Plateau de La Godivelle - 05-05-2007 - 13h22

Pho­to © Etienne Cazin

Je com­prends ce que j’ai. Mes jour­nées passent len­te­ment, je n’étais plus habitué.

Regar­der pas­ser une péniche fes­ton­née de lou­piotes de toutes les cou­leurs sous les fron­dai­sons des saules, dont les innom­brables doigts viennent frô­ler l’onde, assis au bord de la route, le front plon­gé dans mes pensées.
Au loin un oiseau lance ses trilles par-des­sus les cha­peaux d’un couple qui fait du vélo sur les bords de la Seine, et je me reprends dou­ce­ment. Je retombe sur les lignes de Ger­main-Tho­mas, avec les oiseaux qui piaillent dans un arbre au loin :

Je com­prends ce que j’ai. Mes jour­nées passent len­te­ment, je n’étais plus habitué.
Je suis seul. Je n’étais plus habitué.
Je suis soli­taire, comme toujours.
Et ce qui me ronge est que j’ai déjà com­men­cé mon voyage tan­dis que je reste ici, inca­pable de rompre les amarres, enfer­mé autant dans l’espace que dans mon esprit.
Je souffre sans vrai­ment m’en rendre compte, une vio­lence sourde et handicapante.
Je vais mou­rir d’être ici.
Le contraire de ce que dit Depar­don : « Bien seul, mais bien libre »

Ah oui, pas d’autres bruits que celui des jours qui ne se plaignent pas, la nature beu­glant son silence aux oreilles écar­lates. Les natures les plus élo­quentes sont celles qui ne font pas de bruit super­flus et les villes les plus belles sont celles qui n’ont aucunes pré­ten­tions. Il fau­dra se rap­pe­ler l’heure tout de même, on n’est pas éter­nel, il fau­dra se rap­pe­ler l’heure et prendre à bras le corps nos frus­tra­tions et les dépo­ser au loin. J’a­vais l’i­dée de m’en­dor­mir un peu au chaud sous les arbres, mais le temps m’a rat­tra­pé, c’é­tait bon comme un soir d’é­té, avant qu’il ne pleuve.