu’il char­rie des tonnes de terre d’un rouge pro­fond, que les potiers de la région exploitent direc­te­ment pour leur pro­duc­tion. Trop peu pro­fond, il n’est pas navi­gable, mais c’est le plus long fleuve de Tur­quie, avec ses 1150km. J’ai mis un peu de temps à com­prendre qu’en turc, il y avait deux mots pour décrire la cou­leur rouge ; Kızıl et Kırmızı, et j’a­voue que la dif­fé­rence n’est pas évi­dente à per­ce­voir. Kızıl évoque ce qui est rouge par réfé­rence : le fleuve rouge, la mer rouge, l’ar­mée rouge, les bri­gades rouges. Kırmızı évoque ce qui est rouge par nature : un oiseau rouge, une peau rouge, un pois­son rouge.

Le plus gros de la ville s’é­tend au sud de la rivière, dans d’im­menses zones pavillon­naires très “classes moyennes” tan­dis que le centre est beau­coup plus authen­tique et tra­di­tio­na­liste. Autant dire que si les tou­ristes s’ar­rêtent ici pour appré­cier les pote­ries d’ins­pi­ra­tion hit­tite et les kilim, peu d’entre eux en pro­fitent pour prendre un repas. Lorsque je revien­drai un soir dîner ici, ce sera un peu com­pli­qué et cocasse. La mos­quée de la ville est toute récente, avec son toit de plomb tout neuf et brillant sous le soleil haut. Sur la place prin­ci­pale du vil­lage (je per­siste) s’é­grènent les échoppes des potiers et des bar­biers. Je gare la voi­ture ici, au milieu de la place. J’ai cru remar­quer qu’il fal­lait payer le sta­tion­ne­ment mais je ne vois per­sonne. Je remarque qu’un type assis devant le maga­sin de kilims en siffle un autre, qui lui-même en appelle un autre et arri­vant à suivre la scène, je com­prends que celui à qui je dois payer est celui qui s’a­vance vers moi.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 048 - Avanos -Mehmet Körükçü le potier

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 050 - Avanos -Mehmet Körükçü le potier

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 052 - Avanos -Mehmet Körükçü le potier

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 053 - Avanos -Mehmet Körükçü le potier

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 058 - Avanos -Mehmet Körükçü le potier et son fils Oğuz

Je monte jusque dans le vieux pays où l’on peut appré­cier les pote­ries de Meh­met Körük­çü dans sa petite échoppe humide. Meh­met est un homme déli­cieux qui parle quelques mots de fran­çais et adore racon­ter ce qu’il fait. Ce que je ne sais pas encore, c’est que Meh­met, parce que je suis reve­nu le voir au mois de mai sui­vant, devien­dra un ami avec qui j’ai pas­sé beau­coup de temps et grâce à qui j’ai pu connaître d’autres per­sonnes à Istan­bul, avec qui je suis encore en contact aujourd’­hui. Meh­met fait visi­ter son ate­lier, explique qu’il va cher­cher lui-même sa terre avec son trac­teur sur les hau­teurs d’A­va­nos, qu’il la fait sécher dans son ate­lier, qu’il la bou­dine tout seul et qu’il la fait cuire ici même, plu­sieurs fois par an. Il offre le thé, pose beau­coup de ques­tions, remonte ses lunettes, sou­rit de toutes ses dents du bon­heur, me regarde en me sou­riant, avec ses yeux en amande qui tra­hissent ses ori­gines d’A­sie Cen­trale. Meh­met est un des­cen­dant de guer­rier tur­co-mon­gol, ça se voit sur sa figure, ce n’est pas un Ana­to­lien, il parle un fran­çais haché, prend le temps d’ex­pli­quer com­ment on tourne ; je le prends en pho­to, nous rigo­lons tous les deux, il me parle de son frère à Istan­bul, Emin, de sa vie ici, me pré­sente son fils Oğuz (pro­non­cer o‑ouz) qui tra­vaille avec lui quand il n’est pas au lycée, qui découpe des pho­to­phores pour en faire de belles den­telles de terre. Je reste long­temps avec lui, le temps que plu­sieurs per­sonnes passent, le temps de plu­sieurs verres de thé qu’il fait chauf­fer sur une plaque élec­trique. Il se passe quelque chose entre nous et je lui pro­mets de reve­nir le voir avant de repar­tir, et dès que je revien­drai dans les parages.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 061 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 063 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu - Sarıhan Kervansaray

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 064 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu - Sarıhan Kervansaray

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 068 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu - Sarıhan Kervansaray

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 072 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu - Sarıhan Kervansaray

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 075 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu - Sarıhan Kervansaray

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 077 - Avanos - Yeni Kayseri Yolu - Sarıhan Kervansaray

Ne sachant pas vrai­ment où je vais, je prends la route vers l’est, n’ayant pas vrai­ment de but. J’en­quille la D300 qui est cen­sée se diri­ger vers Kay­se­ri, et je tombe sur un grand bâti­ment aus­tère dont je recon­nais immé­dia­te­ment le style seld­jou­kide. Un bâti­ment de pierre jaune dans un décor de sable jaune. Les Sel­çuk­lu viennent du Tur­kes­tan et ont colo­ni­sé la Cap­pa­doce jus­qu’à Konya. Je m’ar­rête pour étu­dier les lignes pures des octa­èdres qui com­posent les tours d’angles ain­si que la tour cen­trale. Ce bâti­ment est un des der­niers cara­van­sé­rails (ker­van saray, litt. palais des cara­vanes) de la région, et même si l’on voit qu’il a été res­tau­ré récem­ment, il conserve toute sa superbe. La cou­leur de sa pierre lui a don­né son nom qui du coup sonne comme un pléo­nasme. Sarı han, c’est le cara­van­sé­rail jaune, han étant le nom qu’on donne aux cours inté­rieures qu’on peut trou­ver par­tout dans les vieux quar­tiers d’Is­tan­bul, qu’on peut tra­duire par auberge, car géné­ra­le­ment les com­mer­çants iti­né­rants pou­vaient s’y res­tau­rer et y dor­mir. Par exten­sion, le han est deve­nu cara­van­sé­rail. Sur ses murs, d’é­normes lézards se réchauffent au soleil, tan­dis qu’un gros chien à l’o­reille éti­que­tée comme celle d’une vache tente de trou­ver de l’ombre au pied de la muraille. Cer­tains de ces lézards ont la peau lar­dée de piquants, d’autres ont une queue verte déme­su­rée ; sur les murs dansent des dizaines de ces bes­tioles qui détalent dès que j’en approche. Dans ce cara­van­sé­rail, on peut voir aujourd’­hui la sema, la céré­mo­nie des der­viches tour­neurs. Je me suis juré que je retour­ne­rai ici un jour pour voir ce spectacle.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 079 - Ürgüp Yolu

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 082 - Ürgüp Yolu

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 087 - Ürgüp Yolu

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 091 - Ürgüp Yolu

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 092 - Ürgüp Yolu

La route conti­nue vers Kay­se­ri, mais je fais demi-tour pour retour­ner sur Ava­nos et j’en­quille une route qui des­cend retourne vers le sud, passe par un lieu-dit, une ancienne ville por­tait le nom évo­ca­teur d’Aktepe (litt. la col­line blanche). C’est un immense pla­teau où le soleil se réflé­chit, dans une lumière qui fait plis­ser les yeux et qui se pour­suit par une val­lée (Devrent vadi­si) assez étrange, faite de pics et de che­mi­nées de fée allant de l’ocre au blanc, en pas­sant par le rose, le vio­let et le vert, à perte de vue. Ici aus­si un jour je revien­drai regar­der le soleil se cou­cher sur cette Cap­pa­doce sau­vage. J’i­ma­gine aus­si qu’il serait indis­pen­sable de reve­nir ici en plein hiver, sous une neige épaisse et duveteuse.

J’ar­rive ensuite à Ürgüp, pour le coup est une ville énorme com­pa­rée à Ava­nos. En réa­li­té, elle n’est pas tel­le­ment plus éten­due, mais plus connue, et c’est un centre tou­ris­tique impor­tant (pour les Turcs sur­tout), une grande ville com­mer­çante, où on ne peut voir que quelques habi­ta­tions tro­glo­dytes, mais pas com­plè­te­ment dénuée de charme. Il y fait bon pas­ser en tout cas. Le temps de m’ar­rê­ter cinq minutes pour me ravi­tailler au super­mar­ché, quelques conne­ries, des tranches de pastır­ma et des pis­taches, et me voi­là déjà repar­ti pour rejoindre Mus­ta­fa­paşa.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 096 - Mustafapaşa

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 099 - Mustafapaşa - Ayos Konstantin ve Helena Kilisesi

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 101 - Mustafapaşa

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 105 - Mustafapaşa

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 113 - Mustafapaşa

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 122 - Mustafapaşa - Medersa Şakir Mehmet Paşa

Cette petite ville, l’an­cienne Sina­sos, un vil­lage pour le coup, porte un nom qui ne laisse pas son­ger que jus­qu’aux échanges de popu­la­tion entre la Grèce et la Tur­quie (en 1924) vou­lus par Atatürk, que la ville était presque inté­gra­le­ment habi­tée par des Grecs orthodoxes.
Sur la place du vil­lage, on trouve une église basse, construite en contre­bas de la route, une église por­tant le patro­nyme de Constan­tin et Hélène (Ayos Kons­tan­tin ve Hele­na Kili­se­si), ornée de feuilles de vignes et de sym­boles paléochrétiens.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 129 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 128 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 133 - Monastère Ayios Nikolaos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 139 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 138 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Une route monte dans un recoin de la ville après une sorte de por­tail de pierre consti­tué de trois arches, de part et d’autre de laquelle se dressent des habi­ta­tions, pour nombre d’entre elles déser­tées, comme si quelque chose avait fait fuir les gens qui vivaient là, il y a long­temps appa­rem­ment. Beau­coup s’é­croulent, d’autres ont leur ouver­tures murées par de gros blocs mal dégros­sis. La route semble s’en­fon­cer dans la cam­pagne, par­mi les champs, mais un pan­neau attire mon atten­tion, indi­quant en anglais trois églises (Sinas­sos, St Nicho­las, St Ste­fa­nos), dont le nom me laisse croire en de nou­veaux tré­sors cachés, à l’a­bri des regards. La jour­née est bien avan­cée et tout est déjà fer­mé, mais si j’en crois mon guide tou­ris­tique, seule une d’entre elles est ouverte et gar­dée en temps nor­mal. Pour aller voir les autres, il faut en deman­der la clef au propriétaire.
Avant d’al­ler voir le monas­tère Saint Nico­las qui s’é­tend der­rière un enclos où l’en­trée est signa­lée par une ins­crip­tion en grec, je pro­fite du soleil bas pour admi­rer le pay­sage de tuf qui prend des teintes vio­la­cées, presque roses, sous un man­teau de terre jaune d’ocre virant en quelques endroits à un vert fadasse ; des cou­leurs qu’on croit d’or­di­naire impos­sible pour la terre. L’on­du­la­tion créée par la pluie fait pen­ser à des ani­maux, peut-être des cha­meaux, dont les bosses seraient enche­vê­trées, et donne aux lieux un je-ne-sais-quoi d’organique.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 146 - lieuMustafapaşa - Vallée de Sinassos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 134 - Monastère Ayios Nikolaos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 136 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 145 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Le monas­tère Saint Nico­las est construit autour d’un grand cône à l’in­té­rieur duquel se trouve l’é­glise, fer­mée en cette heure tar­dive. Flan­quée d’un fron­ton récent, où alors récem­ment res­tau­ré, l’en­clos est fer­mé par un bâti­ment qu’on pour­rait pen­ser être les salles conven­tuelles des moines ; le sol est jon­ché de tombes faites de dalles plates à la tête des­quelles poussent un rameau de plantes mai­gri­chonnes au feuillage tirant vers le pourpre. Je ne ver­rai pas plus aujourd’­hui de ce monu­ment qui me semble récent et qui tra­hit la pré­sence grecque jus­qu’à il y a peu.
A l’en­trée de la val­lée, l’é­glise de Saint Ste­fa­nos. Toute petite, fer­mée par une grille, on ne dis­cerne dans le cône de tuf dans lequel elle est dis­si­mu­lée que son arcade prin­ci­pale et le dôme décré­pi, les parois encore blanches recou­vertes des graf­fi­tis de ceux qui sont pas­sés par là.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 147 - Mustafapaşa - Vallée de Sinassos

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 148 - Mustafapaşa

Le pay­sage tout autour est splen­dide et on a du mal à croire qu’il peut y avoir du monde qui vient jus­qu’i­ci admi­rer ces petites églises retran­chées. D’au­tant que le che­min ne mène nulle part et se perd dans les cir­con­vo­lu­tions qu’on pour­rait croire creu­sées par une rivière depuis long­temps assé­chée. Un âne brait tout seul, atta­ché à une corde courte autour d’un arbre, une grosse bourre de poils lui pen­dant sous le ventre.
Les mai­sons sur les flancs de la val­lée, toutes déser­tées, sont per­chées de manière impro­bable dans un triste fatras de tous per­cés dans la pierre et de murs mon­tés à la va-vite. On a du mal à ima­gi­ner des gens vivant ici, dans ces habi­ta­tions ouvertes aux quatre vents dans ces régions mon­ta­gneuses où les hivers peuvent se mon­trer rigou­reux et sou­vent ennei­gés. Par­tout dans la ville, ces motifs d’or­ne­ments accro­chés aux lin­teaux, sous les fenêtres, des formes de coquilles qui font par­fois pen­ser à un ersatz d’art isla­mique, mais qui vient en réa­li­té en droite ligne de l’hé­ri­tage grec.

Je m’ar­rête quelques ins­tants dans la ville pour ache­ter deux très belles nappes en tis­sus épais,  une rouge et une bleue, nappe ou jeté de cana­pé, c’est du pareil au même. Le vieil homme qui tient la bou­tique a la même tête que son fils, pas fran­che­ment turque… Le fils me dit que son père s’ap­pelle Cavit (dja­vit), et que c’est la trans­crip­tion turque de David, un pré­nom qui ne sonne pas fon­ciè­re­ment musulman…

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 156 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 157 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 158 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 159 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

La lumière décroit et je sais que dans ces régions de mon­tagne le soleil tombe brus­que­ment, la nuit encore plus et je suis loin de mon point d’at­tache, alors je reprends un peu à contre-cœur la route. Je remonte sur Ürgüp, seule route que je connais pour reve­nir sur mes pas, et par un heu­reux hasard, je tombe sur un pan­neau que je n’ai pas vu dans l’autre sens, pour la simple et bonne rai­son qu’il n’y en a pas quand on vient d’Ürgüp. Un simple pan­neau indique Pan­carlık Kili­se­si. J’a­voue être intri­gué par ce nom dont je sais qu’il signi­fie bet­te­rave. Il fait encore un peu jour, alors j’y vais. Un je-ne-sais-quoi de fris­son me par­court l’é­paule, quelque chose qui ne pour­rait me faire recu­ler pour rien au monde et qui me pousse en avant. Un vent ter­rible souffle dans cette val­lée. Je tombe sur un autre pan­neau, au pied d’une grosse pro­tu­bé­rance de tuf, por­tant le nom de Sarı­ca. Un petit par­king en contre­bas, un che­min qui par­court l’é­pine dor­sale sur un che­min de revê­te­ment qu’on sent récent et je tombe devant l’en­trée d’une église (fer­mée bien évi­dem­ment) mais dont je pressent qu’on a tout fait pour la main­te­nir en bon état. Un coup de lumière à l’in­té­rieur me révèle sur un sol propre et nive­lé, de très jolies cou­leurs, des rouges sang appli­qués sur les murs sous forme de motifs ornant des arcades nettes et des cha­pi­teaux fine­ment tra­vaillés. Un pan­neau annonce que la Sarı­ca kilise a été récem­ment réno­vée, un revê­te­ment imper­méable pro­té­geant le cône sous lequel elle se trouve des infil­tra­tions qui pour­raient conti­nuer à rava­ger l’église.
En contre­bas, un champ noir­ci. Quelque chose a brû­lé ici, sous l’ef­fet d’une volon­té ou par la grâce de la séche­resse. Au bout de quelques minutes je m’a­per­çois que les deux pro­émi­nences face à moi ne sont pas que de simple cônes de tuf, mais ce sont encore des églises, creu­sées, dont on peut voir les colonnes et les arcades ouvertes, lieux de culte éven­trés par le vent, rava­gés par le temps, c’est Byzance à ciel ouvert. Je prends un malin plai­sir à m’im­pré­gner du lieu sous une lumière rosée, un chape de char­bon à l’ho­ri­zon déco­rée d’une guir­lande de fes­tons oscil­lant entre le rose et le jaune dans une coton­nade de nuages moel­leux, cou­vrant le pay­sage d’une onde rou­geoyante tan­dis que le vent souffle de plus belle et finit par faire mal aux oreilles. Au loin, un champ brûle. Poli­tique de la terre brû­lée ? Je n’ar­rive pas à savoir si c’est une pra­tique cou­rante ici où si quelque chose déclenche ces incen­dies sur ces terres pous­sié­reuses et sèches.

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 163 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 162 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 165 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 174 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 176 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 181 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 184 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 187 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 195 - Mustafapaşa - Eglises de Sarıca

Je visite les deux petites églises, dra­ma­ti­que­ment éro­dée par l’eau qui est venue dans les moindres inter­stices, ron­ger les parois et les poly­chro­mies lais­sées au vent ; autant dire qu’elles n’en ont plus pour long­temps. C’est à la fois le drame et la belle par­ti­cu­la­ri­té de ces églises… A l’a­bri de la lumière, les cou­leurs ont gar­dé tout leur mor­dant et leur fraî­cheur, mais la roche qui per­met ceci est aus­si friable et instable qu’elle accroche par­fai­te­ment le pig­ment. Dans quelques années, l’eau aura tout ron­gé, et à part quelques pièces dignes d’in­té­rêt, elles ne seront pas pro­té­gées et lais­sées dans cet état jus­qu’à ce qu’elles finissent dis­soutes comme un cachet d’as­pi­rine dans un verre d’eau…

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 203 - Mustafapaşa - Pancarlık Vadisi ve Kilisesi

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 207 - Mustafapaşa - Pancarlık Vadisi ve Kilisesi

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 208 - Mustafapaşa - Pancarlık Vadisi ve Kilisesi

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 210 - Mustafapaşa - Pancarlık Vadisi ve Kilisesi

Turquie - jour 19 - De Çavusin à Mustafapasa - 211 - Mustafapaşa - Pancarlık Vadisi ve Kilisesi

Je reprends la voi­ture et je conti­nue mon che­min un peu plus loin. je vois des pan­neaux indi­quant d’autres églises : Kepez, Kara­kuş… que je ne visi­te­rai pas. Je des­cends vers le lieu que poin­tait le pan­neau à l’en­trée de la val­lée, Pan­carlık. L’é­glise aux bet­te­raves est fer­mée à cette heure-ci, il fau­dra que je revienne un autre jour pour la voir. Je m’ex­ta­sie sur la petite cabane qui se trouve à l’en­trée et qui doit abri­ter le gar­dien pour ses jour­nées de visite. Un lieu char­mant. Un petit cana­pé devant une table, le tout orien­té vers le monas­tère dépen­dant de l’é­glise, sous un auvent de for­tune, un porte cartes pos­tales où se débattent au vent une dizaine de cartes dif­fé­rentes, aux cou­leurs pas­sés, lais­sées là. Der­rière, une cabane d’où dépasse un tuyau de poêle, des bon­bonnes d’eau, un petit pan­neau cloué sur la poutre indique le prix de l’en­trée : 4.00 TL, très pré­ci­sé­ment. A côté du cana­pé, une pelle qui a ser­vi à faire un tas de déchets, une âtre creu­sée dans la pierre porte une grille sous laquelle des paquets de ciga­rettes vides ser­vi­ront à amor­cer le feu pour pré­pa­rer le thé dans la théière qui, elle, attend sage­ment sur la grille. J’aime ces lieux vivants qui racontent la vie d’une jour­née, même lorsque les occu­pants ont tout lais­sé là et s’en sont allés chez eux, comp­tant sur la bien­veillance des visi­teurs éven­tuels pour ne rien van­da­li­ser. J’aime ces lieux qu’on peut tra­duire en gestes du quotidien.

Il est tard à pré­sent, les lumières des villes alen­tours com­mencent à poindre dans la soli­tude de cette val­lée iso­lée. Je prends une pho­to de la voi­ture dans ce pay­sage de rêve, qui achève cette jour­née fabu­leuse, pleine de sur­prises et de rebon­dis­se­ments, des jour­nées comme j’ai­me­rais en vivre des cen­taines par an, des jour­nées qui rem­plissent l’âme.

Je finis ma jour­née au Fırın Express à Göreme, d’un ada­na kebap (le plus épi­cé de tous) et d’un jus de cerise (vişne suyu). J’ai remar­qué que cer­taines per­sonnes qui vivent ici ne disent pas gueu­ré­mé, mais gueu­rèm. Peut-être l’in­fluence du fran­çais, seconde langue mater­nelle de la Cappadoce.

Ce soir, je me couche tôt, car demain, je me lève à 4h00…

Voir les 211 pho­tos de cette jour­née sur Fli­ckr.

Loca­li­sa­tion sur Google maps :

  1. Eglise de Nicé­phore Pho­cas à Çavuşin
  2. Ava­nos, ate­lier de Mehmet
  3. Sarı­han Kervansaray
  4. Aktepe
  5. Devrent vadi­si
  6. Mus­ta­fa­paşa
  7. Val­lée des églises à Mus­ta­fa­paşa (monas­tère Saint-Nicolas)
  8. Pan­carlık et Sarı­ca (l’emplacement n’est pas tout à fait exact, j’ai déjà eu du mal à retrou­ver le lieu sur place une deuxième fois, alors sur une carte satel­lite, hein…)

Liens :

  1. Vidéo (en turc, déso­lé) sur le Sarı­han Kervansaray
  2. Site sur la conser­va­tion de la Sarı­ca Kilise
  3. Site (en turc, encore) sur le patri­moine de la val­lée de Pancarlık

Épi­sode sui­vant : Dans la vapeur blanche des jours sans vent (car­net de voyage en Tur­quie — 15 août) : La Cap­pa­doce vue des airs et les cités sou­ter­raines de Tat­la­rin et Derinkuyu

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