Je ne vous mène pas à l’in­té­rieur, dit Maung Khin Maung, et sa voix expri­mait une émo­tion sin­gu­lière. Il fau­drait des jours et des jours, et encore vous n’au­riez fait qu’une par­tie du che­min. Je ne crois pas qu’il existe aujourd’­hui un mineur, même par­mi les plus vieux, qui connaisse entiè­re­ment les gorges sou­ter­raines à quoi conduit cette cre­vasse. Toute la mon­tagne est creuse. On fouille là depuis des siècles. Aux gale­ries, aux caves et aux grottes natu­relles, les mineurs de rubis ont ajou­té par cen­taines, cou­loirs, niches, cel­lules, alvéoles. Dans tous les sens. A tous les niveaux. Sur le flan des abîmes obs­curs. Au fond des gouffres noirs. Là même où reposent les osse­ments immenses des bêtes qui n’existent plus sur terre… Les sque­lettes des Grands Élé­phants Morts.

Joseph Kes­sel

La val­lée des rubis, Gal­li­mard, 1955

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