Je prends un petit peu d’avance car m’est avis que ces prochains jours ne seront pas de tout repos et que même si je ne croule plus sous les dossiers — loin s’en faut — il me reste encore pas mal de choses à faire, des procédures à écrire, des petites choses à montrer aux gens qui vont me succéder, des consignes à passer. Pour cette fois, je vais préparer mes valises quelques jours en avance, ainsi que toutes les petites affaires que je vais emporter, livres, carnets, appareils photo… Mon projet étant de partir le soir même du jour des vacances, le 6 août. Ma voiture a trouvé judicieux de crever à l’arrière, elle ira donc faire un petit tour au garage avant le départ ; de toute façon je sentais bien qu’elle voulait aller se faire chouchouter avant de partir, la coquine.
Cette fois-ci, je pars tranquille, personne au boulot ne m’appellera, je n’aurais plus l’angoisse de la production à venir et de la publication le 23… Terminé tout ça. Je pars donc en congés, et je ne bloguerai pas, mais j’ai décidé de mettre à profit le fait que je parte pour élargir mon horizon et publier des choses avec mon nouveau téléphone transgénique.
Picasa : un dossier photo créé spécialement pour y déposer mes photos de vacances. Ne vous attendez pas à me voir nu sur le sable, je suis un garçon bien. C’est ici que je déposerai certaines de mes photos prises avec mon téléphone.
Youtube. Des toutes petites vidéos. Je compte mettre à profit un peu de mon temps pour créer quelques petites choses avec mon téléphone et la possibilité de les mettre en ligne facilement.
Flickr. Je me suis également créé un nouveau compte destiné uniquement à mes uploads de photos volées, prise avec mon application Retro Camera, disponible sur mon téléphone transgénique.
La vacance des grandes valeurs n’enlève rien à la valeur des grandes vacances (Henri Weber)
Je rêve de ces images à la Chalmers Butterfield dans lesquelles on vit pleinement le goût des grandes vacances, les visites des lieux bien fléchés, les endroits improbables que l’on retrouve dans les pages de Motel Blues de Bill Bryson. Un jour j’aimerais visiter les États-Unis par les lieux les plus ringards. Aller voir le plus grand dounut du monde à côté de LAX, mon rêve… Je rêve de vacances dans un car climatisé qui parcourrait l’Amérique d’est en ouest sur la route 66, derrière la vitre duquel je pourrais faire coucou à Johnny — sobre — sur sa Harley.
Chérie, je vais parcourir le pays, viens donc avec moi… Pas de souci, j’enfile ma chemise avec les petites pointes renforcées de métal, ma guitare et c’est parti, je me laisse aussi pousser les cheveux et la barbe. On part avec Alan “Blind Owl” Wilson et Bob “The Bear” Hite si ça ne te dérange pas…
[audio:country.xol]Imagine, on pourrait aussi emmener le Fender Rhodes, le Rhodes 77, ou le Fender Rhodes Bass 66 ! Soyons de grands fous et passons au mini Moog (par le Dr Bob Moog, himself). Et pourquoi pas des ondes Martenot pendant que tu y es ? Ou alors le Glassharmonica inventé par Benjamin Franklin ? Celui qu’on entend dans Casse-Noisette ?
[audio:bach.xol]Mais parfois les vacances peuvent tourner au cauchemar, surtout s’il s’agit de les passer dans un vieux bus au bord d’une piste menant à une mine d’antimoine désaffectée. C’est le genre de voyage qui se prépare, si on ne veut pas se retrouver à manger des racines de pomme de terre sauvage.
[audio:orange.xol]Je me plais souvent à voir dans chaque œuvre un tant soit peu marquante une sur-dimension qui n’existe pas forcément, j’aime à amplifier les points de concrétion romantiques pour y voir ce qu’il y a de plus critique à l’intérieur, comme un plongée savante au creux d’un monde de silence et de vertus. Je suis un romantique vicieux et décadent.
La bibliothèque portative
Voici venu le moment de faire mon choix de livres à emmener. Comme à chaque été, je commence à y penser trois semaines avant, et je commence à préparer ma pile une semaine avant le départ ; cette fois-ci j’ai décidé d’emmener des romans, beaucoup de romans. Je compte lire beaucoup et des choses un peu éloignées de tout ce que j’ai lu ces derniers temps et depuis le début de l’année ; pas de Moyen-Âge, pas d’histoire, pas d’histoire de l’art, pas d’Égypte et pas d’Alexandre le Grand, mais des écrivains, des vrais gens avec de l’écriture dedans. Déjà mon fils me dit « Papa, tu risques pas d’en manquer là ? T’en as pris que douze… Ah non, quinze… » Mais de quoi je me mêle ? C’est lui qui va les porter pendant le voyage ? C’est lui qui paie le gasoline de mon chopper ? Nan ? Bon alors. De quoi je te mêle !!!
Oui, la pile grossit à vue d’œil, et alors ? Je procède par élimination, j’entasse à peu près tous les livres que j’aimerais lire, c’est à dire à peu près tous les livres de ma bibliothèque non lus, et puis ensuite, je les choisis en fonction de l’ambiance que je souhaite pour mes congés ; plutôt studieuse, plutôt décontractée, plutôt voyage, plutôt grave… Et puis je fais un troisième en fonction de la facilité de lecture. Joyce ou Thoreau, c’est pas trop pour les vacances. Hier, au boulot, on m’a dit « Ah moi la lecture, c’est plaisir, sinon je m’emmerde », j’ai failli répondre « Moi j’aime bien m’emmerder quand je lis, ça me fait plaisir… Donc je ne lis que des trucs chiants et ça m’emmerde. »
Aujourd’hui, voici ma liste :
- Alberto Manguel, La bibliothèque, la nuit
- Bruce Chatwin, En Patagonie
- David Fauquemberg, Nullarbor
- Gerard Donovan, Julius Winsome
- Gustave Flaubert, Voyage en Orient
- Henry-David Thoreau, Balades d hiver, couleurs d automne
- John Cheever, le ver dans la pomme
- Michel Onfray, métaphysique des ruines
- Odette du Puigaudeau, le sel du désert
- Patrick Pluyette, la traversée du Mozambique par temps calme
- Pierre Loti, l’Inde (sans les Anglais), précédé de Mahé des Indes
- Rick Bass, Winter
- Xavier de Maistre, Voyage autour de ma chambre
Je pense que la liste n’est pas définitive, il y aura des remaniements ministériels. Certains ont été intérêt à se tenir à carreau. Il ne manquerait plus qu’une histoire d’île défiscalisée et nous voici partis pour le scandale de l’été.
J’ai également acheté Walden de Thoreau en édition bilingue, mais je vais me le garder sous le coude pour la rentrée.
Ça c’est pour mon ami Rasbaille qui ne connait pas bien Zappa…
[audio:pimp.xol]Frank Zappa - Hot Rats — 1969
Willie the Pimp
Du rhum et des femmes (oui enfin plutôt des carnets des stylos)
Étant donné que je n’en avais plus de carnets vierges (je ne sais pas par quel hasard je suis en train d’écouter au même moment la chanson de Frank Zappa, the Illinois Enema Bandit, Michael H. Kenyon — un de ces plus solides solos de guitare)… Bon, je recommence.
Étant donné que je…
Étant donné que je ne sais pas comment justifier cela, je me suis acheté un nouveau carnet.
Souvenez-vous du Carnet de l’Île que j’ai écrit pendant les vacances 2007, c’est exactement le même, à ceci près que l’élastique n’est pas tout à fait identique. Il n’y aura que ce carnet, aucun autre. De toute façon, je n’écris plus assez.
J’ai pris la résolution ferme et définitive de revenir de vacances avec un roman, ou l’ébauche d’un roman… Sinon, c’est peut-être que je suis en train de passer au travers de quelque chose qu’on peut appeler “une chance unique”…
JOUR J‑7
Officiellement, huit jours me séparent de mon dernier jour ici. Je commence à voir des étoiles, j’ai les yeux qui chassent, la tête qui s’endort. La fatigue s’accumule, la tension aussi, de devoir laisser tout ça derrière moi. Mes nuits sont trop courtes, je me réveille épuisé. Il est temps que ça s’arrête. On est vendredi, c’est toujours ça de gagné.
Ce soir je regarde le premier épisode du Prisonnier que j’ai enregistré la semaine dernière et que j’ai regardé la première il doit y avoir vingt-cinq ans de ça, minimum — le premier épisode date de 1967. En regardant l’épisode, je me rappelle que Numéro 6 est enfermé dans le village parce qu’il a démissionné. Je viens de démissionner… Je pars en vacances à Grand-Village… J’ai peur… Bon finalement, je ne dois pas être si effrayé que ça puisque je m’endors quand même devant et je manque la fin. Mon fils lui tient le coup et demande le second épisode (je me dis en secret — ouais ben falloir attendre que je me repasse la fin du 1er hein).
J’ai redécouvert récemment les albums de Frank Zappa que j’écoutais adolescent. Roxy and Elsewhere et son rock déjanté sur Don’t you ever wash that thing ?, ses envolées de jazz (tiens, je viens de me rendre compte qu’on entend un Moog et un Rhodes…) 9′40″ de bonheur un peu foutraque et mauvais pour le cœur, à écouter très fort évidemment.
[audio:wash.xol]Frank Zappa and the Mothers of invention- Roxy and Elsewhere — 1974
Don’t you ever wash that thing ?
JOUR J‑6
Une fois de plus, on est samedi et je me réveille tôt, migraineux, sous un ciel de plomb, un peu vaseux, fatigué, les yeux collés et le corps engourdi. Le week-end ne s’annonce pas de tout repos. Mais j’ai une nouvelle technique pour le week-end ; tout faire vite pour être certain de tout caser. Course folle.
La semaine dernière dans le train, j’étais assis non loin de Lydie. Je sais qu’elle s’appelait ainsi à cause du pendentif doré qui reposait tendrement sur son cou. Elle portait une chemise noire sans manches, avec un col large, et fermée par une simple fermeture éclair qui avait du mal à contenir la pression de sa poitrine.
Un peau cuivrée, lisse, sans grains de beauté, un bouche tendre et rouge, les yeux un peu éteints d’une femme qui a mal dormi car elle a attrapé un truc qui la fait tousser, certainement la climatisation, dissimulés derrière de fines lunettes qui lui donnent un air trop sérieux. Elle repose souvent son livre, pas très concentrée, regarde dans la vitre le soleil qui a du mal à s’extirper des nuages. Elle voit mon reflet qui la regarde dans la vitre, se retourne, pas un sourire. Froideur. Je ne peux m’empêcher de regarder sa chemise qui s’ouvre sur deux seins ronds qui subissent tendrement les chocs du train… Ils ont une couleur d’abricot et semblent doux comme un velours soyeux…
Je vole cet instant… Il est pour moi…
[audio:mud_shark.xol]Frank Zappa and the Mothers of invention- Fillmore East, june 1971
The Mud Shark
Cet album de Zappa a été intégralement réalisé avec deux zigotos, Mark Volman et Howard Kaylan, membres éminemment foutraques des Turtles, ceux-là, même qui ont détrôné Penny Lane des Beatles dans les charts avec leur tube Happy Together. Ils auront également une place d’honneur aux côtés de Theodore Bikel, Keith Moon et Ringo Starr, parfaitement barré dans son rôle de… Frank Zappa lui-même, dans le film que Zappa réalise avec les Mothers of Invention, 200 Motels, délire psychédélique et monty pythonesque, certainement conçu sous haute dose de stupéfiants…
JOUR J‑5
Je suis passé à Montesson me ressourcer. J’ai commencé ma valise et je me rends compte à quel point, d’années en années, cet acte anodin devient facile. Avec l’expérience des vacances, il est de plus en plus facile de faire sa valise en n’oubliant rien.
Je me réécoute des vieux Zappa, de plus en plus, je redécouvre, et je m’aperçois que je n’ai strictement rien oublié des airs et des paroles de ces morceaux que j’écoutais adolescent.
Car oui, adolescent je fus un jour et adolescent je reste. Je n’ai pas eu la même que la plupart que mes petits contemporains parce que par la force des choses, j’étais baigné dans une ambiance à moitié hippie, moitié rock dont Zappa tapissait les instants… Bongo Fury et Hot Rats en première ligne.
[audio:advance.xol]Frank Zappa and the Mothers of invention - Bongo Fury — 1969
Advance Romance
JOUR J‑4
Retour au boulot, plutôt en forme. Et ce n’est pas le travail qui va me crever cette semaine. Il va falloir trouver des occupations. Je crois que tous les clients sont morts, Paris est totalement vidée, le téléphone ne sonne pas. La revue de presse est en vacances, tous ceux qui m’envoient des mails d’ordinaire aussi. Je reçois des trucs auxquels je ne répondrai pas. J’envoie des mails à des gens qui ne me répondront que lorsque je serai déjà parti.
Il va falloir que ces journées passent vite sans quoi je vais comprendre ce qu’est l’ennui…
Heureusement je me repasse tous les morceaux les plus grandioses de Zappa, Sexual harassment in the workplace…
[audio:sexual.xol]Frank Zappa- Guitar — 1981
Sexual harassment in the workplace
Un de ses plus beaux solos de guitare, le plus énigmatique et le plus sensuel. Un morceau de guitare pour emballer. Un solo lent qui prend son temps.
Un lundi après-midi à Levallois, en plein mois d’août, par temps de pluie… C’est vraiment un tableau merdique. Qu’est-ce que je fous encore là ?
Je m’extasie sur la collection Pemberton, une panoplie de vieux papiers peints, les photos de Yuanling (远凌) Wang (王), celles de David Burdeny, exceptionnelles, superbes… Wings of the storm, magique…
JOUR J‑3
J’ai des envies de fictions, des choses viennent comme ça naturellement, se construisent dans mon esprit. Je tire tout cela des jours discrets. On m’a dit aujourd’hui, ce matin, que j’étais ce genre de garçon qui aime les choses tues. Je suis aussi un garçon qui tait l’indicible et ne dévoile que ce qui a une tendance naturelle à ne pas se dévoiler. Capteur d’invisible, détrousseur de secrets et trousseur de jeunes filles en fleur.
Je m’emmerde. Alors j’écoute Bwana Dik et je me marre tout seul.
[audio:muffin.xol]Girls from all over the world
Love to write my name on the toilet walls
At the Whisky a Go Go
For I am Bwana DikMy dick is a monster
Give me your heart
Bwana Dik is a legend
Enormous thou art!
Frank Zappa and the Mothers of invention - Bongo Fury — 1969
The muffin man
JOUR J‑2
Frank Zappa, Jean-Luc Ponty, George Duke, un trio d’enfer pour ce morceau fiévreux, compliqué, joué à une vitesse incroyable.…
[audio:5050.xol]Frank Zappa- Apostrophe / Overnite Sensation — 1990
Fifty fifty
Je commence à m’essouffler tout seul, je ressasse de vieux trucs qui remontent à la surface, je regarde les heures passer sans vraiment savoir quoi faire. Je suis encore trop investi pour vraiment m’emmerder et plus assez pour vraiment pour m’intéresser à quoi que ce soit, dans une sorte d’entre-deux, purgatoire du monde professionnel qui incite à se retourner vers soi-même et à se poser cinquante mille fois la question de savoir si on fait bien, si on n’aurait pas mieux fait de, si c’était pas mieux de jusqu’au moment où je me regarde dans le miroir des toilettes et que je me dis arrête bon dieu, t’es en train de dérailler tu sais plus ce que tu dis, t’es en train de t’enfoncer dans une merde noire, alors ta gueule, arrête de penser un peu.
Oui je me pose trop de questions, mon esprit file à la vitesse de la lumière, mon corps est engourdi, mon esprit envasé mais toujours vif, je suis littéralement crevé, il est temps que je quitte ces gens et je me dis que finalement ce sont certainement eux les fous, ce sont eux qui déconnent. Moi je pars en vacances. Le jour du départ est le jour d’un double départ, en vacances et de mon bureau. Après, c’est fini. Le trou béant du néant inconnu…
JOUR J‑1
Aujourd’hui, je fais mon pot de départ, j’ai passé ma soirée d’hier à faire des gâteaux, enfourner, mixer, préparer, chemiser, j’en ai marre. Je veux mes vacances !!!!!
[audio:napkins.xol]Frank Zappa- Make a jazz noise here — 1988
Black Napkins
J’ai la tête qui explose, je me demande si je vais tenir jusqu’à demain soir.
JOUR J
La mauvaise surprise d’avant les vacances, c’est quand on vous annonce que le joint spi de votre voiture est mort, alors qu’elle est encore sur le pont avec les pneus arrière à peine montés, que le garage ferme pour congés ce soir, et que ça va prendre 5 heures à tout démonter, remonter, et que ça va coûter un bras, une jambe et une couille… Je ne sais même pas comment (ou si) je vais partir.
Mon pot de départ n’a pas été triste, j’ai fait un discours à la con en leur promettant plein de cochonneries dans mes dossiers, les voilà prévenus.
Voilà, c’est terminé. Je m’en vais. C’est fini.
C’est les vacances.
Tout à l’heure, je vais rendre mon badge, chercher mon chèque, mon attestation. La bise et on ferme.
tu vas me manquer. Non, en fait, tu me manques déjà…
avec tout ce barda, tu passeras pas inaperçu au far ouest… amusant, tout ce qu’on ne peut pas mettre dans une valise…
t’es sûr que MediaM te met pas à la porte ? à cause de tout ce que tu fais depuis 7 jours visiblement en dehors du boulot ?;-)
7 jours, que dis-je… ça fait combien de temps, ce blog, hein ;-))
Parfois je travaillais entre deux billets 😉
c’est quoi un joint spi ? ah mais non, je m’en fiche, au fond 🙂
dis, tu me ramènes un galet peint ?
bon là on est le 26 août, j’attends toujours tes vidéos réalisées avec ton téléphone interplanétaire
Ouais alors en fait, j’ai très largement sous-estimé la couverture 3G en France et la possibilité de se connecter ne serait-ce que sur une simple page web. Va falloir que je fasse du tri dans tout ça et que je balance
quand même ça trouve le chemin le plus court vers Kerenoc (22) le 3G, balance pas trop !
Oui mais je te jure que sur Plouëc du Trieux, il faut pédaler fort pour pouvoir téléphoner. Là où j’ai eu la meilleure couverture, c’était Lannion !
Lannion, capitale des télécom 😉
Ah ben vi tiens, j’avais oublié 🙂