J’ai trou­vé un jour un livre sur les explo­ra­teurs* sur la cou­ver­ture duquel figu­rait un visage très beau, énig­ma­tique, figé, le visage de quel­qu’un qui m’é­tait com­plè­te­ment incon­nu. Cet argu­ment aurait en fait suf­fi à ce que j’a­chète ce livre, la publi­ci­té en était savam­ment faite. Et puis, je l’ai oublié, jus­qu’à hier soir où je suis tom­bé sur un article sur Pierre Savor­gnan de Braz­za, né Pie­tro Pao­lo Savor­gnan di Brazzà à Cas­tel Gan­dol­fo. J’ai immé­dia­te­ment recon­nu ce visage incom­pa­rable qui m’a beau­coup trou­blé. Si je connais peu Braz­za pour son action et pour son rôle dans les débuts de la colo­ni­sa­tion fran­çaise, je sais qu’il est très aimé au Congo, pays auquel il a lais­sé un héri­tage pré­cieux ; le nom de sa capi­tale. Héros tra­gique, anti-escla­va­giste, offi­cier de marine un peu roman­tique, dan­dy un peu téné­breux, il est décé­dé suite à de fortes fièvres que d’au­cun diront cau­sées par un empoi­son­ne­ment. On ne pou­vait déci­der mort plus roman­tique pour un aven­tu­rier de sa trempe.
Dans ce visage au nez bus­qué, aux yeux sages, au visage lisse, à la barbe en pointe, il y a quelque chose de pro­fon­dé­ment calme, de visi­ble­ment à la fois doux et grave. Sa tête pen­chée sur le côté n’est pas qu’une simple pose qu’il prend pour le pho­to­graphe, c’est le signe de celui qui sait écou­ter mais aus­si de ceux qui se noient de leur magni­fique solitude.

A écou­ter sur France Inter, Les renais­sances de Savor­gnan de Braz­za dans La marche de l’his­toire.

Notes :
* Aven­tu­riers du monde : Les grands explo­ra­teurs fran­çais sous l’oeil des pre­miers pho­to­graphes (1866–1914)

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