Le phare du bout du monde
Retour des Atlantiques, la fleur au fusil et des larmes de joie dans les yeux. J’étais parti en pensant mitrailler, écrire, filmer, lire, et je n’ai pas fait la moitié de ce que je m’étais prévu.
Rien écrit. Deux pages, autant dire rien.
Je n’ai pas photographié, ou très peu en fin de séjour sur les côtes bretonnes entre chien et loup lorsque la vie prenait fin sur le littoral.
Je me suis reposé. Après avoir fait filer le sable entre mes doigts de pied, j’ai eu un besoin de rochers et de petits cailloux.
Je n’ai rien fait du tout.
Beaucoup lu. C’est sympa les vacances avec moi. La plupart des livres que j’avais emmené ont été lus mais j’ai quand-même écumé toutes les librairies que j’avais à proximité. Librairie des Pertuis à Saint-Pierre d’Oléron, à deux pas de la maison des aïeules où git la dépouille de Loti, librairie du renard à Paimpol, librairie le bel aujourd’hui à Tréguier, librairie Gwalarn à Lannion, je les ai toutes visitées, dépouillées, et je suis revenu, une fois de plus avec quatre fois plus de livres qu’au départ.
J’ai mangé des moules poisson-rouge, chorizo et poivrons, sauce tomate et vin blanc.
J’ai diné chez Sophie, dans sa maison face à la baie, bu ses paroles, écouté chanter sa voix douce.
Je me suis laissé pousser la barbe et puis je l’ai rasée, elle me chatouillait.
J’ai bronzé, je me suis laissé dorer au soleil.
J’ai lu les cartes marines.
J’ai rêvé. J’ai parlé en songe à mon grand-père, c’était chaud et doux. J’ai su alors que ce serait une autre fois sans lui.
C’était des vacances, je n’étais pas là, je me suis vraiment absenté, il fallait bien ça. A présent, j’ai du mal à remettre les pieds dans les étriers, mais je suis revenu avec un nouveau travail, une rage de dents, des migraines ophtalmiques et quelques mots griffonnés sur mon carnet :
Tout ce silence ondule sur toi, comme de longues herbes.
Tu me fais me sentir poète.
A présent, plus rien ne sera pareil.
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