Pho­to © Julien Four­niol

Retour des Atlan­tiques, la fleur au fusil et des larmes de joie dans les yeux. J’é­tais par­ti en pen­sant mitrailler, écrire, fil­mer, lire, et je n’ai pas fait la moi­tié de ce que je m’é­tais prévu.
Rien écrit. Deux pages, autant dire rien.
Je n’ai pas pho­to­gra­phié, ou très peu en fin de séjour sur les côtes bre­tonnes entre chien et loup lorsque la vie pre­nait fin sur le littoral.
Je me suis repo­sé. Après avoir fait filer le sable entre mes doigts de pied, j’ai eu un besoin de rochers et de petits cailloux.
Je n’ai rien fait du tout.
Beau­coup lu. C’est sym­pa les vacances avec moi. La plu­part des livres que j’a­vais emme­né ont été lus mais j’ai quand-même écu­mé toutes les librai­ries que j’a­vais à proxi­mi­té. Librai­rie des Per­tuis à Saint-Pierre d’O­lé­ron, à deux pas de la mai­son des aïeules où git la dépouille de Loti, librai­rie du renard à Paim­pol, librai­rie le bel aujourd’­hui à Tré­guier, librai­rie Gwa­larn à Lan­nion, je les ai toutes visi­tées, dépouillées, et je suis reve­nu, une fois de plus avec quatre fois plus de livres qu’au départ.
J’ai man­gé des moules pois­son-rouge, cho­ri­zo et poi­vrons, sauce tomate et vin blanc.
J’ai diné chez Sophie, dans sa mai­son face à la baie, bu ses paroles, écou­té chan­ter sa voix douce.
Je me suis lais­sé pous­ser la barbe et puis je l’ai rasée, elle me chatouillait.
J’ai bron­zé, je me suis lais­sé dorer au soleil.
J’ai lu les cartes marines.
J’ai rêvé. J’ai par­lé en songe à mon grand-père, c’é­tait chaud et doux. J’ai su alors que ce serait une autre fois sans lui.
C’é­tait des vacances, je n’é­tais pas là, je me suis vrai­ment absen­té, il fal­lait bien ça. A pré­sent, j’ai du mal à remettre les pieds dans les étriers, mais je suis reve­nu avec un nou­veau tra­vail, une rage de dents, des migraines oph­tal­miques et quelques mots grif­fon­nés sur mon carnet :

Tout ce silence ondule sur toi, comme de longues herbes.
Tu me fais me sen­tir poète.

A pré­sent, plus rien ne sera pareil.