Pause déjeu­ner

(Glam Moles­kine n°42) Par­fois, le midi, quand les autres parlent bou­lot, je reste à mon bureau et je des­sine ce que je vois. Contrai­re­ment à pas mal d’autres acti­vi­tés, celle-ci prend du temps.

Rue Louis Rouquier

Read more

Kom ash-Shu­q­qa­fa

Ima­gi­nez-vous mar­cher dans les rues d’A­lexan­drie en 1900 der­rière un âne. L’âne marche d’un air débon­naire et sou­dain dis­pa­rait de l’ho­ri­zon, englou­ti par un trou béant qui s’est ouvert sous son poids. C’est appa­rem­ment le scé­na­rio qui s’est dérou­lé le jour où ont été décou­vertes les cata­combes de Kom ash-Shu­q­qa­fa (Kom-el-Chou­qa­fa — la col­line aux tes­sons), non loin du canal el Mah­mou­diya. Cet immense hypo­gée est le plus grand site archéo­lo­gique mis à jour à Alexan­drie et demeure le der­nier ves­tige de la reli­gion égyp­tienne, même si le style en est clai­re­ment romain, et la déco­ra­tion dans un style typi­que­ment gré­co-romain carac­té­ris­tique d’A­lexan­drie. Construit à la fin du Ier siècle, il a été uti­li­sé pen­dant près de trois siècles. Ce sont en tout 300 tombes qui ont été mises à jour, répar­ties sur trois niveaux dont le plus bas est aujourd’­hui inon­dé et impra­ti­cable, à 35 mètres sous terre, le tout entiè­re­ment creu­sé dans la roche. Le lieu est orga­ni­sé autour d’une grande rotonde qui des­sert toutes les pièces, tombes prin­ci­pales comme d’autres plus récentes. L’en­semble est com­po­sé d’un puits par lequel on pas­sait les corps, la rotonde, la salle prin­ci­pale, toute un bor­dée de locu­li (niches) et un tri­cli­nium, une salle de ban­quet des­ti­née aux invi­tés. Les pre­miers archéo­logues à y entrer trou­vèrent de la vais­selle et des amphores encore pleines de vins.

L’é­poque de construc­tion de cet hypo­gée cor­res­pond avec le moment où la ville d’A­lexan­drie ne sait pas quelle reli­gion adop­ter, tiraillée entre les pré­misses d’un chris­tia­nisme hési­tant, le pan­théisme de Rome ou d’A­thènes et les anciennes croyances égyp­tiennes. On voit mêlé dans la tombe disques solaires, sta­tues d’Anu­bis (dieu dévoué au pas­sage vers le pays des mort) affu­blée de la queue de ser­pent d’Aga­thos (Aga­tho­dae­mon, αγαθος δαιμων) et vêtu comme un légion­naire  romain. On y voit éga­le­ment des pein­tures repré­sen­tant l’en­lè­ve­ment de Per­sé­phone par Hadès et la momi­fi­ca­tion d’Osi­ris. La confron­ta­tion des dif­fé­rents styles a tou­jours quelque chose d’un peu étrange par­fois, pour ne pas dire ridi­cule. Le haut-relief d’A­nu­bis sty­li­sé “à la grecque”, avec muscles saillants et pose manié­rée, le tout mêlé à la repré­sen­ta­tion dans laquelle s’ex­prime le refus de tour­ner le corps est sin­gu­liè­re­ment inap­pro­priée, mais c’est un témoi­gnage des temps trou­blés, entre deux eaux.

  1. The Cata­combs of Kom el-Shu­qa­fa, the “Mound of Shards,” Part I: An Intro­duc­tion and the First Level by Zah­raa Adel Awed
  2. The Cata­combs of Kom el-Shu­qa­fa, the “Mound of Shards,” Part II: The Second Level and the Main Tomb by Zah­raa Adel Awed
  3. The Cata­combs of Kom el-Shu­qa­fa, the “Mound of Shards,” Part III: The Hall of Cara­cal­la (Neben­grab) by Zah­raa Adel Awed

Mes­sage per­so : page 453

Read more