Non­Non­Bâ est un man­ga qui puise ses racines dans une socié­té japo­naise qu’on connaît mal puisque l’ac­tion de cette œuvre mas­sive (400 pages) se déroule au cœur des années 30. L’au­teur de cette his­toire pro­vin­ciale dont l’ac­tion se situe à Tot­to­ri dans le sud du Japon, Shi­ge­ru Mizu­ki, est né en 1922 et le petit gar­çon qui en est le per­son­nage prin­ci­pal, Shige-chan (par­fois même Gégé) ne font qu’une seule et même personne.
Non­Non­Bâ (Mémé) une grand-mère très pauvre ven­dant quelques menus ser­vices de mai­son contre un peu d’argent, le gîte et le cou­vert et dont la fonc­tion pre­mière est de prier. Son acti­vi­té, c’est la prière ; les gens la rétri­buent pour qu’elle adresse des prières aux esprits ; ain­si, elle connaît par­ti­cu­liè­re­ment bien l’é­ven­tail des monstres et autres esprits (Yôkai(1)妖怪) innom­brables que peut comp­ter l’i­ma­gi­naire shintô.
Ce livre, plu­tôt que de racon­ter une his­toire avec un début et une fin, raconte plu­tôt deux épi­sodes de l’en­fance de l’au­teur autour de la ren­contre, de la sépa­ra­tion, de l’é­moi amou­reux et de l’a­mi­tié, mais aus­si du deuil. Côtoyer les esprits par le tru­che­ment de Non­Non­Bâ per­met de rendre la réa­li­té un peu moins dif­fi­cile, au milieu de ces esprits far­ceurs et facé­tieux, de cet uni­vers des choses qui existent, même si on ne les voit pas.

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On sent dans cette œuvre le souffle de la tra­di­tion orale, mais éga­le­ment des conven­tions sociales par­fois lourdes et héri­tées de périodes sombres qui ont plon­gé l’Ar­chi­pel dans l’obs­cu­ran­tisme depuis le Moyen-Âge, car c’est de là que viennent les yôkai, de ces temps recu­lés. On y entr’a­per­çoit éga­le­ment des sujets graves, comme les ven­deurs d’enfants.
Les per­son­nages, eux, sont plus qu’at­ta­chants. Shige-chan est un petit bon­homme sym­pa­thique qui se bat avec ses copains contre une bande rivale, et qui ne parle pas aux filles, parce que ça rend faible. Tou­te­fois, ses ami­tiés seront fémi­nines. L’é­cole, c’est pas vrai­ment son truc, et il pré­fère pas­ser son temps à des­si­ner, racon­ter des his­toires et peindre. Pour cela, il demande à Non­Non­Bâ de l’ai­der à voir cer­tains esprits pour pou­voir les des­si­ner. Il est entou­ré d’un père abso­lu­ment avant-gar­diste, irres­pon­sable et dépha­sé, qui n’hé­site pas à dire à son fils qui fait mine de vou­loir se tuer après une décep­tion amou­reuse Moi je suis pour lais­ser mes enfants faire ce qu’ils veulent… et à sa femme tu devrais plu­tôt le lais­ser faire… Et d’une mère qui semble com­bler le manque total de dis­cer­ne­ment de son époux. Tou­te­fois, elle n’au­ra de cesse de sou­te­nir le sou­hait de son fils de dessiner.
Une œuvre drôle et sen­sible, qui ne fait pas l’é­co­no­mie des rudesses de la vie et n’hé­site à tirer un trait sur une socié­té qui der­rière ses lour­deurs fait la part belle à l’imaginaire.

Notes:
1) désigne un « être vivant, forme d’exis­tence ou phé­no­mène aux­quels on peut appli­quer les qua­li­fi­ca­tifs extra­or­di­naire, mys­té­rieux, bizarre, étrange et sinistre ». Source Wiki­pe­dia.

Non­Non­Bâ sur du9.org
Tot­to­ri sur Google Maps

http://maps.google.fr/maps/ms?ie=UTF8&hl=fr&msa=0&msid=112761017533873934992.00047408d64edb3254246&ll=35.546474,134.198341&spn=0.113134,0.261269&t=k&z=12
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